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En quoi le coaching est la réponse à la quête contemporaine du bonheur ?

Thierry OSWALD

Coach professionnel certifié et enseignant en école de commerce, et ancien cadre des ressources humaines. Il croit fermement que l’épanouissement individuel et la cohésion collective sont les clés du succès en entreprise.

Il accorde une grande importance au coaching pour guider les individus et les équipes vers l’excellence, renforçant ainsi son engagement envers le développement personnel et professionnel de ses clients. Sa passion pour la psychologie positive guide sa pratique, favorisant la création d’un environnement de travail propice au bien-être des employés et à la performance globale de l’entreprise.

Avec une approche centrée sur la dynamique individuelle et collective, Thierry vise à catalyser le changement et à promouvoir une culture de croissance et de collaboration au sein des organisations. En combinant expérience pratique, expertise académique et engagement, il incarne une vision managériale, où le développement personnel et professionnel est au cœur de la réussite stratégique.

Introduction :

Le concept de « bonheur » peut être galvaudé, mais sa quête continue de nous préoccuper.  « Le business du bonheur, » documentaire écrit par Claire Alet et Jean-Christophe Ribot, décrit la course effrénée au bonheur et souligne les dangers qui guettent ceux qui la suivent frénétiquement. Ce film m’a profondément interpellé en raison de mon expérience en tant que coach professionnel.

Ayant préalablement traité de la motivation dans mon passé de RH, j’ai eu l’occasion d’observer la quête du bonheur auprès des salariés dont je m’occupais. Souvent perçue comme une recherche incessante du plaisir et du bien-être, elle constitue une préoccupation commune à tous. J’ai choisi d’explorer ce sujet en raison de mes observations dans mes activités de coaching. En constatant les dangers potentiels de cette course effrénée au bonheur : l’émergence de coachs non certifiés et autres gourous exploitant ce marché et le mal-être dans l’injonction au bonheur, je me suis intéressé à comprendre comment le coaching pouvait répondre aux véritables besoins de cette quête universelle.

Mon objectif est de comprendre comment un coaching responsable, axé sur la recherche du sens, pourrait aider les individus à trouver une satisfaction durable plutôt que de poursuivre un bonheur éphémère.

#Coaching, développement personnel, motivation, bonheur

PARTIE 1 : L’APPORT DE LA PSYCHOLOGIE POSITIVE DANS LE COACHING

Des théoriciens comme Tal Ben-Shahar explorent la question du bonheur et sa quête. Dans L’apprentissage du bonheur[1] Tal Ben-Shahar partage une de ses expériences personnelles. Après des mois de préparation physique, un régime strict et beaucoup d’efforts, il a remporté un championnat de squash, pensant que cela lui apporterait le bonheur. Cependant, après avoir atteint cet objectif, il réalise que le bonheur est éphémère, que ce sentiment s’est rapidement dissipé, laissant place à un sentiment de vide. Il entreprend alors une quête plus profonde pour comprendre la nature du bonheur.

Bien entendu personne n’a découvert la recette miracle du bonheur, mais ses travaux énoncent des principes généraux qui peuvent contribuer à une existence épanouissante. Il reconnaît cependant que certains obstacles internes (comme la dépression) et externes (comme les conditions de vie compliquées) peuvent rendre cette quête plus difficile voire impossible. La quête du bonheur peut être complexe et dépendante de divers facteurs, et qu’il n’existe pas de solution unique applicable à tous.

Ainsi, la littérature insiste sur l’importance de ne pas se fixer sur l’idée d’un bonheur parfait, sans troubles et de ne pas gaspiller son énergie à évaluer constamment son niveau de bonheur. Au lieu de cela, il propose de considérer le bonheur comme une ressource illimitée et de se concentrer sur les différentes façons d’en puiser toujours plus. Nous verrons en quoi cette vision est concordante avec le processus de coaching.

1.1. Créer des rituels

Nous savons bien que le changement n’est pas chose aisée. La recherche montre que nous avons plus de mal que nous ne le pensons à acquérir de nouveaux savoir-faire, adopter des comportements différents ou nous débarrasser de vieilles habitudes; et que la plupart du temps, qu’il s’agisse d’un individu ou d’une organisation, les tentatives de transformation échouent[2]. L’autodiscipline est en général insuffisante lorsqu’il s’agit de tenir nos engagements, même quand nous savons que c’est dans notre intérêt.

Dans un livre intitulé Le Pouvoir de l’engagement total[3], Jim Loehr et Tony Schwartz abordent la question du changement selon un angle inédit: au lieu de cultiver l’autodiscipline comme moyen d’atteindre le changement, il faut introduire des rituels. Selon eux, l’élaboration de rituels requiert un comportement très précis et une mise en pratique à des moments bien définis – le tout motivé par des valeurs personnelles importantes.

L’élaboration d’un rituel peut être difficile, mais une fois établi, sa perpétuation est plus facile. Prenons l’exemple des athlètes de haut niveau qui ont des rituels bien définis autour de leur entraînement. De même, des habitudes simples comme se brosser les dents matin et soir sont des rituels qui ne nécessitent pas beaucoup d’autodiscipline.

La psychologie positive nous encourage à réfléchir aux rituels que nous aimerions introduire dans notre vie pour être plus heureux. Cela pourrait être faire du sport régulièrement, méditer tous les matins, sortir au cinéma avec son/sa conjoint(e) chaque semaine, lire un livre tous les jours, etc.

Cette recherche de routine fait écho au travail du coach sur l’identification et la recherche de plaisir de nos clients. Nous rappellerons les différents types de plaisirs dans le tableau ci-après :

PLAISIR ACTION RELIEE
PHYSIOPLAISIRS Faire un massage, manger du chocolat …
SOCIOPLAISIRS Café avec ses amis, sourire à un inconnu …
PSYCHOPLAISIRS Ecrire, lire, jouer de la musique …
IDEOPLAISIRS Méditer, trouver du sens, philosopher …

Cependant, il ne faut pas introduire trop de rituels à la fois et s’assurer qu’ils deviennent des habitudes avant d’en ajouter de nouveaux.

Selon Aristote on peut expliquer que l’excellence réside dans les habitudes que nous répétons régulièrement. Ce qui met en avant l’importance de mettre en place des rituels pour favoriser la réussite de nos clients.

Certains clients peuvent craindre que les rituels ne diminuent la spontanéité et la créativité, en particulier lorsqu’il s’agit de rituels relationnels ou artistiques. Cependant, Tal Ben-Shahar affirme que la ritualisation de certaines activités permet de s’y investir réellement plutôt que de simplement réagir aux demandes des autres, ce qui par là même favoriserait l’autonomie. La mise en place de rituels ne signifie pas que chaque heure de la journée doit être planifiée, une certaine place doit être faite à la spontanéité. Il suggère même d’intégrer la spontanéité dans les rituels et souligne que les individus les plus créatifs observent tous des rituels dans leur vie.

1.2. Les domaines de vie

Les domaines de vie d’Hudson sont un cadre conceptuel qui peut être intégré dans la mise en place de rituels pour nos clients. Ces domaines de vie offrent une projection concrète pour améliorer différents aspects de leur vie, en les aidant à identifier et à équilibrer les dimensions importantes. Ils peuvent identifier leurs objectifs et aspirations spécifiques dans chaque domaine, puis élaborer des rituels qui les aideront à progresser de manière équilibrée. Ces rituels ne doivent pas être contraignants, mais être plutôt des pratiques intentionnelles visant à renforcer leur engagement envers eux-mêmes.

En intégrant consciemment des rituels dans ces divers aspects de leur vie, nos clients encourageront leur développement personnel et leur épanouissement. En fin de compte, cette approche les aidera à cultiver l’autonomie et la satisfaction au quotidien, en les rapprochant de la réalisation de leur vie idéale mais en tenant compte de leur situation actuelle. Les domaines de vie d’Hudson se révèlent comme un précieux outil pour guider nos clients dans cette démarche globale d’amélioration, en offrant une projection concrète pour améliorer divers aspects de leur existence. Cette approche permet d’identifier et d’équilibrer les différentes dimensions importantes de leur vie, offrant ainsi un cadre conceptuel pour explorer chaque sphère de manière réfléchie. Voici quelques exemples de ces domaines de vie d’Hudson :

  • Santé et bien-être : Ce domaine englobe tout ce qui concerne votre santé physique et mentale, ainsi que vos habitudes de vie liées au bien-être général.
  • Relations et famille : Ce domaine traite de vos relations interpersonnelles, de la qualité de vos interactions avec votre famille, vos amis et vos proches
  • Carrière et contribution : Il s’agit de votre travail, de vos aspirations professionnelles et de la façon dont vous contribuez à la société ou à votre communauté.
  • Développement personnel : Ce domaine concerne votre croissance personnelle, votre apprentissage continu, et votre recherche de sens et d’accomplissement.
  • Loisirs et plaisir : Ici, nous considérons les activités récréatives, les hobbies, les moments de détente et de plaisir qui enrichissent votre vie.
  • Environnement : Ce domaine inclut votre espace de vie, l’environnement dans lequel vous évoluez et comment cela influe sur votre bien-être.

En utilisant cet outil, le client peut réfléchir à chaque domaine, identifier ses objectifs, ses aspirations spécifiques, puis élaborer des rituels qui l’aideront à progresser dans chacun d’eux de manière équilibrée. En intégrant consciemment des rituels dans ces différents aspects de sa vie, le client favorisera son développement personnel, sa croissance et son épanouissement.

Il est essentiel de se rappeler que les rituels ne doivent pas être contraignants ou restrictifs, mais plutôt des pratiques intentionnelles qui renforcent l’engagement envers soi-même et de ses aspirations. En accordant de l’importance à la spontanéité et à la créativité, tout en utilisant les rituels comme un moyen de soutenir le bien-être global, nous pouvons réellement cultiver l’autonomie et la satisfaction dans la vie quotidienne.

1.3. Mettre sa vie en tableau

Il est difficile d’apprécier comment nos croyances conditionnent nos comportements, mais selon la littérature, il est possible d’évaluer le niveau de bonheur dans sa vie et de trouver des moyens pour l’améliorer. Une méthode consiste à consigner par écrit ses activités quotidiennes et à évaluer leur potentiel de plaisir et de sens. En passant en revue ses journées, nous pouvons détecter des schémas récurrents et prendre conscience des activités qui ne nous procurent ni plaisir ni sens. Nous pouvons ensuite ajuster notre vie pour inclure davantage d’expériences plaisantes et significatives.

Il n’existe pas de recette universelle pour le bonheur, car chaque individu est un système complexe et unique. En se concentrant sur nos propres activités quotidiennes, nous pouvons identifier nos propres manques et besoins spécifiques. Il est recommandé de consigner nos activités quotidiennes pendant une à deux semaines, en notant le temps consacré à chaque activité, ainsi que le niveau de plaisir et de sens qu’elle nous procure. Nous pouvons utiliser une échelle de notation pour évaluer ces aspects. À la fin de la semaine, nous pouvons dresser un tableau récapitulatif des activités, indiquant si nous souhaitons y consacrer plus ou moins de temps. Cela nous permet de prendre conscience de la répartition de notre temps et de trouver des ajustements pour une vie plus épanouissante.

Voici un exemple partiel de ce que pourrait donner un tel tableau :

Activité Sens Plaisir Temps / semaine
Passer du temps en famille 5 4 2h ++
Réunions de travail 4 2 11h =
Regarder la télévision 2 3 5.5h

Cet exercice peut compléter celui des domaines de vie d’Hudson et aider un client avec plus de précision sur les actions à mener.

PARTIE 2 : LES PHASES DE VIE

2.1. La théorie des Hamburgers

Qui n’a jamais vécu une phase de restriction suivie d’envie incontrôlable pour une récompense ? Après un régime, décider de se récompenser en mangeant des hamburgers semble une bonne idée, mais une fois devant vos burgers vous n’en avez plus envie. Cela nous amène à reprendre une autre théorie sur le bonheur : la « théorie du hamburger ». Après un régime alimentaire sain, le corps s’est « purifié » et il déborde d’énergie. Manger les hamburgers procurerait certes du plaisir, mais on sait qu’ensuite on se sentira mal, avec un estomac lourd et fatigué. Ainsi, Tal Ben-Shahar voit les quatre hamburgers devant lui comme des archétypes distincts représentant des visions et des comportements structurés.

Après la boussole de Kourilsky et les saisons d’Hudson, voici donc la « théorie du hamburger » en décrivant quatre archétypes symbolisés par des hamburgers.

Ce modèle est particulièrement utile au coach pour déterminer les besoins que le client souhaite satisfaire.

Le premier archétype, appelé hédonisme, représente le plaisir immédiat sans se soucier des conséquences futures. Le deuxième archétype, l’arrivisme, met l’accent sur les bénéfices futurs au détriment du plaisir immédiat. Le troisième archétype, le nihilisme, est caractérisé par un manque de plaisir tant dans le présent que dans l’avenir. Enfin, le quatrième archétype, le bonheur, combine le plaisir immédiat avec des bénéfices futurs, offrant ainsi une expérience complète. Ces archétypes sont des formulations théoriques qui peuvent être présents en nous à différents degrés.

Ces archétypes présentent des concepts illustrés par un personnage fictif nommé Timon reprenant chaque archétype de manière exagérée. Voici une représentation schématique de ces 4 archétypes :

[4]https://www.youtube.com/watch?v=74Wei0-vAZs

  1. Archétype de « l’arriviste » : depuis son enfance, Timon est conditionné à croire que le succès se mesure par les bonnes notes et les accomplissements futurs. Il se consacre entièrement à ses études et à sa carrière, sacrifiant le plaisir immédiat au nom d’une hypothétique satisfaction future. Malgré ses réussites, Timon ne parvient pas à trouver le bonheur et se rend compte qu’il est pris dans un cycle perpétuel de recherche de nouveaux objectifs. Il est anxieux à cause de la peur de résultats médiocres et de passer à côté d’informations importantes à l’école. Il accepte les valeurs des adultes et travaille dur malgré son aversion pour l’école. Il pense qu’il pourra profiter de la vie plus tard. Timon entreprend des études supérieures, espérant enfin trouver le bonheur, mais l’angoisse revient rapidement. Il obtient un poste prestigieux dans un cabinet juridique, mais se rend compte qu’il n’apprécie pas les longues heures de travail et ne ressent aucune satisfaction malgré sa réussite apparente. Le fonceur confond le soulagement après avoir atteint un but avec le bonheur, renforçant ainsi l’illusion que la seule atteinte des objectifs mène au bonheur. Il se consacre à construire un CV impressionnant et se fixe des objectifs pour enrichir ce CV mais n’apprécie pas ses activités.

La société encourage cette mentalité en récompensant les résultats plutôt que le processus. Le soulagement temporaire qu’il éprouve après avoir atteint un but ne conduit pas à un bonheur durable.

  1. Archétype du « viveur » : qui recherchent le plaisir et évitent les tourments. Ils se concentrent uniquement sur le présent et s’efforcent de satisfaire leurs désirs immédiats sans penser aux conséquences à long terme. Ils enchaînent les plaisirs et passent rapidement d’une expérience à l’autre dès que la nouveauté s’estompe. Cependant, ce mode de vie peut entraîner des comportements préjudiciables s’ils offrent une gratification immédiate, tels que la consommation de drogues ou l’évitement du travail. Timon qui, n’a pas réussi à atteindre le bonheur en poursuivant un but après l’autre, décide de vivre dans le présent. Il s’autorise à boire et développe des addictions, et se paie le luxe de liaisons purement hédonistes. Il s’absente souvent de son travail, se dore au soleil pendant des heures, et savoure la béatitude de ceux qui vivent sans but et n’ont pas à se préoccuper du lendemain. Pendant quelque temps, il se croit heureux, mais il ne tarde pas à s’ennuyer et à se sentir malheureux.

L’erreur des viveurs réside dans leur croyance selon laquelle l’effort équivaut à la souffrance et le plaisir équivaut au bonheur. Cela est illustré par un épisode de la série télévisée « La Quatrième Dimension » où un criminel, abattu par la police, se retrouve au paradis et reçoit tout ce qu’il souhaite sans avoir à fournir d’efforts. Cependant, avec le temps, le plaisir qu’il ressent diminue et le manque de défis et d’efforts devient ennuyeux. Il réalise alors que la vie sans objectif à long terme perd son sens.

Prenons également le cas de sud-africains qui ont lutté contre l’apartheid. Après la réalisation de leur objectif, beaucoup ont ressenti un vide et une dépression, car ils n’avaient plus de cause à défendre avec passion. Certains ont réussi à retrouver un sens à leur vie en s’investissant dans leur famille, leur communauté, leur travail ou leurs passe-temps, mais d’autres ont continué à chercher un but à poursuivre. Une expérience similaire menée par des psychologues a montré que des étudiants payés pour ne rien faire ont fini par se sentir mal à l’aise malgré le fait qu’ils gagnaient plus d’argent qu’en travaillant. Ils ont finalement choisi de quitter cette situation confortable pour un emploi plus exigeant mais plus gratifiant sur le plan personnel.

Selon les recherches de Mihaly Csikszentmihalyi, les moments les plus satisfaisants surviennent lorsque nous faisons preuve d’efforts délibérés pour accomplir des tâches difficiles mais valorisantes. Notre existence n’est pas destinée à être une recherche permanente du plaisir et de l’évitement des difficultés. Le bonheur se trouve dans la progression et les défis que nous relevons. Et c’est en cela que le coaching est un moteur dans l’accession au bonheur. Les termes mêmes des contrats passés avec nos clients ont pour but de les aider à atteindre leur objectif. Dans quel but, si ce n’est d’être heureux ?

  1. L’archétype du « défaitiste » est celui qui a renoncé au bonheur et croit que la vie n’a pas de sens. Il est enchaîné à ses échecs passés et résigné à son malheur présent, ne voyant aucune perspective d’amélioration. Malheureux dans le rôle du fonceur tout aussi mal à l’aise en viveur et ignorant qu’il existe d’autres options, Timon se résigne au malheur et devient défaitiste point mais pour ce qui est de ses enfants ? S’il ne leur souhaite évidemment pas une vie de « désespoir tranquille », il ne voit pas comment les guider. Doit-il leur apprendre à endurer la souffrance présente afin d’atteindre le but recherché ? Impossible, puisqu’il connaît les affres de l’arrivisme ! Vaut-il mieux leur dire de vivre simplement dans le présent ? Sachant bien à quel point l’existence de l’hédoniste est creuse, il en est tout aussi incapable.

Martin Seligman et Steven Maier ont mené une expérience sur des chiens et ont montré comment l’impuissance apprise peut conduire à l’apathie et à la résignation[5]. Le but de cette expérience était la croyance qu’un individu développe lorsqu’il se sent incapable de contrôler ou d’échapper à des situations stressantes, même si les circonstances changent.

L’expérience a été réalisée en deux phases avec des chiens. Dans la première phase, les chiens ont été répartis en trois groupes :

  • Groupe de contrôle : Ces chiens ont été placés dans des cages et n’ont pas été soumis à aucune des stimulations aversives.
  • Groupe expérimental 1 (Groupe impuissant) : Ces chiens ont été placés dans des cages où ils ont été exposés à des chocs électriques. Cependant, contrairement au groupe 2, ils n’avaient aucun moyen de contrôler ou d’échapper à ces stimulations désagréables.
  • Groupe expérimental 2 (Groupe maîtrisable) : Ces chiens ont également été soumis à des stimulations aversives, mais ils avaient la possibilité de mettre fin aux chocs électriques en actionnant un levier dans leur cage.

Dans la deuxième phase de l’expérience, tous les chiens ont été placés dans une nouvelle situation où ils avaient la possibilité d’éviter les chocs électriques en sautant par-dessus une barrière basse.

  • Les résultats : Le groupe de contrôle, qui n’avait jamais subi d’impuissance, a rapidement appris à sauter par-dessus la barrière pour éviter les chocs électriques.
  • Le groupe expérimental 2 (ayant eu la possibilité de contrôler les stimulations aversives) a également appris rapidement à éviter les chocs en sautant par-dessus la barrière.
  • Le groupe expérimental 1 (le groupe impuissant) a eu des difficultés à apprendre à éviter les chocs, même s’ils avaient maintenant la possibilité de le faire. Ils semblaient avoir appris l’impuissance et ne cherchaient pas à échapper aux chocs, malgré la disponibilité d’une solution.

Cette expérience a été reconduite sur des êtres humains ce qui a démontré que lorsque les individus se trouvent dans des situations où ils sont confrontés à des événements stressants et qu’ils ne peuvent pas exercer de contrôle sur eux, ils peuvent développer un sentiment d’impuissance apprise. Cette croyance peut ensuite influencer leur comportement dans d’autres situations similaires, les rendant passifs et incapables de chercher des solutions, même lorsque la situation change et qu’une issue est possible. L’expérience de Seligman a eu un impact significatif sur la compréhension de la psychologie du comportement et de la motivation chez les humains, ainsi que sur le développement des thérapies cognitives et comportementales.

Mais le raisonnement du « défaitiste » est erroné, tout comme celui du fonceur et du viveur. Le bonheur ne réside ni dans la réalisation d’un objectif précis ni dans la recherche de plaisirs éphémères, mais dans une synthèse entre les accomplissements et les moments présents. Il existe une autre voie qui peut nous conduire vers le bonheur. C’est là que les coachs montrent leur valeur ajoutée car ils aident leurs clients à trouver l’équilibre.

  1. Le « bienheureux » est celui qui cherche à concilier le bonheur immédiat et le bonheur à long terme. Plutôt que de se demander s’il doit être heureux maintenant ou plus tard, il se pose la question de comment être heureux maintenant et plus tard. Il reconnaît que parfois les bénéfices immédiats et futurs peuvent être contradictoires, mais la plupart du temps, il est possible de les concilier. Par exemple, dans les études, on peut trouver du plaisir dans l’apprentissage tout en se préparant pour une carrière future. Dans les relations amoureuses, on peut chérir le temps passé avec son partenaire tout en favorisant leur développement personnel. Dans le travail, on peut avancer vers ses objectifs tout en appréciant le chemin qui y mène. Il est important de ne pas s’attendre à un bonheur permanent, car il peut y avoir des sacrifices à court terme pour des bénéfices à long terme. Le « bienheureux » reconnaît qu’il faut parfois faire passer l’avenir avant le présent dans notre intérêt, mais sans oublier le but ultime de se consacrer à ce qui apporte un bénéfice présent et futur.

Parfois, le fait de se focaliser sur le présent peut être revigorant, tant que cela n’a pas de conséquences négatives à long terme. Pour atteindre le bonheur à long terme, il faut savourer le voyage vers une destination choisie plutôt que de croire que le bonheur sera atteint uniquement à l’arrivée. Le « bienheureux » évite de devenir l’esclave de l’avenir, du moment présent ou du passé, en vivant pleinement l’expérience de l’ascension vers le bonheur.

 

2.2. Les cycles de vie

La théorie des hamburgers, proposée par Tal Ben-Shahar, offre une perspective intéressante sur les comportements humains en matière de bonheur et de satisfaction. Cette théorie est utile aux coachs, car elle leur permet de mieux comprendre les besoins de leurs clients et de les aider à trouver un équilibre entre la satisfaction immédiate et les bénéfices à long terme.

En parallèle, les cycles de vie d’Hudson, qui expriment différentes saisons émotionnelles et psychologiques que les individus traversent au fil de leur vie, complètent la théorie des hamburgers. Ces cycles de vie décrivent les sentiments, les activités et les objectifs qui peuvent être pertinents pour chaque saison. En associant ces deux modèles, les coachs peuvent offrir un accompagnement plus complet à leurs clients. Ils peuvent aider les clients à identifier dans quelle saison émotionnelle ils se trouvent, comprendre leurs comportements associés (comme ceux décrits par les archétypes des hamburgers), et travailler avec eux pour atteindre des objectifs appropriés à leur saison actuelle.

Le coaching consiste à guider les individus vers l’équilibre entre la satisfaction immédiate et la réalisation à long terme, en utilisant la compréhension des comportements humains fournie par la théorie des hamburgers et en adaptant les objectifs en fonction des cycles de vie d’Hudson. Cela permet aux clients de progresser vers le bonheur de manière plus équilibrée et durable, en trouvant le juste milieu entre la poursuite de leurs aspirations futures et la pleine appréciation du moment présent.

Un coach fera bien entendu le lien entre la théorie des burgers de Tal Ben-Shahar et celle des cycles de vie d’Hudson dans le sens où les deux modèles se complètent. Celui de Tal Ben-Shahar donnant une manifestation concrète des comportements des clients et les saisons d’Hudson, exprimant chacune les sentiments qu’il peuvent ressentir, les activités qui peuvent les aider et les résultats que le coach peut rechercher avec ces clients.  Voici les correspondances ainsi qu’un rappel théorique des saisons d’Hudson pour mieux vous guider dans vos coachings :

[6]https://www.linkup-university.com/pluginfile.php/4843/mod_resource/content/1/Cycles_de_vie.pdf

En voici le détail :

[7] https://www.linkup-university.com/pluginfile.php/4843/mod_resource/content/1/Cycles_de_vie.pdf

[8]https://www.linkup-university.com/pluginfile.php/4843/mod_resource/content/1/Cycles_de_vie.pdf

[9]https://www.linkup-university.com/pluginfile.php/4843/mod_resource/content/1/Cycles_de_vie.pdf

[10]https://www.linkup-university.com/pluginfile.php/4843/mod_resource/content/1/Cycles_de_vie.pdf

PARTIE 3 : LA COMBINAISON DU BESOIN, DU PLAISIR ET DU SENS

3.1. Rechercher l’équilibre

Il ne suffit pas d’avoir un but dans la vie, tout comme les plaisirs ne sont pas suffisants pour être heureux. Premièrement, il est difficile de maintenir un cap à long terme sans bénéficier de gratifications affectives dans le présent. La perspective d’un avenir meilleur ne nous motive généralement que pendant un temps limité. Deuxièmement, même si nous parvenons à nous concentrer sur notre objectif en renonçant aux récompenses immédiates, cela ne garantit pas notre bonheur.

Dans son livre « Découvrir un sens à sa vie[11], Viktor Frankl relate les stratégies utilisées par les déportés des camps de concentration pour trouver une signification à leur existence malgré les atrocités qu’ils ont endurées. Certains ont pu trouver un but, une raison d’être même dans des conditions de vie extrêmement difficiles. Cela pouvait être l’espoir de retrouver leurs proches ou l’aspiration à témoigner de leurs souffrances. Cependant, il serait absurde de prétendre que ces déportés étaient heureux dans les camps. Comme nous l’avons vu, pour être heureux, il ne suffit pas seulement d’introduire du sens dans notre vie, mais il faut également vivre ce sens et éprouver des émotions positives, bénéficier à la fois d’une gratification immédiate et d’un bénéfice futur.

Selon Freud, nous sommes essentiellement motivés par le principe de plaisir, c’est-à-dire notre besoin instinctif de rechercher le plaisir. Frankl, quant à lui, affirme que notre motivation première est plutôt liée à la recherche de sens, à un désir profond de donner un sens à notre existence. Dans le contexte du bonheur, ces deux hypothèses contiennent une part de vérité. Pour mener une vie heureuse et épanouissante, il est nécessaire de satisfaire à la fois notre aspiration au plaisir et notre besoin de sens[12].

On critique souvent les sociétés occidentales, notamment les Américains, en les accusant d’être obsédées par le bonheur. Les livres de développement personnel proposant des solutions rapides et faciles pour une existence sans conflit se vendent comme des petits pains. Bien que ces critiques soient en partie justifiées, elles se trompent en identifiant le plaisir plutôt que le bonheur comme l’objet de cette obsession.

Dans une société axée sur des solutions rapides et sans douleur, on néglige souvent les avantages à long terme et le besoin de sens. Le véritable bonheur ne peut être atteint sans une certaine dose de malaise émotionnel et d’étapes difficiles, que certains ouvrages tentent parfois d’éviter. Cependant, le bonheur implique précisément la nécessité de surmonter des obstacles. Comme le souligne Viktor Frankl, l’Homme a besoin non pas de l’absence de tension, mais de l’engagement obstiné envers un objectif qu’il estime digne de lui. Ce dont il a besoin, ce n’est pas l’élimination de cette tension à tout prix, mais l’appel d’un sens potentiel qui attend d’être adopté. Il ne faut pas oublier que les périodes difficiles augmentent notre capacité à apprécier les plaisirs de la vie.

Il y a une relation synergique entre le plaisir et le sens, ainsi qu’entre les bénéfices immédiats et les bénéfices à long terme. Lorsque nous trouvons un sentiment de dessein significatif dans nos activités, cela intensifie notre capacité à apprécier les plaisirs. De même, lorsque nous prenons plaisir à une activité particulière, nous lui donnons également plus de sens. En effet, cela nous empêche de considérer les plaisirs comme acquis et nous rappelle d’être reconnaissants pour les petites joies et les grandes satisfactions. Cette gratitude envers la vie peut elle-même être une source de plaisir et de sens véritables[13].

3.2. Quantité et qualité

Nous trouvons tous du sens dans nos activités, mais cela varie d’une personne à l’autre, et nous en retirons tous un certain bien-être, bien que cela puisse varier en intensité. Il est important de comprendre que le bonheur ne réside pas dans une pratique permanente d’une activité qui nous apporte du sens et du bien-être. Il est essentiel de trouver un équilibre et de déterminer la juste quantité d’une activité donnée pour notre épanouissement. Par exemple, on peut adorer les lasagnes, mais cela ne signifie pas qu’on peut en manger toute la journée tous les jours de la semaine. De même, nos occupations préférées et les personnes qu’on aime sont importantes dans nos vies, mais cela ne signifie pas que nous serions les plus heureux en leur consacrant chaque instant de notre temps. Il est crucial d’identifier les activités qui nous conviennent et de déterminer la quantité appropriée pour une vie meilleure.

Pour maximiser le bonheur, il est essentiel d’expérimenter mais aussi de surveiller la qualité de nos expériences intérieures. Cela demande du temps et une écoute attentive de soi-même (un coach peut bien entendu aider en ce sens). Il est nécessaire de poser les bonnes questions pour faire des choix éclairés : est-ce que mes activités ont un sens pour moi ? Est-ce qu’elles me procurent du plaisir ? Est-ce qu’une petite voix intérieure me suggère d’utiliser mon temps différemment ? Et si, au fond de mon cœur, je ressens le besoin de changer de vie ? Il est important de s’écouter, de prêter attention à nos pensées, émotions et aspirations pour prendre des décisions qui nous correspondent vraiment. Ces « recommandations » sont ce que font les coachs en questionnant leurs clients. Car rappelons que le coach n’est pas un conseiller.

PARTIE 4 : LES OBJECTIFS DANS LA QUETE DU BONHEUR

À l’adolescence et en lisant Epictète, on pourrait croire qu’être heureux signifie se libérer de tous les désirs, objectifs et aspirations. Les objectifs alors fixés ne rendent pas plus heureux et peuvent conduire à une faillite émotionnelle. Cependant, il faut réaliser qu’il est essentiel de se fixer des objectifs porteurs de sens et de plaisir pour être heureux. Avant d’explorer la relation entre la fixation d’objectifs et le bonheur, examinons le lien entre la définition d’objectifs et la réussite dans la vie.

4.1. Objectifs et réussite

Se fixer des objectifs accroît les chances de réussite. En établissant des buts précis, en relevant des défis et en respectant des échéances et des critères de réussite, on obtient de meilleurs résultats[14]. L’engagement envers un objectif est comme une promesse, et la parole a le pouvoir de créer cet avenir.

La relation entre les objectifs et la réussite est soutenue par la psychologie en tant que science.  Lorsque nous nous fixons des objectifs, cela renforce en nous et chez ceux qui nous entourent la conviction que nous sommes capables de surmonter les obstacles. Imaginez votre vie comme un voyage : vous avancez avec un sac à dos lorsque soudain un mur bloque votre chemin. Face à cette situation, avez-vous tendance à faire demi-tour pour éviter le défi posé par le mur, ou adoptez-vous une attitude différente en lançant votre sac à dos par-dessus le mur et en cherchant tous les moyens de le franchir, de le contourner ou de l’escalader ?

Des exemples historiques illustrent l’importance de jeter son sac à dos par-dessus le mur. En début d’année 1879, Thomas Edison a annoncé qu’il présenterait sa première ampoule électrique le 31 décembre 1879, malgré ses nombreux échecs précédents. Il a lancé son sac à dos par-dessus le mur des défis qui se dressaient devant lui, et la lumière fut. De même, lorsque Kennedy a déclaré que les États-Unis enverraient un homme sur la Lune avant la fin de la décennie, la technologie nécessaire n’était pas encore au point, mais il a lancé son sac à dos – ainsi que celui de la NASA – par-dessus le mur.

Lorsque l’on s’engage de manière audacieuse, exaltante mais néanmoins réfléchie, cela augmente la probabilité de succès, même si cela ne garantit pas nécessairement d’atteindre la destination visée. L’alpiniste écossais William H. Murray décrit le bénéfice du « lancer de sac » par-dessus le mur, soulignant que lorsque l’on s’engage véritablement, la providence se met en marche en notre faveur, entraînant des événements favorables et des rencontres inattendues qui contribuent à la réalisation de nos projets.

Avoir un but précis et un engagement défini focalise notre attention sur la cible et nous guide vers les moyens de l’atteindre. Les psychologues soulignent que la certitude est une prophétie auto-réalisatrice et que lorsque l’on s’engage et que l’on lance son sac à dos par-dessus le mur, on démontre sa confiance en soi et sa capacité à réaliser l’avenir que l’on imagine[15]. Plutôt que de simplement réagir à la réalité, nous créons notre propre réalité.

4.2. Objectifs et bien-être

La recherche empirique met en évidence le lien entre les objectifs et le succès, mais la nature de ces objectifs n’a pas toujours un impact significatif sur la satisfaction finale. Obtenir un résultat attendu depuis longtemps peut apporter une grande satisfaction, tandis que l’échec peut conduire au désespoir, mais ces sentiments ont tendance à être de courte durée.

Une étude menée par le psychologue Philip Brickman a examiné le niveau de bonheur de personnes ayant gagné à la loterie. En moins d’un mois, les gagnants étaient revenus à leur niveau de bien-être initial. De manière surprenante, moins d’un an après un accident entraînant une paraplégie, certaines personnes étaient aussi heureuses qu’avant.

Ces résultats remettent en question l’idée que le bonheur dépend uniquement de la réalisation de nos intentions. Ils suggèrent que d’autres facteurs, tels que notre adaptation et notre capacité à trouver du sens et du bien-être dans différentes circonstances, peuvent jouer un rôle plus important dans notre satisfaction globale.

Les recherches du psychologue Daniel Gilbert montrent que nous sommes souvent peu doués pour prédire nos sentiments futurs. Nous pensons que des événements tels qu’une nouvelle maison, une promotion ou une publication nous rendront heureux, mais en réalité, ces succès ne provoquent qu’un pic temporaire de bien-être. De même, les expériences négatives telles qu’une rupture amoureuse, la perte d’un emploi ou la défaite d’un candidat politique n’affectent généralement que temporairement notre bonheur, et nous retrouvons rapidement notre état initial.

Ces constatations remettent en question nos convictions profondes sur les effets de la réalisation de nos objectifs. Cela peut avoir des conséquences à la fois négatives et positives. La bonne nouvelle est que nous pouvons craindre moins l’échec et être plus audacieux dans nos actions. La mauvaise nouvelle est que le succès lui-même semble avoir peu d’impact sur notre bonheur, ce qui peut nous amener à penser qu’il est inutile de se fixer des objectifs ou de chercher le bonheur. On pourrait comparer notre vie à celle du personnage de Bill Murray dans le film « Un jour sans fin » ou à Sisyphe, condamné à pousser éternellement son rocher.

Cependant, il existe une autre voie. Il s’agit de comprendre la corrélation entre nos objectifs, notre trajectoire et notre destination. Lorsque nous comprenons cela, nos objectifs peuvent générer un niveau supérieur de bien-être pendant le processus lui-même. Il est donc possible de trouver une voie intermédiaire entre se bercer d’illusions et affronter la réalité, où nous pouvons être plus heureux en poursuivant nos objectifs, en étant conscients des hauts et des bas de notre voyage.

4.3. Fonction des objectifs

Dans le livre « Traité du zen et de l’entretien des motocyclettes[16]« , Robert M. Pirsig raconte son expérience d’escalade d’un pic de l’Himalaya avec un groupe de moines zen. Bien qu’il soit le plus jeune, il est le seul à éprouver des difficultés et finit par abandonner, tandis que les moines atteignent facilement le sommet.

Pirsig était obsédé par son objectif d’atteindre le sommet et était anxieux à propos du chemin restant à parcourir. Il n’a pas pu apprécier pleinement l’ascension elle-même. En perdant de vue le plaisir de chaque pas accompli, il a perdu sa motivation et sa capacité physique à continuer. Les moines, quant à eux, étaient également concentrés sur le sommet, mais seulement pour s’assurer qu’ils ne s’égaraient pas, sans attribuer plus de valeur au sommet lui-même. Ils savaient qu’ils étaient dans la bonne direction, ce qui leur permettait de porter leur attention sur chaque étape du chemin et d’en tirer du plaisir, plutôt que d’être préoccupés par les épreuves à venir.

L’essence même d’un objectif est de nous libérer afin que nous puissions apprécier le moment présent. Si nous prenons la route sans une intention claire, il est peu probable que nous tirions beaucoup de plaisir du voyage. Si nous ignorons où nous allons ou où nous voulons aller, chaque intersection devient un lieu d’ambivalence et d’incertitude. En revanche, lorsque nous avons une destination en tête, lorsque nous savons plus ou moins où nous allons, nous sommes libres de concentrer notre attention sur la tâche à accomplir et de profiter pleinement de l’endroit où nous nous trouvons.

Pour Tal Ben-Shahar, l’objectif est d’atteindre des buts plus que d’en avoir simplement. Selon le psychologue David Watson, l’élément crucial pour progresser vers le bonheur et l’affectivité positive est le mécanisme utilisé pour atteindre un objectif, plutôt que la réalisation de l’objectif lui-même. Ainsi, l’objectif doit être conçu comme un moyen d’amplifier le plaisir présent plutôt que comme une fin en soi.

Un objectif est un moyen et non une fin en soi. Pour être durablement heureux, il est nécessaire de modifier nos attentes vis-à-vis de nos objectifs, en les considérant comme des moyens qui permettent de savourer le présent et d’apprécier le chemin qui y mène. Lorsque les objectifs fixés nous aident à profiter du présent à chaque étape du voyage, ils conduisent à une augmentation durable de notre bien-être, contrairement au pic temporaire de joie associé à la réalisation d’un objectif considéré comme une fin en soi. Avoir un but nous rend conscient de nous-mêmes au moment présent.

Cependant, la simple existence d’objectifs n’est pas suffisante en elle-même. Il est également essentiel que ces objectifs soient porteurs de sens et de plaisir, et que le chemin pour les atteindre soit agréable, afin d’avoir un impact significatif sur notre niveau de bonheur.

Tous les objectifs n’engendrent pas nécessairement les mêmes bénéfices en termes de bonheur , à condition qu’ils soient porteurs de sens et de plaisir. Par exemple, si la recherche de richesse et de reconnaissance sociale est significative pour vous et vous procure du plaisir, il est légitime de la considérer comme faisant partie de votre quête du bonheur. Après tout, le désir de possession matérielle et le besoin d’être apprécié font partie de la nature humaine et sont importants pour la plupart des gens.

Selon les recherches compilées par Kennon Sheldon et ses collègues, ceux qui cherchent le bien-être seraient avisés de se concentrer sur la poursuite de buts liés à l’évolution personnelle, relationnelle et participative plutôt qu’à l’argent, la beauté et le succès. Il est également recommandé de choisir des objectifs qui nous intéressent personnellement et qui nous concernent directement, plutôt que de poursuivre des objectifs auxquels nous nous sentons obligés sous pression.

Bien que la plupart d’entre nous recherchent l’estime des autres, la beauté et l’argent, et ressentent une certaine pression en ce sens, Sheldon souligne qu’il serait plus heureux de déplacer notre focalisation vers des objectifs qui sont alignés avec notre véritable moi. Les recherches dans ce domaine offrent une vision plus nuancée de la nature des activités significatives et plaisantes qui peuvent maximiser notre potentiel de bonheur.

4.4. Les objectifs autoconcordants

Selon les recherches de Kennon Sheldon et Andrew Elliot, les objectifs autoconcordants sont ceux que l’on se donne par pure conviction personnelle ou par un intérêt marqué pour un domaine spécifique. Ils sont choisis individuellement et émanent d’un désir d’expression de soi plutôt que d’impressionner les autres. Ces objectifs sont perçus comme à la fois agréables et chargés de sens.

Les études montrent une différence qualitative entre les ressources extrinsèques (comme l’argent et le statut social) et les ressources intrinsèques (comme le développement personnel et les relations). Les objectifs pécuniers sont souvent considérés comme extrinsèques et ne sont pas auto concordants. La recherche de la réussite financière comme objectif central peut avoir des conséquences négatives, entraînant un manque de réalisation personnelle, des problèmes de santé mentale et une faible énergie.

Cependant, les psychologues ne recommandent pas d’abandonner toute quête de réussite matérielle. Il est important de satisfaire nos besoins fondamentaux, mais au-delà de cela, l’argent et la réputation ne devraient pas être nos priorités. Il est possible que l’argent fonctionne comme un objectif intrinsèque s’il est perçu comme un moyen de donner du sens à sa vie, par exemple en soutenant des causes qui nous tiennent à cœur.

Trouver des objectifs autoconcordants peut être difficile, nécessitant une (auto-)analyse et la capacité de résister à la pression sociale. Il est essentiel de savoir ce que nous voulons vraiment dans la vie et d’avoir le courage de rester fidèles à nos véritables désirs.

4.5. Se fixer des objectifs autoconcordants

Les individus qui formulent et poursuivent des buts autoconcordants sont en général plus heureux et réussissent mieux dans la vie.

On peut donc proposer un autre exercice en ce sens :

Mettez par écrit ce que vous voulez vraiment faire dans chaque domaine clé de votre existence de votre vie sentimentale à votre activité professionnelle. Pour chacun, prenez en compte les éléments suivants[17]:

  • Les objectifs à long terme. Objectifs concrets à parcours bien défini s’étendant sur une période d’une à trente années. Ils doivent représenter un défi à relever, mettre vos limites à l’épreuve. N’oubliez pas qu’en ce qui concerne l’obtention du bonheur à long terme le facteur le plus important n’est pas de réaliser ou non vos objectifs, mais de vous libérer au point de vous rendre capable de profiter de l’ici et maintenant, du voyage en soi.
  • Les objectifs à court terme. Étape consistant à diviser et conquérir les buts à long terme. Que faut-il que vous fassiez cette année, ce mois-ci, aujourd’hui, pour atteindre vos buts à long terme ?
  • Le plan d’action. Que devez-vous faire ce mois-ci, cette semaine, aujourd’hui même, pour chercher à atteindre vos buts, à court comme à long terme ? Inscrivez dans votre agenda les initiatives concrètes que vous devrez mener à bien, soit de façon régulière, hebdomadaire ou quotidienne (on en revient aux rituels), soit en une seule fois. Pour ma part, en ce moment précis, ce que je fais participe de mon plan d’action: c’est un rituel quotidien au cours duquel je me réserve 1 heure pour me former et travailler sur un projet de recherche.

Si on ne se définit pas d’objectifs précis, on est à la merci de forces extérieures – ce qui conduit rarement à des activités autoconcordantes. On est donc face à un choix : réagir passivement aux exigences extrinsèques, ou contribuer de manière active à la création de sa propre vie.

4.6. L’état de flow

Les travaux de Mihaly Csikszentmihalyi sur l’état de flow offrent des avancées et des recommandations importantes pour créer un milieu qui favorise des bénéfices immédiats et futurs, tout en générant du sens et du plaisir dans l’apprentissage.

Selon Csikszentmihalyi, l’état de flow est une expérience où l’on est complètement absorbé dans une activité, se sentant en harmonie avec elle, et où l’action et la conscience se fusionnent[18]. C’est lorsque nous sommes tellement engagés dans une tâche que nous perdons la notion du temps et sommes totalement concentrés sur ce que nous faisons. Cela peut se produire lorsque nous lisons un livre, écrivons un texte, cuisinons, discutons avec un ami, ou pratiquons une activité physique.

Dans cet état de flow, nous ressentons à la fois du plaisir et atteignons une performance optimale. Nous donnons le meilleur de nous-mêmes tout en appréciant l’expérience. Csikszentmihalyi souligne que pour atteindre cet état, il est essentiel d’avoir des objectifs clairs et une raison d’être bien définie. L’activité choisie doit être sans ambiguïté, afin de nous permettre de nous engager pleinement sans être distraits par d’autres possibilités.

Les bénéfices immédiats et futurs se confondent dans cet état de flow. Avoir un objectif à long terme ne compromet pas la capacité à vivre pleinement le moment présent, mais au contraire, cela y contribue. Les recherches de Csikszentmihalyi révèlent que le concept de « no pain, no gain » est en réalité un mythe. La souffrance n’est pas nécessaire pour atteindre la performance optimale. Il existe une zone spécifique où l’effort est suffisant pour représenter un défi personnel, sans être trop difficile ni trop facile, et c’est dans cette zone que nous sommes au sommet de nos capacités et prenons plaisir à ce que nous faisons.

Le graphique ci-dessous montre que si le degré de difficulté de la tâche est élevé et le niveau d’aptitude bas, on ressent de l’angoisse ; si au contraire le niveau d’aptitude est élevé et le degré de difficulté de la tâche bas, on s’ennuie.

L’état de flow survient quand la difficulté de la tâche et le niveau d’aptitude coïncident.

De nombreux élèves ne parviennent pas à profiter de leur expérience scolaire et à donner le meilleur d’eux-mêmes, car ils s’ennuient ou se sentent anxieux à l’école. Pour remédier à cette situation et permettre aux élèves de bénéficier immédiatement et à long terme de leur éducation, il est essentiel de personnaliser l’enseignement en fonction des aptitudes de chacun. Les enseignants pourraient structurer les cours et les activités de manière à atteindre cet objectif.

Pour illustrer nos propos, nous prendrons 2 exemples certes extrêmes mais utiles pour la compréhension du concept : Il existe deux approches distinctes pour empêcher les élèves de vivre l’état de flow. La première consiste à créer un environnement stressant, générant de l’anxiété. Les élèves sont constamment poussés au-delà de leurs limites, ce qui transforme leur travail scolaire en souffrance, en anxiété et en malheur. Ils sont incités à se concentrer sur les résultats plutôt que sur le processus, ce qui les transforme en personnes déterminées mais incapables de vivre l’état de flow, que ce soit à l’école, au travail ou pendant leurs loisirs.

Dans le deuxième cas, les élèves se trouvent en dessous de leurs capacités et s’ennuient. Lorsqu’ils ne font pas suffisamment d’efforts, ils se handicapent autant que s’ils se surmenaient. Ces élèves sont incapables de vivre l’état de flow, mais pour des raisons opposées à celles des précédents. Les éducateurs, en particulier les parents, confondent souvent effort et souffrance. Dans leur désir de protéger les enfants de la souffrance, ils cèdent à tous leurs caprices et évitent les défis à relever. En cherchant à offrir une existence « privilégiée », ils empêchent les enfants de lutter pour ce qu’ils veulent réellement, les privant ainsi de l’expérience de l’état de flow et de la satisfaction qui en découle lorsque l’on surmonte des difficultés.

Il est fréquent de voir, dans nos sociétés développées, des enfants (et des adultes) issus de milieux privilégiés mais qui ne sont pas heureux. Certains appellent cela la « pléthorite aiguë », mais pour certains chercheurs, ces privilégiés sont plutôt défavorisés. Cette contradiction entre pauvreté et richesse s’explique parfaitement si l’on considère la notion de « bonheur « .

Aussi, pour que les élèves puissent bénéficier pleinement de leur expérience scolaire, il est essentiel de trouver un équilibre entre le stress excessif et l’ennui. Il faut créer un environnement d’apprentissage adapté à chaque individu, où les défis sont présents mais réalisables, permettant ainsi aux élèves de vivre l’état de flow et de trouver satisfaction et épanouissement dans leur parcours éducatif.

Samuel Smiles, considéré comme l’un des pères de l’école contemporaine de l’épanouissement personnel ou de la pensée positive, affirmait en 1858 que le bonheur et la réussite dans la vie dépendaient principalement des efforts personnels des individus, et non de l’assistance ou de la bienveillance des autres. Lorsque les parents aident leurs enfants à éviter les tâches difficiles, ils risquent à long terme de compromettre leur bonheur. Smiles considérait que rien n’était pire que de voir tous ses désirs satisfaits sans effort, car cela laissait peu de place à l’espoir, aux aspirations et au combat.

Tant pour les enfants que pour les adultes, relever des défis donne un sens et ils trouvent du plaisir dans le processus d’accomplissement de leurs efforts. L’existence de personnes défavorisées au sein de l’opulence explique en partie l’augmentation des cas de dépression dans nos sociétés relativement riches, affectant même de plus en plus les jeunes. Un équilibre en termes de combats, d’épreuves et d’obstacles sont des éléments nécessaires pour une vie émotionnellement riche, et il n’existe pas de raccourci vers le bonheur. Cependant, lorsque les personnes, surtout nos enfants, se débattent, notre réaction naturelle est de chercher à leur faciliter les choses. Parfois, il vaut mieux refréner nos impulsions et leur donner le privilège de connaître une raisonnable adversité.

PARTIE 5 : LE BONHEUR ET LE TRAVAIL

5.1. Esclaves des passions

Le mythe biblique d’Adam et Ève a longtemps perpétué l’idée que le travail est une punition, liant l’humanité à la nécessité de gagner sa subsistance avec effort. Cependant, une exploration approfondie révèle que le travail est une pierre angulaire du bonheur, contrairement aux préjugés répandus.

Dans leur article, « Optimal Experience in Work and Leisure » Mihaly Csikszentmihalyi et Judith LeFevre soulignent le paradoxe selon lequel les individus vivent davantage d’états de flow au travail qu’au cours de leurs loisirs. Cela remet en question le préjugé négatif associé au travail, suggérant que notre perception du travail est déformée par des préconceptions profondément enracinées.

En hébreu, les mots pour « travail » (avoda) et « esclave » (eved) semblent avoir la même racine ce qui souligne la réalité inévitable de travailler pour gagner sa vie. Cependant, même lorsque nécessaire, choisir de percevoir le travail comme une source de bonheur plutôt qu’une contrainte est crucial.

Un employeur avisé peut créer les conditions du bonheur sur le lieu de travail. Les recherches du psychologue Richard Hackman montrent, par exemple, que certaines conditions donnent plus de sens au travail d’un employé. Tout d’abord, lorsque le travail fait appel à ses talents et compétences variés. Ensuite, lorsque l’employé est responsable de la tâche de bout en bout, au lieu d’être simplement un rouage dans la machine. Enfin, lorsque l’employé perçoit que son travail a un impact significatif sur autrui. Un Manager qui organise le travail en tenant compte de ces conditions a plus de chances d’accroître le bonheur de ses employés en termes de satisfaction et d’épanouissement.

Les travaux de Csikszentmihalyi soulignent également l’importance d’attribuer des tâches ni trop difficiles ni trop faciles pour susciter un engagement élevé. Un manager attentif à ces aspects aura donc plus de chances d’accroître le bonheur et la satisfaction de ses équipes.

Il incombe également aux individus de rechercher et créer du sens et du plaisir au travail. Blâmer les autres ne rapproche pas du bonheur, il est alors essentiel de trouver un emploi qui convienne ou de créer les conditions propices à l’épanouissement. Restructurer ses tâches, se fixer des objectifs clairs, relever des défis et assumer plus de responsabilités peuvent contribuer à accroître le bonheur au travail. Si malgré les efforts, le bonheur n’est pas atteint, il faudra peut-être envisager d’autres activités pour dégager un revenu.

Entreprendre des changements dans notre travail ou prospecter pour d’autres opportunités peut sembler effrayant, mais le changement est nécessaire si nous sommes piégés dans un emploi qui ne satisfait que nos besoins matériels. Si nous nous trouvions dans une situation où notre travail ne nous permettait même pas de subvenir à nos besoins matériels, nous ferions tout notre possible pour y remédier. Alors pourquoi baisser nos exigences lorsqu’il s’agit de notre bonheur ? Pour apporter des changements dans notre vie, il faut du courage. Et le courage ne signifie pas l’absence de peur, mais la capacité à agir malgré la peur. Le bonheur financier et le bonheur ne sont pas mutuellement exclusifs et sont tous deux essentiels à notre survie. De plus, s’investir dans des activités qui nous apportent du sens et du plaisir peut conduire à une réussite supérieure à long terme, car nous sommes naturellement plus engagés et motivés lorsque nous sommes passionnés. Sans passion, la motivation diminue, mais avec la passion, les compétences se développent au fil du temps.

5.2. Le S.P.A. – Sens, Plaisir et Atout

Pour trouver un emploi qui nous convient, en accord avec nos passions et nos compétences, il est essentiel de se poser trois questions clés : « Qu’est-ce qui a du sens pour moi ? », « Qu’est-ce qui me procure du plaisir ? », et « Quels sont mes atouts ? ». En analysant les tendances qui émergent de ces réponses, nous pouvons définir le type de travail qui nous rendra le plus heureux[19].

Il est important de ne pas se contenter de réponses superficielles ou préconçues lorsque nous essayons de déterminer ce qui a du sens pour nous. La plupart d’entre nous ont déjà des réponses en tête, mais elles ne reflètent souvent qu’une partie de nos expériences où nous avons réellement ressenti du sens. Il faudra prendre le temps de réfléchir et de plonger profondément dans les moments où nous avons véritablement pris conscience de notre raison d’être dans le monde.

Imaginons que je trouve du sens dans la résolution des problèmes, l’écriture, le travail avec les enfants, le militantisme politique et la musique. J’aime faire de la voile, cuisiner, lire, écouter de la musique et être en compagnie des enfants. Mes atouts sont le sens de l’humour, l’enthousiasme, un bon contact avec les enfants et une certaine facilité à résoudre les problèmes.

Si j’observe le deuxième diagramme, je remarque que travailler avec des enfants me donnerait du sens et du plaisir, et que j’ai des dispositions pour cela. Pour définir les professions bien précises qui me correspondraient le mieux, il faut à présent que je prenne en compte d’autres facettes de ma personnalité et de ma vie. Par exemple, je suis quelqu’un de très organisé qui aime planifier sa semaine à l’avance et préfère donc les emplois du temps quotidiens du genre structuré. Comme j’aime aussi voyager, il serait également important pour moi que mon métier me ménage de longues périodes de congé.

Pour résumer, en utilisant le processus SPA (Sens, Plaisir, Atouts), pour les coachs aguerris, l’outil peut aider ceux qui envisagent des carrières qui correspondent à leurs centres d’intérêt, compétences et valeurs. Le processus SPA peut également aider à prendre des décisions dans d’autres domaines, tels que le choix des cours à l’université en fonction de leur pertinence, du plaisir qu’ils procurent et de nos compétences. De plus, les responsables d’entreprises peuvent utiliser le processus SPA pour promouvoir l’engagement et les performances de leurs employés, ainsi que pour faciliter le recrutement en alignant les besoins de l’entreprise avec les compétences et les aspirations des candidats.

5.3. Façonner sa vocation

En résumé, même si nous sommes confrontés à des contraintes externes ou à des postes qui ne semblent pas réunir les critères du processus SPA, nous avons la capacité de façonner notre travail pour maximiser notre rendement en bonheur. Des études ont montré que même dans des emplois considérés comme routiniers ou dépourvus de sens, les employés peuvent exercer une influence sur la nature de leur travail. Par exemple, dans le domaine du nettoyage hospitalier, certains employés ont façonné leur travail en y apportant de la créativité, en établissant des relations avec le personnel et les patients, et en contribuant activement au bien-être de l’établissement. Il en va de même pour d’autres professions telles que les coiffeurs, les hôtes d’accueil, les infirmiers et les employés de cuisine, qui ont réussi à créer des liens avec les clients et à percevoir leur travail comme une vocation en apportant une valeur ajoutée à leur entreprise.

5.4. Se concentrer sur le bonheur

Il est courant de passer à côté des sources de plaisir et de sens qui nous entourent dans notre vie professionnelle. La clé du bonheur réside dans notre choix de perception, et non seulement dans ce que nous faisons ou qui nous sommes. Changer notre façon de percevoir les choses peut considérablement améliorer notre situation et mener à un bonheur durable. Cependant, il est important de reconnaître que tout le monde ne peut pas trouver le bonheur dans n’importe quelles conditions, et certaines circonstances peuvent compliquer la quête du bonheur. Toutefois, pour la plupart d’entre nous, il est possible de trouver un travail ou une carrière qui nous satisfait dans l’ensemble, et il est important d’écouter notre voix intérieure et d’être guidé par notre vocation.

  • Le procédé des trois questions

Prenez le temps d’appliquer le procédé SPA décrit en détail plus haut. Demander à vos clients de mettre par écrit les réponses aux questions suivantes puis isolez les recoupements.

  • Question n°1: A quoi ai-je l’impression de trouver du sens ? En d’autres termes, qu’est-ce qui me donne une raison de continuer ?
  • Question n°2 : A quoi ai-je l’impression de prendre plaisir ? En d’autres termes, qu’est-ce que j’aime faire ?
  • Question n°3 : Quels sont mes atouts ? En d’autres termes, y a-t-il des choses que je sache bien faire ?

Ce processus vous aidera à découvrir votre voie au niveau « macro» (votre vocation dans la vie) mais aussi « micro » (ce que vous souhaitez pour vos activités quotidiennes). Si les deux sont liées, instaurer le macro-changement (quitter son travail ou la sécurité d’une voie familière) implique de surmonter plus de difficultés (et donc de faire preuve de plus de courage). Les micro-changements (par exemple, réserver deux heures par semaine à son passe-temps favori) sont plus faciles à aménager, tout en produisant d’importants dividendes en bonheur .

5.5. Façonner son travail

Il est possible d’améliorer sa qualité de vie professionnelle en introduisant de nouvelles activités qui répondent à nos exigences de sens et de plaisir, sans nécessairement changer de carrière. Souvent, en raison de préjugés ou d’une vision restreinte des métiers, nous passons à côté du bonheur potentiel qui se trouve tout autour de nous. Un exercice consiste à décrire en détail nos activités quotidiennes et à se poser deux questions : comment modifier les tâches routinières pour y intégrer des activités plus significatives et plaisantes, et quel sens et quel plaisir potentiels existent déjà dans notre profession. En mettant en lumière ces aspects et en réécrivant le profil de notre poste en mettant en avant les éléments significatifs et plaisants, nous pouvons radicalement changer notre perception de notre travail. Notre perception et la description que nous faisons de notre travail peuvent influencer notre manière de le vivre. De même, il est possible d’appliquer ce raisonnement à d’autres domaines de notre vie, comme les relations amoureuses et amicales, en mettant en évidence les aspects positifs pour trouver le bonheur.

PARTIE 6 : ET APRES LE TRAVAIL ?

6.1. Équilibrer l’altruisme et le bonheur personnel

L’idée selon laquelle nos actions sont motivées par notre intérêt personnel et notre propre bonheur peut déranger. Ce malaise est lié à une croyance du devoir, explicite ou implicite. Déjà au XVIIe siècle, Kant enseignait que pour avoir une valeur morale, une action doit être entreprise par sens du devoir. Ainsi, agir par intérêt exclurait toute moralité de l’action. Pour Kant, si nous aidons les autres parce que nous en ressentons le besoin et que cela nous rend heureux, notre action est dépourvue de valeur morale.

La plupart des philosophies et des religions qui prônent l’abnégation comme fondement de la morale, à l’image de Kant, partent du principe qu’en agissant dans notre intérêt personnel, nous nuisons inévitablement à autrui et négligeons leurs besoins.

Cependant, cette vision du monde omet que nous n’avons pas à choisir entre aider les autres et nous aider nous-mêmes. Ces deux aspects ne sont pas mutuellement exclusifs. En réalité, comme le souligne l’essayiste Ralph Waldo Emerson, l’une des plus belles compensations de la vie est que l’on ne peut sincèrement aider quelqu’un d’autre sans s’aider soi-même. S’aider et aider les autres sont deux démarches intrinsèquement liées : plus nous aidons les autres, plus nous sommes heureux, et plus nous sommes heureux, plus nous sommes enclins à aider les autres.

Les travaux de Barbara Fredrickson, neuropsychologue, suggèrent que les émotions positives élargissent notre capacité d’attention. Ainsi, lorsque nous sommes heureux, nous sommes plus enclins à voir au-delà de notre propre point de vue limité, égocentrique, et à nous concentrer sur les besoins et les désirs des autres. Les études menées par les psychologues Alice Isen et Jennifer George montrent que nous sommes en meilleure position pour aider les gens lorsque nous nous sentons bien dans notre vie.

Dans le monde réel, la plupart des gens ne peuvent pas se consacrer constamment à des activités signifiantes et plaisantes. Par exemple, une mère célibataire ne peut pas toujours se permettre de quitter un emploi bien rémunéré mais déplaisant pour un autre moins lucratif mais plus agréable.

D’autres personnes, ayant plus de liberté qu’un parent seul, renonceront au plaisir à court terme pour de bonnes raisons, dans l’espoir d’obtenir un bénéfice futur plus important. Par exemple, une étudiante fraîchement diplômée souhaitera acquérir de l’expérience dans un cabinet d’audit pendant deux ans, même si elle n’apprécie guère passer de longues heures devant un ordinateur. Tant qu’elle garde à l’esprit que le bonheur est sa principale priorité et évite de tomber dans le piège de toujours retarder sa gratification, ces deux années peuvent être exactement ce dont elle a besoin.

Les travaux des psychologues Kennon Sheldon et Linda Houser-Marko démontrent que la poursuite d’objectifs en accord avec nos valeurs personnelles a des répercussions dans d’autres domaines de notre vie. Les personnes capables de définir des ensembles d’objectifs qui reflètent leurs intérêts et valeurs propres fonctionnent de manière plus efficace, souple et intégrée dans différents aspects de leur vie.

Les activités signifiantes et plaisantes agissent comme une bougie dans l’obscurité. Tout comme une ou deux petites flammes peuvent éclairer un espace, un ou deux événements positifs survenant pendant une période morne peuvent transformer notre état général. Tal Ben-Shahar définit ces événements comme des « accélérateurs de bonheur », des moments brefs mais transformateurs. Qu’ils durent quelques minutes ou quelques heures, ils nous apportent sens, plaisir, bénéfice immédiat et bénéfice futur.

Les accélérateurs de bonheur nous inspirent et nous revigorent. Ils agissent comme des impulsions et nous motivent. Par exemple, une mère célibataire qui vit un accélérateur de bonheur lors d’une promenade significative avec ses enfants ressentira que sa vision du monde est transformée, y compris sur ses heures passées au travail. Cette excursion la motivera pour plusieurs jours, lui donnera un objectif à court terme, une raison de se lever le matin, lui procurera de l’énergie et reconstituera ses réserves de motivation pour la semaine suivante. De même, une jeune femme qui poursuit une expérience de deux ans dans un cabinet d’audit se sentira soutenue et pourra même trouver du plaisir si elle consacre deux heures chaque semaine à aider une association locale à gérer ses comptes et à passer une soirée avec des amis.

J’ai récemment rencontré un cadre dirigeant, il avait quitté l’Asie après 20 ans d’expatriation. Âgé d’une cinquantaine d’années, il n’éprouve plus beaucoup de satisfaction dans son travail, mais il ne souhaite pas abandonner son niveau de vie auquel sa famille est habituée (villa de 400 m², chauffeur, …). Cependant, il a réussi à réduire sa charge de travail pour intégrer des accélérateurs de bonheur dans sa vie. Chaque semaine, il passe deux soirées en famille, joue au tennis ou fréquente la salle de sport, et lit des livres pour le plaisir. Il ne manquerait pas un rendez-vous avec sa famille ou même avec lui-même, tout comme il ne manquerait pas un rendez-vous avec un client. Bien qu’il préférerait idéalement consacrer ses journées à une passion, il n’a jamais été aussi heureux depuis longtemps.

6.2. Instaurer le changement

Les accélérateurs de bonheur peuvent être utiles dans le processus difficile du changement. Souvent, les habitudes persistent même lorsque nous reconnaissons le besoin de modifier notre trajectoire. Comme le disait le poète anglais John Dryden au XVIIe siècle, « nous façonnons d’abord nos habitudes, puis ce sont nos habitudes qui nous façonnent ». Si nous avons pris l’habitude de vivre rapidement et impulsivement, conditionnés dès notre plus jeune âge, il peut être très difficile de d’adopter de nouveaux comportements. De même, les habitudes des personnes qui vivent dans l’excès, parfois destructeurs, créent une dépendance qui rend difficile d’y renoncer.

Le moyen le plus simple et pratique d’introduire des changements dans notre qualité de vie est donc de commencer progressivement en intégrant des accélérateurs de bonheur. Vivre des moments éphémères chargés de sens et de plaisir est moins angoissant que remettre en question toute une existence. Cette approche suscitera moins de résistance en nous, qui nous efforçons de changer, mais aussi chez notre famille, nos collègues de travail et nos amis.

Avant de changer radicalement de carrière, par exemple en passant d’une banque à l’enseignement, il serait judicieux de dispenser seulement quelques heures de cours dans un semestre. Cela permettrait de s’assurer que devenir enseignant apporte un bénéfice immédiat et à long terme. De même, une personne qui n’est pas heureuse dans le domaine de l’éducation et qui souhaite entamer une carrière dans la finance pourrait consacrer un peu de son temps libre à se familiariser avec le monde de la bourse, ou à la gestion des fonds d’investissement. Cela permettrait de vérifier, autant que possible, si le changement envisagé la rendra réellement plus heureuse. En permettant des tâtonnements et en prenant un risque minimal, les accélérateurs de bonheur nous aident à mieux évaluer ce que nous voulons réellement faire dans la vie.

6.3. La valeur du temps libre

Chacun de nous rêve que ses journées soient emplies d’événements heureux, mais ce genre de vie n’est pas toujours à notre portée et on doit plus souvent attendre le soir ou le week-end pour se livrer à des activités procurant un bénéfice immédiat ou différé. L’erreur la plus commune consiste à devenir hédoniste pendant son temps libre au lieu de rechercher activement le bonheur. Après une dure journée de travail en entreprise ou à l’école, on décide de ne rien faire, de végéter devant un écran au lieu de s’impliquer dans des occupations plaisantes et signifiantes, sur quoi on s’empresse de s’endormir, ce qui nous renforce dans la certitude qu’après s’être acquitté de ses corvées quotidiennes on est trop fatigué pour réaliser le moindre effort.

Si, au lieu de ne rien faire en rentrant chez soi, on s’adonnait à son passe-temps favori ou à toute autre occupation qui demande un effort, nous procure du plaisir et nous tient à cœur, on aurait plus de chances de trouver un second souffle et de réapprovisionner son stock d’affects. Comme disait Maria Montessori, il est reposant de se consacrer à une tâche agréable. Les accélérateurs de bonheur, loin de nous ramollir, nous font gagner plusieurs niveaux d’énergie.

6.4. Accélérer son bonheur

Les célèbres études menées sur des jumeaux séparés à la naissance dans le Minnesota (États-Unis) ont révélé des traits de personnalité similaires chez chacun d’entre eux. Ces résultats, combinés à d’autres études suggérant l’existence d’un niveau de base pour le bien-être, ont conduit certains psychologues à avancer que notre quota de bonheur est déterminé génétiquement ou par des empreintes précoces, et qu’en tant qu’adultes, nous ne pouvons plus intervenir dessus. Certains psychologues, comme David Lykken et Auke Tellegen, en concluent qu’il est peut-être tout aussi futile, voire contre-productif, de chercher à être plus heureux que de vouloir être plus grand en taille.

Les affirmations selon lesquelles notre niveau de bonheur de base serait prédéterminé sont trompeuses. En réalité, notre niveau de bonheur peut varier et il est tout à fait possible de devenir plus heureux. Par exemple, un psychothérapeute compétent peut guider ses patients vers un supplément de bonheur. Parfois, une simple rencontre avec un ami, un livre, une œuvre d’art ou un concept peut changer toute notre vie et ce dans le bon sens !

Il est indéniable qu’il existe des facteurs génétiques (certains d’entre nous sont naturellement plus heureux que d’autres), mais nos gènes déterminent une gamme de potentialités plutôt qu’un point de référence fixe. Dans l’histoire de Blanche-Neige, Grincheux ne sera peut-être pas en mesure de développer une vision de la vie similaire à celle de Joyeux, et une personne qui s’est plainte toute sa vie ne deviendra pas soudainement un modèle de courage et de dévouement. Cependant, nous avons tous la possibilité d’accroître notre potentiel de bonheur, même si malheureusement, la plupart d’entre nous n’en profitent pas pleinement.

Dans une revue des travaux sur le bonheur, Sonja Lyubomirsky, Kennon Sheldon et David Schkade soulignent que le niveau de bonheur d’un individu est principalement déterminé par trois facteurs : une prédisposition génétique au bonheur, des facteurs circonstanciels liés à la capacité à être heureux, et des activités et pratiques liées au bonheur. Nous ne pouvons pas agir sur nos prédispositions génétiques, et rarement sur les circonstances de notre vie quotidienne, mais nous avons davantage de contrôle sur le type d’activités et de pratiques que nous choisissons. Selon Sonja Lyubomirsky, c’est cette troisième catégorie qui offre les meilleures opportunités d’augmenter durablement notre bonheur. En nous engageant dans des activités significatives et plaisantes, nous pouvons élever notre niveau personnel de bien-être de manière significative.

6.5. La permission

L’aptitude à rechercher le bonheur est un don, un droit inaliénable que personne ni aucun gouvernement ne peut nous enlever. Les États éclairés ont créé des outils politiques tels que les Constitutions, les tribunaux et les armées pour protéger notre droit à rechercher librement le bonheur. Cependant, rien en dehors de nous-mêmes ne peut nous protéger contre l’un des obstacles majeurs que nous rencontrons dans notre quête du bonheur  : notre propre sentiment de ne pas être dignes de ce bonheur.

Comprendre la théorie du bonheur présentée ici, qui consiste à donner du sens et du plaisir à sa vie, ne suffit pas pour l’atteindre de manière durable. Si au fond de nous, nous ne nous sentons pas dignes d’être heureux, nous trouverons toujours un moyen de limiter notre capacité à l’être. Par exemple, nous sous-estimerons nos sources potentielles de bonheur ou nous les ignorerons complètement. Nous concentrerons notre énergie sur des activités qui nous rendent malheureux, ou nous nous attarderons sur les aspects négatifs de notre vie.

Un certain nombre de facteurs internes et externes, tels que les préjugés culturels et processus psychologiques, s’allient pour nous empêcher d’accéder au bonheur. Au niveau le plus fondamental, l’idée même que nous avons le droit d’être heureux, que la poursuite du bonheur individuel est noble et saine en soi, est censurée et stigmatisée par de nombreux dogmes. Les héritages culturels transmis supposent que nous sommes intrinsèquement mauvais, agressifs et motivés par une pulsion de destruction. Selon cette vision, sans la civilisation pour nous racheter, notre vie serait « solitaire, indigente, dangereuse, abêtie et courte », comme le dit le philosophe Thomas Hobbes dans son ouvrage « Léviathan« . Dans une telle perspective, comment pourrions-nous être jugés dignes d’être heureux ?

Mais les idées préconçues qui nous entravent ne sont pas seulement celles que nous avons intériorisées. Souvent, nous créons nous-mêmes nos propres limitations. Si nous pensons sincèrement ne pas les mériter, si nous les considérons hors de notre portée, alors nous craignons légitimement de les perdre. Cette peur entraîne des comportements qui, en eux-mêmes, réalisent une prophétie auto-proclamée : le sentiment de ne pas mériter le bonheur conduit au malheur.

PARTIE 7 : LES CROYANCES

7.1. Les croyances limitantes

Pour vivre heureux, il est essentiel de se sentir mériter le bonheur. Nathaniel Branden affirme que pour atteindre le bonheur, nous devons nous considérer dignes d’en jouir. Nous devons apprécier notre véritable essence, indépendamment de nos réalisations concrètes, et croire que nous méritons d’être heureux, car l’inverse serait une croyance limitante.

Si nous n’acceptons pas notre valeur inhérente, nous fermons les yeux sur nos talents, notre potentiel, notre joie et nos accomplissements. Par exemple, en utilisant le « Oui mais » : « Oui, il y a du sens et du plaisir dans ma vie, mais cela pourrait ne pas durer ou n’est pas accessible ». Le refus de jouir ou de profiter des bonnes choses qui nous arrivent conduit directement au malheur, et puisque nous sommes toujours malheureux malgré les sources potentielles de bonheur, cela nous mène aussi au défaitisme.

En ce sens, l’exploration des croyances, limites et parasitages dans un processus de coaching est salutaire, d’aucun demandent directement à leurs clients quels sont ces facteurs internes et externes, qui les empêchent d’être heureux.

Les croyances limitantes sont donc des idées ou convictions profondément enracinées dans notre esprit, qui nous empêchent d’atteindre notre plein potentiel. Les décoder n’est pas facile, car certaines d’entre elles peuvent être inconscientes ou partiellement conscientes. Nous exprimons nos croyances tout au long de la journée à travers notre langage, en utilisant des phrases telles que « Je pense… », « Je suis persuadé que… », « Il est évident que… ».

Pour comprendre les croyances des autres et les accompagner, il est essentiel d’être attentif à leur langage et de partir d’un cas concret ou d’un comportement lié à une croyance limitante. Le questionnement est un outil clé pour atteindre l’expression même de la croyance et identifier les points de résistance.

Lorsqu’on parvient à exprimer une croyance limitante, des blocages et des évitements peuvent se manifester. Ce moment est crucial et délicat pour le client du coach, car il peut ressentir un sentiment d’incapacité, d’impuissance ou de manque de valeur.

Des phrases comme « Logiquement, je sais que ce n’est pas vrai, mais… », « Cela n’a pas de sens, et pourtant… », « Cela peut paraître idiot, mais… » peuvent indiquer que l’on a identifié une croyance limitante.

Les croyances limitantes peuvent être de différents types, telles que le sentiment de ne pas mériter quelque chose, l’impression de ne pas être capable de réussir, ou encore l’idée que l’on n’a pas droit à quelque chose.

Nos croyances influencent nos comportements, et vice versa, dans un processus circulaire de renforcement. Il est important de comprendre que notre carte du monde (nos croyances) n’est pas la réalité (le territoire), mais plutôt une représentation subjective de celle-ci. Chaque individu a sa propre vision du monde, basée sur ses croyances.

La reconnaissance, puis la satisfaction de nos besoins s’apparentent au respect de soi, et alimentent notre capacité à développer des croyances aidantes et à nourrir nos valeurs. Nos besoins sont une source d’énergie constructive. Ils nous permettent de nourrir nos valeurs et s’appuient sur des croyances aidantes.

Les systèmes de compensation sont un moyen usant d’obtenir de l’énergie. En ne respectant pas nos besoins, nous nous contraignons à développer tout un système de compensations, sans cesse en demande, dont le coût est conséquent. Les systèmes de compensation sont de l’ordre du stratagème : il s’agit de remplacer une chose par une autre, et n’obtenant pas au bout du compte la stabilité dont nous avons besoin, nous récompensons, parfois de façon paradoxale. Tant que je n’ai pas satisfait un besoin, il exerce une contrainte forte.

7.2. Les croyances aidantes

Dans le contexte du coaching, il est essentiel de mettre l’accent sur les croyances aidantes car elles constituent le cadre fondamental de la perception et du développement du client. Il est possible de transcender des croyances limitantes en faveur de croyances qui soutiennent, valorisent et reconnaissent la valeur intrinsèque de chacun.

L’examen des croyances donne l’opportunité de redéfinir la perspective et d’élargir le cadre des pensées. En les identifiant et en les nourrissant, nous renforçons la motivation de nos clients. De plus, en explorant les croyances à partir des valeurs, nous pouvons mieux comprendre comment les croyances soutiennent ou entravent nos valeurs.

L’approche centrée sur les croyances aidantes peut aider un client à changer sa perspective, à trouver un meilleur équilibre et à progresser vers une vie professionnelle et personnelle plus épanouissante.

La reconnaissance et la satisfaction de nos besoins renforcent notre capacité à développer des croyances aidantes tout en nourrissant nos valeurs. Nos besoins agissent comme une source d’énergie constructive qui, lorsqu’ils sont satisfaits, nous permettent de cultiver nos valeurs et de soutenir des croyances positives. En revanche, les mécanismes de compensation, qui surviennent lorsque nous négligeons nos besoins, peuvent nous piéger dans un cycle coûteux et contre-productif.

Il est essentiel que les coaches eux-mêmes reconnaissent et respectent leurs besoins. En passant d’un système de compensation à un système d’équilibre en identifiant et en nourrissant leurs besoins. Cette démarche n’est pas seulement cruciale pour leur équilibre personnel, mais aussi pour la qualité de leur travail de coaching. En respectant leurs besoins, les coaches peuvent maintenir leur énergie, nourrir leurs valeurs et développer des croyances aidantes, ce qui contribue à leur propre sécurité ontologique lorsqu’ils travaillent avec leurs clients. En outre, cela favorise le rapport collaboratif avec le client, exempt de compensation.

7.3. L’effet Pygmalion

Egalement connu sous le nom d’effet Rosenthal, est un phénomène psychologique où les attentes d’une personne envers une autre influencent le comportement et la performance de cette dernière. En d’autres termes, lorsque quelqu’un a des attentes positives à l’égard d’une personne, celle-ci a tendance à se comporter de manière à répondre à ces attentes et à obtenir de meilleurs résultats. À l’inverse, des attentes négatives peuvent entraîner une performance inférieure. Cet effet met en lumière le rôle puissant de la perception et des croyances dans la réalisation des individus, que ce soit dans un contexte éducatif, professionnel ou social.

L’effet Pygmalion trouve également sa pertinence dans le contexte du coaching. Lorsqu’un coach adopte une attitude positive envers son client, cela peut avoir un impact significatif sur les résultats du coaching. Les croyances du coach concernant les capacités et le potentiel du client peuvent influencer la manière dont il guide et soutient le client dans son développement personnel.

Supposons qu’un coach, basé sur les principes de l’effet Pygmalion, ait des attentes positives envers son client, croyant fermement en son potentiel de croissance et de changement. Cette attitude positive peut se traduire par un coaching plus motivant et encourageant, des retours positifs sur les progrès réalisés et une confiance accrue accordée au client.

À l’inverse, si un coach a des attentes négatives ou limitantes à l’égard de son client, cela pourrait se traduire par un coaching moins efficace. Le client pourrait ressentir un manque de confiance de la part du coach, ce qui peut entraver sa motivation et sa capacité à explorer de nouvelles perspectives et à apporter des changements significatifs et c’est en cela qu’un coach doit reconnaître ses limites.

En intégrant l’effet Pygmalion dans le coaching, les coaches peuvent être plus conscients de l’importance de leurs propres croyances et attentes vis-à-vis des clients. Ils peuvent travailler activement pour cultiver des attentes positives, favoriser la confiance et encourager la croissance chez leurs clients, ce qui peut contribuer à des résultats de coaching plus efficace. L’effet Pygmalion en coaching souligne ainsi l’influence profonde que le coach peut avoir sur le développement et la réussite de son client en fonction de ses propres croyances et attentes.

CONCLUSION :

Dans cet article, nous avons entrepris d’explorer les multiples dimensions de la quête du bonheur et la complexité de l’épanouissement personnel comme professionnel. En plongeant au cœur des principes fondamentaux de la psychologie positive nous arrivons à entrevoir la voie vers un bonheur authentique et durable.

En nous imprégnant des perspectives sur l’état de flow, nous avons abordé comment l’immersion totale dans une activité peut être à la fois source de satisfaction et de réalisations. De même, en examinant l’équilibre entre le plaisir immédiat et le sens à long terme, nous avons discerné les mécanismes qui façonnent notre bien-être quotidien.

L’exploration des accélérateurs de bonheur nous montre comment cultiver des sources durables de joie et de satisfaction dans nos vies. Ces moments ponctuent notre existence, sont autant de clés pour accéder à un bonheur authentique.

Dans le contexte professionnel, nous avons rappelé l’importance cruciale du sens, du plaisir et de l’exploitation de ses propres talents dans la construction d’une carrière épanouissante. En reconnaissant la valeur intrinsèque de son travail et en recherchant des activités qui résonnent avec nos valeurs les plus profondes, nous pouvons façonner un parcours professionnel riche et satisfaisant.

Enfin, notre exploration des croyances limitantes et aidantes, ainsi que de l’effet Pygmalion en situation de coaching, nous a offert des perspectives sur la manière dont nos pensées et nos perceptions façonnent notre réalité. En prenant conscience du pouvoir de nos croyances et de nos attentes, nous pouvons élargir les horizons de notre épanouissement personnel.

[1]Ed Poche – 19 mai 2011

[2]  Cf. Daniel Goleman, Richard Boyatzis et Annie McKee, dont les travaux font ressortir que la majeure partie des efforts pour changer sont voués à l’échec après ce qu’ils appellent le « stade de la lune de miel- ou étape initiale de mise en œuvre. Cf. également J. P. Kotter. Leading Change (Gérer le changement organisationnel), Harvard Business School Press, 1994.

[3] Ed. AdA, 2005

[4] https://www.youtube.com/watch?v=74Wei0-vAZs

[5] https://www.annualreviews.org/doi/pdf/10.1146/annurev.me.23.020172.002203

[6] https://www.linkup-university.com/pluginfile.php/4843/mod_resource/content/1/Cycles_de_vie.pdf

[7] https://www.linkup-university.com/pluginfile.php/4843/mod_resource/content/1/Cycles_de_vie.pdf

[8] https://www.linkup-university.com/pluginfile.php/4843/mod_resource/content/1/Cycles_de_vie.pdf

[9] https://www.linkup-university.com/pluginfile.php/4843/mod_resource/content/1/Cycles_de_vie.pdf

[10] https://www.linkup-university.com/pluginfile.php/4843/mod_resource/content/1/Cycles_de_vie.pdf

[11] 1. Les Éditions de l’Homme, 2004.

[12] Une autre façon de décrire le bonheur consiste à supposer qu’il se compose à la fois d’un élément cognitif, estimatif (le sens qu’on attribue à tel ou tel vécu), et d’un élément émotionnel, affectif l’expérience des plaisirs).

[13] Dans leurs travaux sur les affects positifs et la charge signifiante, Laura King et ses collègues chercheurs ont montré que la bonne humeur peut prédisposer l’individu à l’identification d’un sens à son existence. L. King, J. A. Hicks, J. Krull et A. K. Del Gaiso, Positive Affect and the Experience of Meaning in Life, dans Journal of Personality and Social Psychology, n° 90, pp. 179-196, 2006

[14] Pour se faire une idée des travaux publiés en la matière, cf. E. A. Locke, et G. P. Latham, Building a Practically Useful Theory of Goal Setting and Task Motivation: A 35-Year Odyssey (Élaboration d’une théorie applicable dans le domaine de la détermination d’objectifs et la motivation une odyssée de trente-cinq années). 1 dans American Psychologist, 57-9, pp. 505-717, 2002.

[15] Cf. R. Rosenthal et L. Jacobson (1968), Pygmalion à l’école : l’attente du maître et le développement intellectuel des élèves, 1968; Casterman, 1996; et A. Bandura, Auto-efficacité – Le Sentiment d’efficacité personnelle, De Boeck, 2007.

[16] Seuil, 1997.

[17] Pour une méthode plus élaborée, se reporter au chapitre 11 du livre Bâties pour durer : les entreprises visionnaires ont-elles un secret ? (First, 1996) de J. Collins, et J.L. Porras

[18] Les travaux de Mihaly Csikszentmihalyi sur l’état de flow ou d’expérience optimale ont de vastes répercussions aussi bien au niveau de l’individu que de la société tout entière. Pour en savoir plus, cf. Csikszentmihalyi, Vivre: la psychologie du bonheur (op. cit.).

[19] Pour une analyse plus poussée de la détection des atouts personnels, cf. M. Buckingham et D, O. Clifton (2001), Découvrez vos points forts dans la vie au travail, Éd. Village mondial, 2003.

 

 

Par Diego Torraca

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