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Numéro 15 04/2023 Numéros

Le coaching comme outil de représentation personnel des femmes dans le milieu professionnel ?

Comment le coaching peut-il être un outil de représentation personnelle des femmes dans le milieu professionnel ? On répond dans cet article.

Un article de Annabelle GNIMASSOU-LACARRA
Coache Professionnelle Certifiée


Anciennement cadre dans l’assurance, Annabelle GNIMASSOU-LACARRA a occupé des fonctions techniques et transversales, de soutien ciblé aux équipes commerciales.

Ayant évolué dans un milieu peu féminisé, elle s’interroge sur les facteurs de représentation et de réussite des femmes dans le milieu professionnel. Aujourd’hui coach professionnelle certifiée, elle accompagne les femmes dans leurs transitions professionnelles. Annabelle anime en outre le blog carnetdedessein.fr qui s’interroge sur les destins pluriels de femmes et observe la route des féminismes.


Introduction

Il arrive de voir des publications sur les réseaux sociaux qui promettent l’atteinte d’un résultat par la simple application d’une méthode exogène et itérative. C’est-à-dire que l’application de solutions extérieures au client, par la répétition d’actions ordonnées, doit permettre de concrétiser ses attentes. Or en coaching, on ne peut nier l’écologie du client, son contexte personnel et son environnement. Le but est d’atteindre un objectif, une vision personnelle qui doit composer avec la réalité propre à chaque client. Pour cela, elle doit s’inscrire par des actes mus par un travail d’introspection. C’est une coproduction entre le client et le coach, qui se fait alors la force discrète de l’évolution. Si la pratique du coaching peut s’accompagner de l’utilisation d’outils, contrairement au premier exemple, le coaching lui-même ne peut alors pas se décrire comme un outil, mécanique, mais bien comme une méthode qui emprunte aux sciences sociales la compréhension de l’Homme pour l’ancrer dans le pragmatisme, notamment.

Ses sensibilités personnelles ne doivent pas faire oublier le respect du cadre ontologique et écologique du client…

Ainsi, pour moi devenir coach c’est effectuer avant tout un travail d’introspection, c’est-à-dire celui de la connaissance de soi, mais aussi celui de mes objectifs professionnels. Ceci afin de pouvoir accueillir mes clients dans le respect de leur cadre écologique et ontologique. Savoir-faire et savoir-être s’entremêlent dans la pratique du coach, et le respect d’un cadre ontologique est une obligation de moyen. Le coach promet de tout mettre en œuvre pour que son client évolue positivement selon l’objectif souhaité, dans un cadre défini et sécurisant. La première ressource du coach c’est lui-même. Dans ces cas, le passé s’arrime souvent au présent, et la question que je me pose est celle de savoir comment composer avec mes bagages et mes sensibilités professionnelles notamment. J’ai exercé des fonctions techniques en gestion de portefeuilles financiers, nous n’étions pas nombreuses. Je me souviens déjà que de l’absence d’égalité numérique lors de mon passage en master de finance.

…Mais elles peuvent permettre de mettre à jour des typologies de demandes émergentes

C’est ainsi que je me rends compte que les billets que je publie à travers mon blog depuis ma reconversion, touchent certes la représentation de la génération Y au sein de la société, mais aussi beaucoup ce qui m’apparait être la place des femmes au sein de cette dernière. Je m’en fais le constat a posteriori. Je décris les tribulations d’une trentenaire, ou le parcours de femmes, au lecteur de se faire son opinion. Aujourd’hui je m’interroge sur le point de savoir pourquoi le salaire des hommes est 16,8% plus élevé que les femmes sur un même poste et sur un équivalent temps plein, alors même que le Code du travail prévoit un titre IV à « l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ». L’écart vient-il d’une différence de traitement entre hommes et femmes, ou alors d’une moindre reconnaissance et revendication de leurs compétences par les femmes ? D’ailleurs, la question n’est-elle pas plus complexe ? Pour moi l’objet n’est pas de trouver des réponses, mais de se poser les bonnes questions pour prendre conscience du cadre sociétal qui entoure une demande, pour prendre conscience avec le client de ce qui relève d’une injonction ou d’un carcan social, et de ses désirs propres par exemple.

Par son principe d’extériorité politique et cognitive, le coaching est intrinsèquement contraire à la défense de la justice sociale…

Pour que les choses soient claires, j’ai mes centres d’intérêt, mais je n’ai pas choisi d’exercer un métier de défense de la justice sociale. Cette dernière peut être vue comme la construction politique et morale qui vise à une égalité des droits par la solidarité collective entre les personnes d’une société donnée. En effet, pas d’engagement politique dans le cadre du processus de coaching, car la neutralité de la posture permet au client de s’exprimer pleinement et de développer ses potentialités propres au sein d’un espace collaboratif. On parle alors d’extériorité politique et cognitive, fondamentale dans la pratique du coaching.

Mais le métier de l’accompagnement individuel le coaching ne doit-il néanmoins pas saisir le contexte social et sociétal du client ?

Pour le définir, « le coaching en tant que métier des sciences humaines et sociales consiste à accompagner des individus, des équipes, et des organisations, dans la définition et l’atteinte de leurs objectifs d’évolution, de développement, de décision, de transformation et de réalisation dans le respect des principes éthiques du « Comité d’Éthique du Coaching » et notamment le respect des droits des individus ». Je me demande ainsi si les effets de l’accompagnement d’un groupe, ou individuel n’ont pas pour effet à rejaillir un niveau collectif, et si les demandes reçues en coaching ne sont pas le signe de thématiques aux enjeux sociaux et sociétaux. En d’autres termes n’y a-t-il pas là des demandes identifiées bien que singulières, que l’on peut accompagner à titre individuel et particulier ?

Pour résumer, en pleine structuration de mon identité, de mon « grain » professionnel, je me demande si le coaching a sa place comme outil d’évolution de la représentation des femmes dans le milieu professionnel. Le coaching peut-il accompagner un changement de perception du rôle social et professionnel des femmes par sa promotion, ou est-il le catalyseur des changements sociaux, donc des demandes, qu’il doit pouvoir se préparer à accompagner ? Pour résumer, entre sensibilité à des enjeux sociétaux et mon devoir d’extériorité politique et cognitive, je me demande de quels outils dispose le coach pour protéger son client de toute implication politique et cognitive. Comment répondre à une typologie de demandes tout en évitant le contre-transfert.

1.   L’émergence de la demande : Les freins et les obstacles qui se posent aux femmes dans le monde du travail

Il est important de définir ce qu’être une femme, car le coaching a vocation a traité une demande en prenant en compte la singularité du client (1.1). Parce que s’interroger sur la représentation des femmes c’est essayer des toucher du doigt le « plafond de verre » professionnel dont certaines témoignent (1.2) c’est-à-dire la nature de la demande de coaching dont nous pouvons nous interroger sur sa bonne prise en compte (1.3).

1.1      Qu’est-ce qu’être une femme ?

Alors qu’une étude datant de 2016 de l’International Coach Federation (ICF)[1] montre qu’au niveau mondial, 54% des clients en coaching sont des femmes, l’objet est de savoir comment appréhender l’accompagnement en coaching loin des « tentations déterministes et psychologisantes qui fleurissent sur le marché de l’accompagnement »[2]

 1.1.1      S’interroger sur la notion de féminité permet de savoir comment accueillir la demande d’un individu qui se définirait comme une « femme »

Le point de savoir ce qu’être une femme c’est se demander si l’identité féminine correspond au sexe biologique, ou si elle est une notion plus vaste engageant l’éducation et les foyers de représentations. Alors que le coach doit avoir une posture neutre et bienveillante pour accueillir le client dans son entièreté, la question est de savoir comment accueillir la demande d’un individu qui se définirait comme une « femme », indépendamment de son sexe biologique. Ressenti et identité biologique concordent souvent, mais pas toujours. Ainsi à quels éléments le coach doit-il se fier lorsqu’une cliente dit connaitre des difficultés professionnelles à cause de son genre ?

1.1.2      Cependant, des solutions génériques de conseil sont offertes afin de trouver sa place sociale en tant que femme

En me promenant sur le web, je trouve des professionnelles orientées en « transformation » dont la cible sont les femmes. L’objet est de se connecter à « sa boussole intérieure » pour devenir la femme authentique, spirituelle et instinctive qui contribuera au retour à « l’harmonie entre le féminin et le masculin ». Cette dernière expression est trouvée plusieurs fois. J’avoue ne pas bien la saisir, mais comprends qu’il y aurait des tensions entre féminité et masculinité. L’enjeu de la connaissance de soi est ainsi problématisé, il y a un problème à résoudre, trouver sa place sociale en tant que femme. La solution offerte, génériquement, est celle de renouer avec sa féminité.

1.1.3      Une approche essentialiste de la féminité qui oublie la singularité de l’individu

En me référant à un site féminin, je me rends compte qu’il s’agit de la notion de féminin sacré, « en d’autres mots, de renouer avec sa force féminine, son énergie féminine, la femme originelle »[3]. Par le terme de femme originelle, la femme tient un rôle social dû à son sexe biologique. Pour s’épanouir, elle doit retrouver sa place sociale et assumer cette féminité originelle. Un certain mysticisme entoure ce concept comme le cycle de la lune qui concorde avec le cycle de la femme par exemple. Il s’agit d’une notion dite essentialiste de la femme, c’est-à-dire que celle-ci des attributs spécifiques qui la différencient de l’homme, et cela dès la naissance.

1.1.4      L’approche existentialiste : des vécus sociaux communs qui ne doivent pas faire oublier leur singularité

Cette notion s’oppose à la vision existentialiste de Simone de Beauvoir qu’elle expose dans son essai Le deuxième sexe[4]: « On ne nait pas femme, on le devient ». Cette célèbre citation a été choisie à dessein, car cet ouvrage recoupe les domaines ethnologiques, sociologiques et philosophiques. L’autrice conclut l’ouvrage en établissant que le mythe le plus ancré a trait au mystère féminin. Ce mystère féminin serait la conséquence d’une valorisation du sexe masculin, du tabou du sexe féminin et de l’éducation. Pour résumer, la culture favoriserait les attributs masculins faisant de la femme l’Autre de l’homme. Il s’agit dans ce dernier cas d’une approche culturelle dissociant le genre du sexe biologique, et qui intègre une dimension d’expérience sociale commune.

1.1.5      Une demande bien cernée demande une connaissance de l’écosystème de la cliente

Ainsi, là où une théorie (essentialisme) entoure la femme de mysticisme par les lois naturelles qu’elle établit, l’autre (existentialisme) défend malgré des biais éducationnels communs, une féminité multiple et propre à chacune, fruit des biais personnels, des valeurs et des points de vue sociohistoriques de chaque femme[5]. Par une extériorité cognitive du coach, cette dernière approche permet de valider les principes non-jugement, de respect de l’individu et d’acceptation positive notamment : le coach accueil l’individu et ses mots/maux sans préjugés relatifs à son genre, et, tout en aillant conscience de certains biais sociaux.

Comme nous le voyons, être une femme n’est pas seulement un état civil, c’est un ressenti porteur d’un passif et d’une signification sociale que le coach doit pouvoir cerner pour une bonne appréhension de la demande de la cliente. Accompagner « au féminin » et accompagner « des femmes » est avant tout un choix philosophique avec lequel la pensée du coach doit être au diapason. Aussi dans le cadre de ses séances, la conscience de biais culturels, extérieurs ou intériorisés par l’individu ne saurait faire du coach un militant (ce qui serait contraire à son devoir de neutralité), mais un professionnel plus alerte des réalités de ses clientes.

1.2      Les différents plafonds professionnels que connaissent les femmes

Aborder la question des plafonds professionnels c’est traiter des inégalités de genres dans le domaine professionnel. C’est traiter de l’environnement de travail et la perception de celui-ci par la cliente. C’est ainsi aborder l’écologie et l’ontologie de la cliente, qui sont deux notions fondamentales en coaching. Par ces dernières, il s’agit de s’assurer de la sécurité du client dans la relation de coaching. L’écologie du client est l’environnement avec lequel ce dernier est en contact direct, alors que l’ontologie, bien que plus difficile à définir, peut consister à mettre des mots sur les ressentis et émotions qui nous touchent. La première notion est contextuelle alors que la seconde se rattache à l’être.

1.2.1      Domaine professionnel : Une tension potentielle entre écologie et ontologie du client poussant à la demande de coaching

Dans le cas de l’évolution professionnelle des femmes, ces deux notions peuvent-être en tension, car s’interroger sur les différents plafonds professionnels que connaissent les femmes, revient à s’interroger au-delà du subjectif pour comprendre d’éventuels critères objectifs inégalités. Mes clientes comme beaucoup d’autres m’ont énoncé une double journée de travail, conciliation de sa vie professionnelle et vie personnelle, perception par l’employeur de leur capacité à se consacrer au travail en entreprise, etc. Ainsi, la question est celle de savoir quelles sont les barrières invisibles que connaissent les femmes, celles-là mêmes qui poussent à la demande de coaching, et qui rendent plus difficile l’accès à des postes de pouvoir économique au même titre que les hommes ? 

1.2.2      Mais toutes les femmes ne sont pas égales face au monde du travail – bipolarisation de la présence des femmes sur le marché du travail

Selon la sociologue Margaret MARUANI[6], les idées d’égalité et de non-discrimination s’infiltrent tout d’abord dans le préambule de la constitution de 1943 qui « garantit à la femme dans tous les domaines des droits égaux à ceux des hommes », pour ruisseler dans la législation. Dans la pratique cependant, comme nous l’aborderons plus loin, le constat est celui du fait que « sur une longue période, c’est bien la constance qui frappe : les six professions les plus féminisées en 2005 sont les mêmes qui l’étaient en 1962[7] », que les taux d’inactivité féminins soient relativement bas ou très élevés. Si l’accession des femmes aux professions-cadres est moins aisée pour les femmes que pour les hommes, il est incontestable que le nombre de femmes cadres augmente. Il y a une double mécanique de femmes qui accèdent à des professions traditionnellement dites masculines, et de plus en plus de femmes occupant des postes peu qualifiés. Il y a donc un mouvement de bipolarisation de la présence des femmes sur le marché du travail.

1.2.3      Des femmes moins représentées dans les filières universitaires « sélectives »

Alors que les filles sont plus diplômées du supérieur, seulement 43% d’entre elles représentent les cadres[8]. En 2020, 53 % des femmes âgées de 25 à 34 ans contre 46 % des hommes de cette classe d’âge étaient diplômés du supérieur[9]. Cependant, excepté pour les études de médecine, odontologie et pharmacie où elles représentent en 2020‑2021 les deux tiers des étudiants, les femmes restent minoritaires dans les cursus dits « sélectifs » ou scientifiques, et de manière encore plus marquée dans les filières à la fois sélectives et scientifiques. Par exemple, les femmes ne représentent que 17% des étudiants à Polytechnique en 2022[10].

1.2.4      …Elles choisissent principalement les secteurs du soin et de l’éducation

Ainsi, comme conséquence de leurs orientations scolaires différenciées notamment, femmes et hommes ne travaillent pas dans les mêmes secteurs d’activité. Les femmes sont beaucoup plus représentées dans le secteur tertiaire. En particulier, 45 % des femmes travaillent dans le secteur de l’enseignement, l’administration publique, l’action sociale, et de la santé et contre 19 % des hommes. Cette concentration sectorielle de l’emploi des femmes a peu évolué au cours du temps.

Tableau : Travail et emploi des femmes – Margaret MARUANI – La découverte

1.2.5 Une représentation professionnelle signe de stéréotypes assimilés

Depuis plus de trente ans, il est mis en place une politique visant à promouvoir l’égalité au sein de l’éducation nationale. Ainsi, la dernière convention passée entre les ministères chargés des Droits des femmes et de l’Éducation nationale pour l’égalité a vu le jour en 2013. Son objectif est celui d’atteindre « une plus grande mixité des filières de formation à tous les niveaux d’études » et insiste, pour la première fois, sur les stéréotypes qui touchent tout autant les garçons que les filles[11]. Pourtant l’évolution sur le terrain semble atone. Selon Sheryl Sandberg, ancienne directrice des opérations Facebook-Meta dans son ouvrage Lean in[12] « Les hommes au pouvoir n’ont en généralement pas conscience des avantages que leur vaut le simple fait d’être un homme, ce qui les rend aveugles aux handicaps liés à la condition féminine. Les femmes aux échelons inférieurs, estiment aussi tout à fait justifiée la place des hommes qui se sont hissés au sommet, elles tentent donc de s’élever en travaillant dur, au lieu de soulever certaines questions ou d’exprimer leur crainte que des préjugés faussent la donne. Il en résulte que tout le monde se rend complice d’un système injuste ». Les termes sont forts, le ressenti nous intéresse.

1.2.5      Une prégnance contextuelle essentialiste qui attribue les rôles et affinités professionnels selon le genre

Certaines recherches pourraient expliquer l’importance de la perception du genre dans cette faible évolution : dans « Le genre des technologies de l’information » publié dans la revue française de gestion en 2004, Chantal Morley explique la faible représentation des femmes dans le milieu de l’informatique. Elle établit que le point de vue essentialiste, qui attribue certaines qualités aux hommes et d’autres aux femmes a été déterminant dans le domaine de l’informatique. Ainsi pour ces derniers, malgré une grande évolution du rôle des femmes, le sexe se conforme à des stéréotypes de genres. Au professeur Lueptow de conclure en 1995 « Il nous semble que les explications sociopsychologiques doivent prendre en compte les influences génétiques qui se font jour si clairement dans les travaux contemporains »[13]. Plus que philosophique, il semblerait donc que la perception des femmes dans les métiers scientifiques soit d’ordre sociologique : elles ne choisissent pas les filières scientifiques, et celles-ci peinent à les accueillir.

1.2.6      Alors qu’elles sont fortement représentées dans les professions tertiaires, les femmes sont peu promues aux postes de directions

Or, Bien que la loi dite Copé-Zimmermann de 2011 impose un quota de 40% de femmes dans les entreprises à grosse capitalisation boursière, lorsqu’on observe la composition des comités exécutifs du CAC 40 en 2019, elles en représentent moins d’un quart des membres. Aussi 30% de ces derniers proviennent d’écoles d’ingénieurs, 10% de science po et 10% de HEC[14]. Ces filières sont marquées par une forte sous-représentation des femmes. Ainsi, la loi n’a pas eu le ruissellement attendu et la représentation des femmes reste limitée dans les comités de direction des Entreprises de Taille Intermédiaires (ETI) ainsi que dans les Petites et Moyennes Entreprises (PME) dans lesquelles elles représentent 20% des dirigeants.

1.2.7      Un monde du travail encore difficilement compatible avec la maternité

Une des raisons de ce faible accès aux postes à responsabilité est le « plafond de mère » que connaissent les femmes. Expression créée par Marlène Schiappa secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations et l’association Maman travaille, elle désigne « l’ensemble des mécanismes économiques, managériaux, psychosociaux, qui conduisent à entraver la vie professionnelle des femmes et à brider la carrière des mères »[15]. Ainsi, les congés parentaux que prennent les mères suite à leur accouchement les poussent à mettre leur vie professionnelle entre parenthèses, sans que d’un côté, des mécanismes de garde efficients soient mis en place, ou de l’autre sans que les employeurs ne mettent en place des outils adéquats pour compenser cette absence. Les mères s’écartent du marché du travail en perdant leur ancienneté et la valeur de leurs qualifications. Il en est de même du temps partiel pris majoritairement pour s’occuper du foyer et des tâches ménagères.

Le travail est à la croisée d’enjeux sociétaux, professionnels et individuels qui peuvent avoir une force contraignante sur la carrière de ces dernières. D’un côté l’éduction des femmes les pousse vers des filières des sciences humaines, peu représentées aux postes de pouvoir, et de l’autre, l’environnement social est peu prompt à leur permettre de concilier facilement vie privée et vie professionnelle. Environnement et ressenti de celui-ci peuvent être antagonistes et pour beaucoup. Dans l’exemple donné ci-dessus, la dissonance est apparue à l’intersection des obligations de sécurité écologique et ontologique de la cliente qui a préféré ne pas modifier ses représentations.

1.3      Une gestion des ressources professionnelles féminine parcellaire

À la lecture de certaines études sur le « leadership féminin » s’établit une vision stéréotypée de management par les femmes. En tant que coach, tout le danger revient à prendre ces études pour argent comptant, et d’outrepasser le devoir de non-jugement et d’extériorité politique et cognitive en se figurant qu’en tant que femme, une cliente, dispose de qualités prédéfinies. L’objet n’est pas de pourfendre de telles études, mais de mettre en garde du fait qu’elles sont susceptibles d’influencer le professionnel, ce qui pourrait se ressentir sur le protocole de questionnement si l’on n’y prend pas garde.

1.3.1      Des qualités a priori féminines dans le leadership en accord avec les enjeux de croissance des entreprises

À la lecture de l’étude Women Matter 2[16] du cabinet de conseil McKinsey, la mixité en entreprise n’est pas seulement un enjeu de société, mais « un atout pour la compétitivité des entreprises ». Cette étude réalisée sur la base de données recueillies chez les entreprises clientes établit une forte corrélation entre la performance financière d’une entreprise et la présence d’une masse critique d’au moins trois femmes au sein de leurs instances dirigeantes. Ceci serait expliqué sur la base des études typologiques menées par les chercheurs Bernard BASS et Bruce AVOLIO en matière de management. En effet, les femmes développeraient des comportements tournés vers :

  • Le développement des autres
  • L’attente de reconnaissance
  • L’exemplarité
  • L’inspiration
  • La prise de décision participative

Une vision économique de la mixité est donc donnée, et une approche statistique et rationnelle permettrait de valoriser la mixité en entreprise, et tout particulièrement des comportements féminins.

Women’s Forum for the Economy & Society, McKinsey & Company (2016), page 13

1.3.2      Femmes et leadership transformationnel : différent mode de leadership pour des objectifs différents

Dans un monde de l’entreprise faisant tomber les silos, où l’inspiration et la prise de décision participative sont plébiscitées, ces quatre éléments sont tournés vers des valeurs de partage et d’altérité qui nourriraient les besoins des salariés en matière :

  • De stimulation intellectuelle
  • D’inspiration
  • De prise de décision
  • D’attente et de reconnaissance

Ainsi, reprenant les études de Bernard BASS sur le leadership transformationnel accordant de l’importance aux aptitudes interpersonnelles, particulièrement présent chez les femmes, s’opposerait un management transactionnel, qui se fonde sur la tâche et la négociation permanente de contrepartie (j’accomplis telle action si j’obtiens telles choses). Le management transformationnel, lui, est celui pour lequel le leader consacre son énergie à valoriser et faire prendre conscience de leurs actions aux salariés.

1.3.3      Des études montrent que les femmes sont des leaders plus tournées vers l’interpersonnel

Cette étude de McKinsey vient confirmer pour partie le constat établi dans « le genre et le leadership », dans lequel Sarah SAINT-MICHEL revient sur les travaux relatifs à la différence de leadership entre hommes et femmes, entrepris dès la seconde partie du XXe siècle, notamment par méta-analyses. Selon l’une de celles menées par Alice Eagly et al.  52.5% des femmes en position de leadership adoptent une posture transformationnelle contre 47.5% des hommes. Ces résultats ont pu être interprétés selon les chercheurs par :

  • La théorie de « l’incongruité du rôle de genre » selon lequel les individus ont tendance à se conformer aux rôles de genre culturellement définis. Les femmes sont ainsi plus enclines à adopter un leadership transformationnel qui est leur adéquation de leur rôle de genre féminin non conforme avec les stéréotypes de rôle masculin.
  • La théorie du double standard de compétence selon laquelle le plafond de verre qu’a poussé des femmes plus compétentes que des hommes à des postes de responsabilité.
  • Selon la dernière, il n’y aurait pas de différence significative entre hommes et femmes et les femmes accédant à des postes de leadership ont dû abandonner leurs caractéristiques dites « féminines » pour parvenir à des postes dont des caractéristiques attribuées comme « masculines » sont demandées

La question de l’impact du genre sur le leadership n’est pas bien tranchée, cependant, si la question se pose c’est « qu’il existe toujours des inégalités, notamment à l’encontre des femmes, pour accéder aux postes de pouvoir et de décision[17] ». La question que je me pose est celle de savoir si ces inégalités se résoudront par une interprétation exclusivement essentialiste, en typologisant des traits de comportement selon les sexes et en figurant leur caractère inné.

1.3.4      Il faut cependant prendre garde à nos stéréotypes inconscients

Quel que soit la théorie, on relève l’importance de la notion de perception de soi par la femme en posture de leadership et/ou la perception par les autres de cette dernière. Le rôle de femmes, nébuleux, mais culturellement établi, assimilé, et projeté semble trouver congruence dans le rôle de leader transformationnel. Dans le document établi par McKinsey, à la question « La montée en puissance de leaders féminins pourrait-elle contribuer à combler le déficit de comportements de leadership ? », la réponse est de fait affirmative. Cependant l’explication est le défi des entreprises dans les années à venir trouveront bénéfice dans le comportement des femmes, empreint de bienveillance managériale. Ce qui laisse place aux biais de perception stéréotypés donc à une ingérence cognitive.

1.3.5      Différencier les hommes des femmes c’est oublier la singularité du client

Aussi, à la lecture de cette étude de renom, il est à observer que l’argument différentialiste entre les hommes et les femmes s’impose en arguant des effets positifs du management au féminin au sein des entreprises. L’objet de telles études tend à donner une caution objective aux différences entre hommes et femmes par une parole scientifique. Cependant, admettre que les femmes évolueraient différemment des hommes c’est adopter un angle de vue ségrégationniste[18] qui divise la société en groupes distincts, hiérarchisés par leurs caractéristiques, des aptitudes ou un rôle social spécifique. Ainsi la femme est stéréotypée comme étant plus « communautaire » dont les caractéristiques évoquent des attributs tels que la « compassion, la générosité, le sentimentalisme, la tendresse » ; alors que les hommes détiendraient des attributs tels que la domination, « l’agressivité, l’ambition, l’indépendance et la confiance en soi »[19].

1.3.6      Les femmes confinées au management de proximité ?

Aussi, les pratiques de gestion des ressources humaines qui ne seraient pas sans incidences quant à la représentation des genres dans les postes à forte responsabilité. Certains chercheurs établissent une forte représentation masculine pour les postes d’autorité. Ainsi les pratiques de gestion des ressources humaines, notamment lors de l’établissement d’une fiche de poste de leadership, et lors de l’évaluation sous-tendent un « modèle de leadership dominant ». Ceci pourrait venir biaiser l’évaluation des femmes en position de leadership et qui y postuleraient.

1.3.7      Un discours ontologiquement dangereux

En matière d’accompagnement, admettre des spécificités typiquement féminines revient à dire qu’elles doivent savoir jouer de ces spécificités et que si celles-ci ne se déploient pas c’est qu’il y a un « corset invisible » qu’elles ne savent pas défaire. Selon Irène Jonas et Djaouida Séhili[20], en poussant l’argumentation, cela serait faire porter aux femmes la responsabilité d’une absence de promotion par exemple. En effet, sous-jacent de ce discours, se trouverait une méconnaissance du mode de fonctionnement de l’entreprise alors qu’elles pourraient parvenir à leurs fins par capitalisation des spécificités féminines attendues. Or la demande peut émerger de cette dichotomie entre le comportement supposément attendu et l’absence de promotion.

En lisant plus avant les études, on se rend compte que le leadership transformationnel est plus attendu aux postes de haute direction, alors que le leadership transactionnel est attendu auprès des équipes. Or le plafond de verre s’exprime dans le fait que les femmes peuvent progresser dans la hiérarchie, mais seulement jusqu’à un certain point malgré le fait qu’elles soient perçues principalement comme ayant un mode de management transformationnel.

Blog du Crédit Agricole Toulouse 31 : « Minute culture : plafond de verre »

Illustration : L’explicitation ontologique d’une manageuse

De tels stéréotypes peuvent être assimilés par la cliente elle-même. Cela n’est pas du ressort du coach qui doit accueillir la cliente avec sa carte du monde, sauf si cela est source de freins. Dans ce cas, l’objet du coach est d’accueillir une demande d’évolution en prenant soin de bien clarifier sémantiquement les termes employés par la cliente. J’ai l’exemple d’une coachée qui souhaitait changer de posture professionnelle afin d’obtenir une promotion, et qui me disait agir telle une « maman » avec ses collaborateurs. Je lui ai demandait ce que signifiait agir comme une maman et elle m’a répondu être le tuteur de ces enfants. Je lui ai demandé comment cela se traduisait en entreprise, la réponse a été « guider chacun afin de pouvoir s’épanouir à son poste ». Par sa reformulation, la cliente a neutralisé sa posture de mère de famille en entreprise, posture qui selon elle entrainait un « surinvestissement émotionnel ». Le travail de reformulation a permis de voir la situation avec plus de distance.

Ainsi, nous approuvons la thèse que l’individu socialisé qu’est la femme est une construction sociale, porteuse d’un ressenti lié à un passif social dans lequel s’inscrit la singularité de la demande. Aussi les difficultés objectives, comme subjectives, relatives à la perception des femmes en position de pouvoir, peuvent être un frein ressenti à leur évolution sociale comme professionnelle. Cette dissonance est susceptible de faire émerger la demande de coaching afin d’y travailler dans la sécurité écologique et ontologique de la cliente qui devra se défaire de ces freins.

Soumise à ces contraintes, la typologie de demandes de mes clientes qui vise à concilier vie professionnelle et vie personnelle a cependant un objet différencié qu’il faut savoir accueillir et accompagner.

2.   Typologie de demandes : Concilier vie professionnelle et vie personnelle ?

Malgré la diversité des demandes d’ordre professionnel, la constante est l’affirmation de soi (2.1). L’objet est donc de s’organiser pour concilier ses domaines de vie (2.2) pour acquérir la posture professionnelle faisant symbiose entre l’être, son environnement et le poste (2.3). Souvent guidées par leur projet, leur vision et leur volonté d’impact, les personnes accompagnées affirment leur volonté d’affirmation en milieu professionnel, qui devient volonté de leadership (2.4).

  • Quand la volonté d’affirmation en milieu professionnel devient volonté de leadership

Les définitions précédemment utilisées du leadership ne prenaient en compte les seules vertus opérationnelles d’un modèle (transactionnel ou transformationnel), circonscrit dans la seule sphère professionnelle. Or, le leadership peut être définit plus largement dans la capacité de faire adhérer à ses idées, à une vision, que cela soit par son charisme (généralement), la reconnaissance de son expertise, ou les deux. Les sphères de leadership peuvent être professionnelles et personnelles s’emboitant dans un tout cohérent. Je me souviens ainsi d’une femme qui m’avait été conseillée pour ses compétences en digitale. Je me suis vite rendue compte que cette face n’était qu’anecdotique et qu’elle se distinguait bien plus nettement comme entraineuse d’une équipe de football. Elle avait acquis sa notoriété dans ce dernier domaine qui la passionnait, et elle a aujourd’hui décidé d’en faire son métier. On parle de leader véritable, ce dernier exerçant un leadership authentique.

  • Recherche de congruence et cohérence individuelle de la cliente

Arguant de leurs projets, mes clientes sont toutes venues à moi avec le questionnement de la remise en question : « que puis-je faire pour donner le sens souhaité à ma vie », « comment puis-je faire pour donner le sens souhaité à mon projet ? », etc. Elles cherchaient une cohérence entre leurs actes et leurs pensées. Vu la définition donnée en début de cette sous-partie, elles étaient en recherche de leur leadership, c’est-dire, un moyen de faire entendre leur voix et leur « moi » profond. En coaching, on parle alors de congruence et de cohérence personnelle. Ainsi, un individu confronté à plusieurs attitudes contradictoires peut chercher à les adapter, à les modifier afin de générer d’une situation cohérente, pertinente, attendue et confortable en définitive

  • Agir avec authenticité nécessite de briser les barrières étanches des domaines de vie

Certains parlent « d’alignement », c’est-à-dire coordonner ses actes et ses pensées dans son quotidien. Toutes les clientes que j’ai eu à coacher me parlent de trouver un sens à leurs actions, et à leur vie professionnelle. Elles désirent être alignées à leurs valeurs afin que leur sensibilité soit entendue. Alors que le les différents domaines de vie recensés par HUDSON qui sont le couple, la famille, la vie sociale, le travail et le domaine personnel, peuvent paraître étanches, elles essaient de briser ces barrières pour en faire un tout cohérent pour agir avec authenticité. Ces éléments correspondent à la définition donnée par la professeur Sarah SAINT-MICHEL, c’est-à-dire agir avec authenticité, cohésion et intégration de ses différents domaines de vie.

  • Le protocole de formulation de l’objectif (PFDO) : une aide précieuse pour trouver la raison d’être de ses actions

Cependant, la professeure va plus loin en ajoutant qu’il s’agit de trouver le sens commun de ses actions (son leadership) pour faire des ponts entre ses différents domaines de vie sans les exclure l’un l’autre. La méthode semble a priori contre intuitive, car nécessite d’outrepasser les silos créés dans ses différents domaines de vie. Le protocole de formulation de l’objectif (PFDO) peut être une aide précieuse dans le fait de trouver son mode de leadership.

  • Agir avec authenticité : cela consiste à définir sa vocation de leader, c’est-à-dire développer sa capacité à se connaitre soi-même et agir en conséquence. L’objet de de trouver ce qui stimule la cliente dans chacun de nos domaines de vie.
  • Stratégie de cohésion : s’interroger sur les personnes impliquer dans le projet ou l’objectif afin d’établir un rapport de collaboration.
  • Chantier de « l’intégration créatrice » : passage à l’action, notamment par le biais d’objectifs intermédiaires à chaque séance.
  • Affirmation de soi : Travailler les valeurs de la cliente

Les valeurs reposent sur un protocole de questions relatives à l’affirmation de soi qu’il ne faut pas négliger au risque de passer à côté de l’objectif de la cliente.

  • Qu’est ce qui est important pour moi/pour vous ?
  • En quoi cela est-il important ?
  • Qu’est-ce que cela vous apportera et qui est plus important encore ? Pourquoi faites-vous cela ?

Comme on peut le voir, ces questions relient l’intérêt d’une action à ce qui est important pour la cliente, et non de manière générale. L’action est centrée sur les désirs de la cliente.

  • Le questionnement ciblé comme puissant levier de l’engagement personnel

Cette méthode, combinée à un travail sur les valeurs, permettrait de garantir un puissant levier d’engagement personnel. Il en ressort que des actions alignées à nos pensées ne peuvent se soustraire au respect de nos valeurs. Ces dernières nous sont propres, et sont le fruit de nos expériences comme de notre éducation. Ces valeurs sont le fruit de notre interprétation personnelle qui agit comme des normes de référence.

  • …Notamment lorsque la cliente n’est pas la seule personne impliquée dans l’accomplissement de son objectif.

Le questionnement sur les valeurs peur s’avérer extrêmement important, notamment lorsque la cliente, en tant que mère de famille est soumise à une double journée de travail. En effet, elle peut se perdre à répondre aux demandes et besoins divers de ses enfants par exemple. Ainsi, j’ai une cliente qui me « disait venir me voir pour créer une bulle et ne penser qu’à elle ». Jusque-là elle culpabilisait de penser à son projet, car ses enfants, dont elle tenait à s’occuper pleinement lui avait dit « maman si tu fais ton nouveau travail tu n’auras plus de temps pour nous ».

Soumises à des impératifs personnels et professionnels contradictoires, voire antagonistes, beaucoup de femmes cherchent à faire entendre leur voix en conciliant ces différents domaines de vie. Sous-jacente, la demande d’agir avec authenticité, le protocole de formulation de l’objectif peut-être une aide précieuse dans l’objectif de se connaitre même soi-même. Le travail sur les valeurs, quant à lui, permettrait de développer un puissant levier d’engagement personnel.

2.2 S’organiser pour concilier vie personnelle et vie professionnelle…

Selon une étude INSEE[21], chaque jour en moyenne, plus de trois heures sont consacrées aux tâches domestiques (cuisine, ménage, courses, soins aux enfants, etc.). Soixante-quatre pour cent (64%) de ces heures sont effectuées par les femmes. Aussi, les mères en couple réalisent trente-quatre heures de travail domestique hebdomadaire. Ainsi, les femmes sont astreintes avec intensité à une journée professionnelle et domestique, laissant moins de temps aux occupations personnelles que les hommes. Par exemple, une séance de coaching est perçue comme un « moment pour soi », et, qui devrait être méthodiquement mené pour en capitaliser ses effets. La question qui se pose ainsi est celle de savoir comment capitaliser son temps pour répondre à sa demande de développement de ses aspirations ?

  • Concilier ses domaines de vie pour faire entendre sa (nouvelle) voie professionnelle

Une des demandes que j’ai eu en coaching était de mieux s’organiser pour concilier vie personnelle et vie professionnelle. La demande était celle de concilier ses différents domaines de vie afin de pouvoir mener une existence épanouie. Pour résumer, il s’agissait de faire entendre sa voix, sa raison d’être dans les différents cercles familiaux, amicaux, sociaux, couple et travail. Aussi j’ai validé l’approche de ma cliente qui opposait les domaines de vie. Ce faisant, je lui ai demandé de « dessiner un camembert sur une feuille et de la décomposer selon les cinq domaines de vie ». L’objet était de trouver ce qui lui correspondait ou lui correspondait moins à l’heure actuelle dans cette répartition afin de représenter la répartition idéale. Le but était d’analyser chaque domaine de vie pour savoir quel temps elle y consacrait chaque semaine, quelles activités elle y associait.

  • Les domaines de vie ne sont pas des silos étanches

Plus tard ma cliente abandonnera les séances en me disant qu’à choisir, elle préférait préserver sa vie de famille. Je crois qu’il aurait fallu travailler au-delà de ces domaines de vie, et de ne pas les voir comme des « tout » étanches dont il faut faire croitre ou décroitre chaque branche. En effet, le bon prisme aurait été de savoir comment s’articuler les différents domaines de vie de ma cliente et de les confronter à sa « raison d’être », c’est-dire-dire ce qui la faisait lever le matin. Cela aurait été une bonne façon d’étayer son assertion selon laquelle : « Je ne veux plus faire comme ma mère et ma grand-mère qui se contentait de s’occuper de nous ». Ainsi, réfléchir en termes de répartition du temps sans aller au-delà et réfléchir comment intégrer les différents domaines de vie les uns aux autres a pu être générateur d’un dilemme, d’une charge mentale.

  • Ils demandent une vision intégrative en fonction de ses aspirations…vers le « leadership authentique»

Le socle d’un leadership ou d’actions authentiques réside bien dans l’analyse des domaines de vie, mais avant tout de trouver sa raison d’être afin de regarder dans chacun de ceux -ci

  • Les activités les plus alignées avec sa vocation de leadership
  • Le temps qui est consacré à chacune de ces activités
  • Une prise de conscience suivie de faits

L’issue de cette analyse permet d’identifier où la cliente investit son temps, et exprime son leadership. Cependant, elle ressentira peut-être des déséquilibres et des territoires sous-exploités, et l’enjeu sera de les repenser en fonction de sa vocation de leadership. En prenant l’exemple de ma cliente, elle veut travailler dans le bien-être sans que cette vocation ne contrarie sa vie de famille. Sachant qu’elle aime concocter des recettes pour le publier sur un blog, une des solutions aurait été de faire participer ses enfants aux recettes et demander leur avis quant à celle-ci. Par le biais de ce blog participatif, elle aurait pu toucher une cible de mères de famille, comme elle, qui souhaitait une alimentation plus saine et plus équilibrée pour leur famille.

  • Identifier les parties prenantes à son objectif

On le voit, les différents domaines de vie, familiaux, amicaux, sociaux, couple et travail, appellent à l’interaction avec différentes parties prenantes. Ce sont les personnes avec lesquelles on interagit quotidiennement, ou régulièrement dans nos différents domaines de vie. Il y a cette avec lesquelles nous :

  • Passons le plus et de temps,
  • Et/ou celles avec lesquelles on accomplit sa vocation de leadership.

Le but est d’identifier les personnes clés dans l’accomplissement de notre objectif ou de notre vocation. Si la question est difficile, le tout est d’identifier les personnes clés, et ce que l’on attend d’elle. L’objectif est de se questionner sur ses attentes et de se questionner sur le point de savoir ce que nos interlocuteurs attendent du client. Il s’agit de clarifier ses attentes. Dans l’exemple de ma cliente donné ci-dessous, on en était resté au stade des reproches dits à demi-mot quant à l’implication familiale du mari qui amorçait une nouvelle activité professionnelle. Expliciter ses attentes, même minimes vis-vis de lui aurait pu permettre à la cliente de trouver ses repères écologiques.

  • Un travail qui amène à repenser sa carte du monde professionnelle

Le but d’une telle méthode est ainsi de faire le pont entre les différents domaines de vie pourvu qu’ils servent notre vocation de leadership, c’est-à-dire sa volonté d’affirmation. L’objet est finalement d’aboutir à ce que la cliente qui le souhaite, repense une « carte du monde » propre à ses attentes, fluide et harmonieuse en abolissant les silos. Les problèmes de temps ne peuvent pas être abolis avec une telle méthode, et les tâches domestiques demeurent, mais l’idée est par exemple de mettre à profit son investissement dans l’association des parents d’élèves pour faire connaitre son blog ou sa page Facebook de recette, en discuter avec les autres parents, avoir leurs retours, etc.

Ainsi, pour les demandes y ayant trait, le coaching peut être le moyen idéal pour repenser son rapport au travail, qu’il soit professionnel ou domestique. En effet, le travail sur les domaines de vie, plus qu’une réalité et d’un désir de répartition du temps projeté doit permettre à la cliente de se rendre compte de son potentiel humain afin de vois les différentes opportunités nichées dans chaque domaine. En effet, quand une cliente demande à pouvoir exprimer sa vocation, ou à comprendre sa raison d’être, elle exprime un volonté d’expression de soi, et l’envie d’être reconnue, il s’agit bien de leadership.

2.3 Pour acquérir une posture de manageuse

L’affirmation de ses limites dans la vie professionnelle peut être perçue comme un signe d’affirmation de soi, de ses désirs et de son sens de la cohésion. Le contraire de la soumission aux décisions des autres est le désir de s’écouter soi, et d’agir. C’est un apprentissage qui part de la passivité vers l’affirmation. Lorsque nous n’affirmons pas nos limites, nous prenons le risque de subir les décisions des autres. Apprendre à renforcer ses limites c’est se préserver, s’affirmer, ne plus subir. Ainsi, une affirmation de soi et de son leadership dans le monde professionnel passe par l’expression de ses limites.

  • Travail de clarification : « Le manager est comme une maman »

À la suite de sa promotion, je n’aurai plus de nouvelles de la cliente, mais le cas me semble assez intéressant pour être soulevé. Une cliente désirait changer de posture professionnelle pour devenir manageuse au sein de son entreprise. À la question « comment définis-tu le manager », la cliente, mère de famille célibataire, décrit le manager comme une « maman ». Quand je lui demande de plus amples précisions, elle me répond que le manager c’est comme le « tuteur d’une plante », il est là pour que la branche ne se brise pas, et qu’elle puisse croître. La cliente me disait ainsi souhaiter accompagner se futurs collaborateurs à s’impliquer dans leur poste, à les motiver afin que l’équipe grandisse ensemble. Pour cette cliente être comme un « tuteur » signifiait la cohésion par la transmission au sein de l’équipe. Plus qu’une simple image, cette sémantique métaphorique ne renvoie-t-elle pas à une volonté de leadership authentique ?

  • Qui traduit le souhait de voir ses valeurs reconnues dans le monde professionnel

Clara (le nom a été changé) me dit vouloir retrouver un esprit de famille au sein de son équipe. La confiance et la transmission entre collègues sont une valeur importante pour elle. Clara fait tout pour se rendre indispensable auprès de son supérieur. Quand je lui demande pourquoi une telle volonté d’être indispensable, elle me répond qu’elle ne sait pas, mais quand dans sa vie de famille, en tant que sœur ainée, il lui a toujours incombé la responsabilité de ses cadets et que c’est peut-être cela qu’elle reproduit et elle me dit ne pas savoir dire non. Sans que nous n’ayons encore eu le temps de travailler sur les drivers, elle clôture la séance en me disant qu’elle allait dire « non » à son supérieur chaque fois que « la coupe s’apprête à être pleine », notamment en matière de collectes de données (ce qui n’était pas son poste). Mission accomplie la semaine d’après, séance durant laquelle elle me dit vouloir être plus explicite dans la façon de s’exprimer.

  • Exprimer ses limites c’est le respect de ses valeurs

La même semaine, Clara s’est positionnée sur un poste pour lequel elle disait être bien accueillie par les équipes, mais dissuadée par son responsable actuel, et la responsable des ressources humaines. Clara s’est affirmée et a tout de même postulé. Sa candidature a été validée pour le poste. Ceci démontre que Clara souhaitait étendre son leadership dans l’accompagnement des équipes et qu’elle était maintenant prête à s’affirmer pour cela. C’est-à-dire qu’elle mettait en œuvre sa vocation de leadership pour appliquer ce qui lui tenait à cœur, la transmission. Ainsi, le leadership intégratif c’est de savoir fixer des limites, celle qui nuit à notre bien-être. Il s’agit des limites aidantes. Mais aussi, comme le démontre cet exemple l’environnement attend que l’on pose ses limites afin de cerner à quelle personnalité il a affaire. Finalement, poser des limites a permis à Clara s’affranchir de tout ce qui lui coutait de l’énergie, la dispersait, et l’épuisait.

  • En exprimant son leadership, « c’est la personne qui fait le poste»

Ainsi que me la dit Clara, « c’est la personne qui fait le poste ». D’après son domaine de vie, le travail occupait une place importante et elle capitalisait ses efforts pour faire des ponts entre ses aspirations, sa vocation de leadership et sa vie professionnelle. Son activité professionnelle lui semblait plus alignée avec sa vocation de leadership (biais par lequel il s’exprime) et c’est l’activité qui lui demandait la plus de temps. Aussi, elle a su animer sa communauté de parties prenantes en affirmant ses choix, dans une logique de cohésion.

Ainsi dire « non », exprimer ses limites dans le monde professionnel est une démarche éminemment personnelle. Celle -ci est liée aux valeurs et aux besoins de la cliente qui s’autoreprésente. Dans l’exemple ci-dessus, personne ne pouvait juger de l’acceptabilité de demandes ne rentrant pas dans sa fiche de poste. Aussi, seule Clara pouvait affirmer se sentir en confiance pour assumer le poste auquel elle a été retenue. Dans cette expérience, le coaching a été le catalyseur positif des frustrations de la cliente qui a su les transformer en ambition.

2.4  …ou développer son activité entrepreneuriale

Les clientes entrepreneuses qui se sont tournées vers moi cherchaient à imprimer une vision mue par des valeurs cardinales pour ces dernières. L’entrepreneuriat faisait le lien entre leurs domaines de vie, mais se posait une thématique nouvelle : l’affirmation de soi par ses valeurs. Telles des leaders elles portaient une vision, mais l’accueil et la réception de ces dernière par les autres parties prenantes, soit la validation de leur leadership, semblait générer une crainte.

  • Sémantique maternelle qui traduit une forte emprise des valeurs

Natasha (le nom a été changé) est une entrepreneuse qui cherche à faire croître son activité dans le secteur tertiaire. Célibataire et sans enfants, elle se dit très attachée à l’impact social de ses activités (handicap, bien-être au travail, etc.).  Lorsqu’elle me dit que son entreprise est son « bébé », je la questionne et elle me répond que « oui, elle la façonne à sa manière ». En allant plus en avant dans la conversation, je comprends qu’elle a besoin de « quelque chose de sincère pour elle, de quelque chose qui l’éclaire, mettre en avant des choses émergées ». Je découvre ainsi que Natasha est à la recherche de sens dans ses actions, à travers son activité entrepreneuriale.

Natasha semble incarner son projet, en ce qu’elle souhaite que ses valeurs de

  • « Tolérance avec les gens » se reflète dans ses missions de recrutement
  • « Indépendance/autonomie » se reflète dans le fait que tout le monde a le droit d’être libre de ses choix
  • Respect, se reflète dans la tolérance que tout un chacun se doit de porter à l’autre

 

  • Par la « peur de se lancer », la crainte d’affirmer ses valeurs aux autres ?

Aussi me dit-elle que ses valeurs sont celles de son entreprise. Ainsi, en interrogeant Natasha sur ses besoins, elle dit avoir de l’ambition en étant sa propre patronne, car elle n’aime pas les contraintes. La réalisation de Natasha passe donc par un sentiment de liberté à assouvir. Cependant, en travaillant sur le registre des émotions, Natasha dit craindre de « passer à l’action », et de « s’affirmer » ce qui se produit souvent pour les choses qui lui tiennent à cœur. Lorsque je l’interroge sur le sentiment de perte associé à la peur, elle me dit qu’elle ne sait pas quoi répondre. Je butte en touche, pourtant c’est un phénomène que je note comme récurrent chez mes clientes, la peur de se lancer dans l’inconnu, ou de quelque chose de plus grand qu’elles.

  • Des émotions au diapason avec ses valeurs afin de guider ses domaines de vie

Toujours sur le registre des émotions, et en écoutant bien Natasha, elle me dit que le non-respect de ses valeurs par son interlocuteur peut la mettre hors d’elle sans que l’émotion de la colère soit mentionnée. Un peu plus tard dans la conversation, lorsque je lui demande ce que représente cette aventure entrepreneuriale, elle me dit qu’elle doit la « combler » en travaillant avec des clients qui adhèrent à sa proposition de valeur et ses valeurs. S’il faut « combler », c’est qu’il y a un manque. Le but n’est pas de retranscrire intégralement mes entretiens avec Natasha, mais je note que ma cliente s’emporte chaque fois qu’elle considère ses valeurs bafouées, celles-là mêmes qu’elle veut porter pour son entreprise qui doit combler un manque. C’est bien de reconnaissance dont il s’agit.

  • La validation de ces valeurs et de sa volonté d’impact pour les autres ou la recherche de leadership

J’en déduis que ma cliente souhaite imprimer ses valeurs, cardinales, dans son entreprise. Cette dernière doit être le miroir de son éthique, entendue comme les principes moraux à la base de sa conduite. Elle souhaite en outre proposer des services pour son entreprise à fortes dimensions sociales et trouver des clients qui y adhèrent. Ainsi, Natasha souhaite avoir un impact à connotation sociale chez ses clients et propose pour cela une vision, une proposition de valeur. Natasha souhaite imprimer sa vision, en sortant des sentiers battus de sa profession. En effet, elle ne compte plus seulement répondre à des appels d’offres, elle construit une offre à fort impact, sa proposition de valeur. Le client potentiel doit désormais reconnaitre cette dernière et y adhérer pour acheter les services de Natasha. Natasha cherche la reconnaissance de son leadership.

  • Le rôle du coach face à la peur d’affirmation de soi?

En tant que coach, je me suis rendu compte d’une dissonance avec ses croyances et sa volonté d’action, ce qui créait une tension désagréable pour ma cliente. En effet, elle aurait aimé accomplir plus d’action et plus rapidement, mais elle se disait confrontée à ses peurs. Le travail sur les émotions ne m’a pas mené sur les sentiers que je pressentais. En effet, il y avait « de la crainte » là où je pensais voir de la colère avec le terme « péter les plombs », « impulsion ». Une peur pour laquelle mon questionnement bottait en touche. J’ai alors pris le temps du silence pour me dire que c’est ma cliente qui connaissait le chemin, et de me laisser guider par son propre questionnement quant à ses insatisfactions. À moi d’adapter la convexité de mon regard de coach.

  • Face à la peur, travailler le contexte cognitif en profondeur

J’ai alors interrogé ma cliente sur les réalisations à venir concernant la création de sa société et comment elle le ressentait. Cela lui paraissait beaucoup jusqu’à ce que j’entreprenne un travail de renforcement en lui demandant notamment « beaucoup me sembla avoir déjà était accompli, je me trompe ? », etc. L’objet était, par un questionnement objectif, de faire en sorte que ma cliente sorte de son sentiment d’urgence et de peur afin de prendre du recul sur les actions des déjà accomplies. Pour résumer, le fait qu’elle

  • Puisse me répondre de quoi elle avait peur
  • Ne puisse pas me répondre pourquoi elle avait peur

Me faisait comprendre qu’il s’agissait d’un problème souche qui ne pouvait se résoudre qu’à partir d’un questionnement tendant à l’appeler à son objectivité, et par un léger travail de renforcement.

Je comprends que face à une personne qui construit son activité, face au statut de « bébé » revenu plusieurs fois dans mes entretiens, les domaines de vie sont souvent intégrés. En effet, les valeurs de la personne sont imbriquées dans son entreprise, et ces dernières portent un mode de vie et une vision. Cependant, une fois ce constat fait, se pose la question de l’affirmation de son leadership qui peut générer une crainte, voire une peur. Tout l’enjeu du coaching est de générer le contexte favorable à l’action.

3.   Indicateurs explicites d’un coaching structuré

Le coaching peut permettre un travail vers l’authenticité, perçue comme l’alignement de la personne à ses valeurs par le travail de questionnement, art rhétorique que le coach affute au fil de son expérience. En coaching les outils permettent de faire un point focus sur un nœud, afin de le défaire. Tout l’enjeu est de les utiliser à bon escient. Analyse, projection, recule, si l’écoute active (3.1), celle qui fera émerger la demande, reste le socle de la pratique, les domaines de vie permettent de cerner une problématique de gestion du temps (3.2) qu’il faudra surpasser (3.4), une fois l’objectif déterminé.

3.1 L’importance de l’écoute active pour ne pas s’identifier à sa cliente

J’ai choisi mes clientes sur la base du rapport collaboratif certes, mais aussi en fonction de mon écologie…je me suis tout simplement sentie plus à l’aise avec ces femmes. J’ai accompagné des femmes, individus aux trajectoires et ambitions diverses, et porteuses d’un passif culturel et social commun. Tout l’exercice de cette présente sous-partie est de synthétiser ma compréhension de l’écoute active, clé de voute de mon professionnalisme. En effet, tout l’exercice est alors de ne pas m’identifier à mes clientes.

  • L’écoute active c’est appréhender un récit subjectif donc qui a du sens pour le client

Comme le démontre Dominique Jaillon, coach et sociologue, dans la revue « le sujet dans la cité »[22], grâce à une lecture sociologique des parcours individuels, la pratique de l’accompagnement peut être l’occasion pour le sujet de souligner les influences, les héritages et autres « déterminations » qui infléchissent une histoire de vie. L’individu est relié au monde qui l’entoure, à une histoire le précédant, cependant il dispose de l’autonomie nécessaire à infléchir cette histoire. Le point de départ de la réflexion est que l’individu est relié au monde qui l’entoure, car il « ne peut pas vivre avec une vision morcelée des éléments constitutifs de son histoire », le récit donne du sens au vécu.

  • « Permettre le passage de l’expérience de soi à la conscience de soi »

En coaching, héritier de la dialectique, nous travaillons ce récit dont les évènements, éléments constitutifs sont orientés, interprétés, mis en ordre de façon à donner une image unifiée de l’existence et « permettre le passage de l’expérience de soi à la conscience de soi »[23]. Par exemple, si Sartre reconnait comme important le déterminisme dans la construction du sujet, sa liberté dépend néanmoins de la capacité de ce dernier à s’emparer de cette dernière. Ainsi « l’homme est d’abord un projet qui se vit subjectivement[24] ». Un client qui se présente à nous vient parce qu’il sent poindre la dissonance ou la frustration, et tient à prendre conscience de sa carte du monde et de l’emprise qu’il a sur sa vie.

  • L’écoute actives est un travail d’introspection et d’extrospection au service du client sur ses moments de vie

L’écoute active c’est inviter la personne accompagnée à raconter non pas l’intégralité de son histoire de vie, ce qui serait impossible, mais d’explorer celle-ci, en se concentrant sur les différents moments qui la constituent et en identifiant les évènements significatifs pour lui. L’écoute active c’est, par rapport à ces différents moments, développer sa capacité de prise de recul pour analyser la situation et construire des scenarii d’évolution afin de se mettre en action. Alors que le développement personnel se concentre sur la seule subjectivité du client, le pouvoir d’action prend aussi en compte sa relation au monde afin de développer l’emprise sur son histoire…lever ses freins. C’est un travail d’introspection comme d’extrospection : dans quelle société je vis afin de me permettre d’imaginer les marges d’action possibles.

  • L’écoute active c’est accompagner le client en fonction d’un contexte sociohistorique : le coach observateur de son époque?

Ainsi, l’individu vit une situation de coproduction de son identité individuelle et de son identité sociale. L’écoute active consiste en outre à accompagner le client à

  • observer le « territoire de la situation[25]» afin d’avoir une vue d’ensemble. Le travail de coproduction avec le coach consistera à explorer les différents angles de vision tout en hauteurs.
  • Analyser d’un point de vue systémique les éléments qui constituent la situation
  • Afin de comprendre à la lumière d’un contexte notamment social et politique de l’époque.

Expert de l’accompagnement individuel, le coach par les demandes émises, n’est-il pas observateur du contexte social de son époque ? La demande de femmes de « Concilier sa personnelle et sa vie professionnelle » n’est-elle pas due à l’entrée de celle-ci dans le monde du travail et d’un souci de contribuer à leur épanouissement ? D’ailleurs, le mot « épanouissement » qui fait 15 millions de résultats sur Google ne démontre-t-il pas une préoccupation sociale et contemporaine ? Pour répondre à ces deux questions, je crois que oui, et que c’est un appel à un espace d’écoute, propice à l’action, une prise de recule et une emprise sur sa subjectivité.

  • Un espace de subjectivité qui ne se fait pas sans cadre

Cependant, l’écoute active ne se fait pas sans cadre. En effet, si le coach est en position dite « basse » ou d’écoute la majorité du temps durant les séances, ce dernier est aussi le garant de l’espace de travail, tout aussi immatériel soit-il…il fixe le cadre et se pose alors en position haute, afin de définir les termes du contrat de coaching, ou se recentrer sur l’objectif par des interventions dites de recadrage. Le coach est donc le gardien du cadre et du travail de coaching. Pour cela, il doit lui-même aligner ses actes et ses intentions.

  • Neutralité, non-jugement et bienveillance…

Pour la sécurité du client, le coach doit entamer un travail sur lui-même, en analysant sa pratique par l’étude de cas de coaching, ou en s’impliquant lui-même dans le questionnement relatif à son accompagnement

  • Comment ai-je ressenti la séance ?
  • Comment je me suis senti avant, pendant et après la séance ?
  • Quels ont été mes émotions, mes comportements durant la séance
  • Etc

Le coach doit ainsi travailler son écologie afin d’accueillir la parole dans un espace neutre, sans jugement et bienveillant.

  • Afin de reconnaitre les situations de contre-transfert

Par exemple cela permet de tout de suite de prendre conscience d’une situation de transfert ou de contre-transfert. Si le transfert est une projection émotionnelle du client sur la personne du coach, le contre-transfert est la réaction inconsciente que ce dernier aura vis-à-vis de son client et en réponse à ce transfert. Très sincèrement je crois que lors d’une séance préalable laissant présager d’un bon rapport collaboratif, une de mes clientes m’a conté son histoire. Je sentais de l’émotion, et bien qu’il me semble y être parvenu, cela a été difficile pour moi de rester neutre dans mon attitude. Je devais garder ma posture professionnelle pour le bien de cette relation. Je comprendrai plus tard durant la séance que ma cliente n’attendait pas d’atermoiements de ma part, elle s’était construite avec ce passé douloureux, et elle en tirait la force de son parcours.

Pour reprendre la célèbre citation de Sartre, « l’existence précède l’essence » : si le contexte social, culturel, familial nous précède, nous avons la possibilité d’agir sur le cours de notre existence. Le coaching est une science qui se situe à la lisière de l’être et de son environnement. Le coach est un praticien qui doit pouvoir conscientiser, analyser et prendre du recul vis-à-vis de ses émotions, attitudes et comportements afin d’offrir un cadre neutre à son coaché. Ce dernier doit pouvoir venir avec ses bagages afin de les déposer, et les ouvrir dans un espace de bienveillance et de non-jugement, c’est-à-dire sans a priori de la part du coach, qu’ils soient positifs ou négatifs. Je ne sais pas si mes clientes se sont présentées à moi parce que je suis une femme, ce qui est sûr c’est qu’elles avaient toutes un objectif, une ambition de leadership et je les ai accompagnées. Quand moi, leur coach ; je les ai prises en processus parce que je me sentais bien dans le rapport collaboratif, mais je dois admettre que je me sens mieux avec des femmes. C’est une question d’écologie personnelle.

  • Les domaines de vie

Nous avons déjà longuement évoqué les domaines de vie dans la deuxième partie. Dans cette sous-partie, il s’agira donc de rappeler de quel outil il s’agit et de son contexte pratique.

  • Se rendre compte des différents pans de se vie

Les domaines de vie ont été pensées par Frederic Hudson, professeur et philosophe à l’université de Columbia et un éducateur. Il est considéré comme l’un des pères du coaching. Il est auteur de nombreux livres sur la transition et le changement. Il conceptualise la notion de « domaines de vie », au nombre de cinq :

  • Professionnel : Activités renvoyant à notre identité professionnelle, sources de revenus ou non
  • Familial : qui incarne le temps passé avec notre famille
  • Couple : temps consacré à notre partenaire, qu’il soit en notre présence ou non
  • Social : Temps passés avec les amis ou dans l’action bénévole
  • Personnel : incarne le temps consacré à notre bien-être (que cela soit des psycho-plaisir, physio-plaisir, socio plaisir, idéo plaisir)

 

  • Afin de cerner l’investissement et l’énergie dépensée dans chacun

Concrètement, il s’agit se rendre compte de l’énergie et de l’investissement dépensé dans chaque niveau de vie. Deux solutions

  • Soit le coach propose d’identifier les différentes activités liées aux cinq domaines de vie, par exemple en pourcentage de temps et/ou d’énergie consacrée
  • Soit le coach propose une représentation graphique en demandant au client de dessiner un cercle sur une feuille blanche et de représenter la part de chaque domaine de vie au sein de ce dernier. Le client visualise, et se rend ainsi compte de l’investissement consacré dans chaque domaine de vie.

L’analyse des domaines de vie ne s’arrête pas au constat. En effet il s’agit de se demander si cette répartition apporte satisfaction au client. Si la réponse est négative, il s’agit de réfléchir à la répartition souhaitée pour atteindre satisfaction et confort dans sa vie.

  • Changer l’inconfort que peut susciter un mode de vie

Les domaines de vie ont l’avantage de faire prendre conscience de l’inconfort que peut générer une situation ou un mode de vie. Ils permettent aussi la prise de conscience, déclic au changement. Il s’agit aussi de prendre du recul pour éviter de négliger certains pans de sa vie et permettre de prendre conscience de son mode de gestion de vie par le client. Lorsque j’ai fait cet exercice en coaching, les clientes m’ont dit à quel point l’outil leur permettait une prise de conscience de leur répartition et de leur mode de gestion de leur vie. Il s’agit d’un outil très intéressant pour prendre du recul.

  • Il faut cependant prendre garde à ne pas prendre les domaines de de vie comme des silos étanches

Cependant, comme mentionné dans la deuxième partie, le risque est celui d’une perception de domaines de vie comme des silos étanches, non reliés. Or quand une cliente demande à « concilier vie professionnelle et vie personnelle », ou encore qu’elle aimerait « consacrer plus de temps à sa vie personnelle », il arrive que certaines obligations soient incompressibles. Il faut alors chercher la raison d’être de ces actions, ce qui les motive afin que la cliente trouve le liant de ses activités et fasse les ponts qui lui paraissent judicieux. Je reprends ainsi, l’exemple de ma cliente qui aimait cuisiner et tenait un blog tout en souhaitant passer du temps de qualité avec ses enfants. Un questionnement sur la façon dont elle aurait pu mener de front ces deux éléments aurait peut-être conduit ma cliente à inclure ses enfants à la préparation de ses recettes, etc.

  • Savoir rester souple dans l’interprétation de ses clients

Aussi, je repense à une cliente qui me demandait si, pour l’exercice, la somme de ses investissements dans les différents domaines pouvait dépasser la somme de cent pour cent. Je lui ai répondu que oui, et j’ai découvert que le travail était intimement lié à sa vie sociale, familiale, etc. Qu’elle en faisait des ponts naturellement. Lui affirmer que pour l’exercice la somme de ses investissements ne pouvait dépasser cent pour cent aurait très certainement créé une charge mentale alors qu’elle avait un mode de fonctionnement intégratif de ses différents domaines de vie.

Pour les clientes que j’ai eu processus de coaching, les domaines de vie sont un excellent outil de prise de conscience et de prise de recul du mode de gestion de son environnement. Cependant, il vaut mieux éviter de voir ces derniers comme des silos infranchissables et étanches, notamment face à une cliente qui doit mener de front une double journée de travail et pour lequel le temps est souvent précieux et à capitaliser.

3.3 La ligne de vie

Là où les domaines de vie servent à découvrir les potentialités de son pouvoir d’action sur le cadre et le mode de vie, la ligne de vie, se focalise sur les évènements et concrétisations passées. L’objet de l’exercice peut être de se concentrer sur son pouvoir de rebond, comme outil de renforcement, ou/et permet de mettre en exergue un schéma de vie qui se répète.

  • La ligne de vie pour schématiser le récit du client dans son intensité

Là où le les domaines de vie permettent de trouver les ressources contextuelles, celui-ci permet de repérer ses ressources personnelles.

 

La ligne de vie des clientes, surtout maman, est en dents de scie. Les grossesses interrompent souvent le cours d’une vie professionnelle. J’en ai eu l’exemple avec une cliente qui avait toujours priorisé sa vie de famille, qui n’était pas sûre de ses capacités professionnelles, jusqu’à ce que la ligne de vie lui révèle le potentiel dont elle avait usé par le passé. Il était aussi intéressant de voir comment la ligne de vie semblait s’étirer ou s’écouter en fonction de la valeur accordée au moment. La valeur temps n’est y est plus rationnelle, elle se soustrait à la force de l’émotion ressentie dans un furtif ou extensible moment de bonheur ou de désarroi. Aussi, il est intéressant de noter que deux évènements identiques, peuvent ne pas être ressentis de la même manière. Dans l’exemple ci-dessus, la première rupture conventionnelle semble avoir eu plus d’impact sur la ligne de vie de la cliente que la deuxième. Tous ces éléments de représentation sont à interroger ainsi que les émotions associées.

3.3.2      Une ligne de vie pour donner du sens au vécu

La ligne de vie est considérée comme étant un exercice humaniste et systémique dans le sens où elle pose le parcours de vie comme un ensemble cohérent dans le but d’inciter et de développer le pouvoir d’action du client. Comme nous le disions précédemment, chaque individu dispose d’un passé, d’un présent et d’un futur, et, le récit de tous les évènements de notre vie. Donner un sens à notre vécu est donc fondamental pour grandir en tant que personne.

  • Les moments importants au centre du vécu

L’exercice consiste à tracer un axe de temps et à y inscrire les événements marquants, vécus positivement ou non. Normalement, une ligne de vie est composée :

  • Des moments vitaux comme la naissance ou le décès d’être chers
  • Moment significatif : ceux qui représentent un changement comme un déménagement
  • Des moments critiques ou des moments de pause : comme une période de chômage

L’accompagnement de ma cliente relevait d’un désir de changement professionnel, je lui ai donc demandé de débuter cette ligne de vie au début de leur vie professionnelle.

  • Un exercice spontané

Ce que j’ai pu remarquer en séance, dont le sujet était professionnel, c’est que les premiers éléments y étaient notés spontanément et que la cliente ne semble pas faire en sorte de « maquiller » les évènements qui les ont marqués positivement. L’exercice est intervenu lorsque le rapport collaboratif est bien instauré afin d’être honnête devant la feuille blanche, et la cliente avec elle-même, sans se laisser impressionner par ma présence de coach.

  • Ne devant pas faire oublier le travail d’analyse

Cependant, un travail sur la ligne de vie ne s’arrête pas au tracé de cette dernière. En effet, il faut approfondir les sens du chaque expérience, prise une à une, ce qui requière un grand exercice d’analyse est de réflexion en se demandant « Qu’est-ce qui a changé en moi après cette expérience ? Ai-je pu surmonter ce moment ? Et que m’a-t-il fait gagner ou perdre ? ». Le but de l’exercice est de faire de nos expériences, de notre vécu un tout cohérent à s’approprier. Je me rappelle une séance durant laquelle ma cliente déroulait sa ligne de vie. Elle y avait connu la perte d’un emploi, elle me racontait à quel point le moment était difficile avant de se rendre compte et de me dire que si elle n’avait pas perdu cet emploi elle n’aurait pas vécu l’expérience plaisante qui suivait sur la ligne de vie.

  • La ligne de vie pour s’interroger sur ses choix passés, présents et futurs

Le but d’une ligne de vie est d’approfondir les conséquences des évènements, et ce que je constatais sur la ligne d’une cliente maman est qu’elle plaçait la naissance de ces enfants sur cette ligne. Elle a pu constater que chacune des deux naissances ont engendré une rupture professionnelle directement (fin d’un CDD qui devait déboucher sur un CDI), ou indirectement, rupture du contrat pour élever et profiter de ses enfants. Ainsi, bien que l’objectif de la cliente puisse être circonscrit à la sphère professionnelle, celle-ci n’est pas étanche et la vie personnelle s’y inscrit plus ou moins discrètement. Accompagner sur le tracé d’une ligne de vie d’une cliente demandant « concilier vie personnelle et vie professionnelle » n’est pas anodin, c’est l’interroger sur les choix passés, présents et futurs.

Ma cliente avait donc une vie professionnelle en dent de scie, elle a pu voir comment elle avait réussi à concilier sa vie personnelle et sa vie professionnelles par le passé.

3.4 Matrice d’Eisenhower

La matrice d’Eisenhower est un outil de gestion et de priorisation de ses tâches qui peut être utile en cas de charge mentale énoncée par le client. Mais surtout, il permet de confronter la priorisation de ses obligations avec celles de ses valeurs ou de ses croyances, tout en préparant son action.

  • Qu’est-ce que la matrice d’Eisenhower

On doit le nom de cet outil au trente-quatrième président des Etats-Unis, Dwight David Eisenhower reconnu pour sa gestion du temps et sa productivité. Il aurait affirmé que « Ce qui est important est rarement urgent et ce qui est urgent rarement important ». Son secret serait une matrice qui permet de prioriser facilement et avec efficacité en fonction de deux axes : Importance et Urgence. Ceci permet de dessiner quatre quadrants distincts :

  • Premier quadrant : les tâches importantes et urgentes,
  • Deuxième quadrant : les tâches importantes, mais non urgentes,
  • Troisième quadrant : les tâches non importantes, mais urgentes,
  • Quatrième quadrant : Les tâches non importantes et non urgentes.

 

  • Les croyances sont en filigrane de l’exercice…

La combinaison du cadran urgent et important constitue la priorité première en termes de traitement. Les tâches ni urgentes ni importantes ne sont pas dans les objectifs prioritaires. Elles peuvent être abandonnées dans le cas où elles sont vraiment inutiles. Cependant :

  • Les choses urgentes et non importantes nous renvoient à nos croyances limitantes. En effet, il s’agit d’exécuter des choses urgentes, mais auxquelles le client n’attache pas d’importance. Dans le meilleur des cas, elles sont à déléguer. Mais surtout, elles renvoient à notre pouvoir de fixer des limites, de pouvoir dire « non » et de ne pas accepter une demande qui amplifierait de trop la charge mentale.
  • Les choses non urgentes et non importantes peuvent être rattachées aux petites actions du quotidien qui peuvent améliorer notre bien-être comme amplifier la charge mentale. Par exemple l’une de mes clientes avec l’habitude de regarder très régulièrement sa boite mail au travail, ce qui la rendait très réactive, mais aussi en proie en stress. Le fait de faire cet exercice lui a permis de fixer des moments précis dans la journée pour s’employer à cette tâche et évacuer cette habitude limitante.

Matrice d’Eisenhower, image Wikipédia

 

  • Et la priorisation des valeurs comme levier de nos actions

Comment mentionné dans la citation ci-dessus, les situations urgentes et importantes sont rares. Il convient donc pour le client de se focaliser sur les tâches importantes et non urgentes qui seront à planifier. Il est à note que ces dernières marquent un conflit de valeurs, il s’agit de choses qui n’ont pas été gérées tout de suite. Ce conflit de valeur est marqué par la question « que dois-je prioriser dans mes actions ? ». Je me souviens d’une cliente marquée par un driver « sois parfaite » et qui a procrastiné à faire une tâche qui était importante pour elle, jusqu’en ce qu’elle devient urgente. À la fin de nos séances, lorsque l’accomplissement de cette tâche, l’objectif global du processus a été effectué, elle m’a exposé que s’opposaient son envie de concrétiser ce projet important et la peur de sortir d’un environnement connu et quelque part sécurisant. Aussi, avec cette cliente j’ai utilisé l’outil en fin de processus dans un but de renforcement et d’autonomisation dans ses réalisations. Il s’agit par-là de prendre du recul en lui demandant comment elle situait l’objectif au début de nos entretiens, et m’assurer que les freins initiaux n’existaient plus.

Ainsi, l’outil permet une priorisation de ses actions, mais aussi une prise un certain recul par rapport à ces dernières. La matrice d’Eisenhower permet ainsi d’alléger la charge mentale d’un client stressé par la somme de ses activités ou de ses investissements.

Si nous pouvons qualifier l’écoute active de compétences, les – autres- outils sont une aide à la pratique. Ils permettent de structurer le cadre, recentrer le propos là où le récit de la cliente peut s’enliser dans des croyances pouvant être limitantes. L’approche qui peut parfois sembler ludique, et le cadre présenté de manière didactique font « relâcher la pression » et l’intellectualisation du propos. Les dissonances, celles que la cliente a du mal à conscientiser peuvent apparaître au grand jour, être verbalisées. Ainsi, sauf quelques rares outils (domaines de consciences, voire ligne de vie), il est conseillé d’avoir déterminé l’objectif avant de faire usage d’un outil de coaching. L’objectif est de cadrer les propos de la cliente qui n’est l’espace d’une séance, plus mère, plus manageuse ou plus cheffe d’entreprise, mais architecte de son pouvoir d’action. Les outils offrent un cadre structuré et privilégié pour revenir à la conception des fondations de son projet. Si celui-ci doit embrasser son environnement et en canaliser les variables (dont les freins à surpasser).

Vouloir affirmer son leadership, ce n’est pas être en quête absolue de réponses, c’est se permettre de se questionner. Interroger la raison d’être de son projet est tout aussi important pour la pérennité de son action que pour l’assentiment de cette dernière par le Groupe. Dans les processus que j’ai menés, j’ai toujours noté une volonté d’impact. Les outils, aident à interroger le « quoi », le « comment », le « pourquoi » dans un espace bref et circonscrit durant le processus de coaching. Leur parcimonie en fait la force de leur usage. Ils aident à défaire des nœuds afin que l’écho des interrogations devienne plus cristallin.

Conclusion

J’ai noté que mes clientes venaient moi avec un projet dont l’essence était de se réaliser professionnellement, et personnellement. Ce qui m’a étonné, c’est que leur projet portait souvent leurs valeurs et la volonté de reconnaissance de celles-ci. Dans une période de crises et d’incertitudes structurelles, nous sommes appelés au bonheur, par notre développement personnel et le dépassement de soi. Aussi, je ne pense pas que cela soit un hasard si la majorité des clientes en coaching sont des femmes. Parcours en dents de scie et propos récurrents tels que « je m’interroge sur ma légitimité » viennent parfaire mon idée que leurs vœux de réalisation passent par le développement de leur pouvoir d’action.

Le coaching au service du pouvoir d’action du client

Comme évoqué lors de la troisième partie, le pouvoir d’action est le fait que le client, à partir des données de sa carte du monde puisse influer sur les éléments extérieurs, alors que le développement personnel consiste à vouloir s’améliorer de façon tout à fait subjective. Si un point commun entre ces deux notions est que le sujet s’autocentre l’instant d’un moment, le pouvoir d’action s’inscrit bien dans un processus de reconnaissances des autres et du monde extérieur afin de pouvoir influer dessus, à sa mesure.

Le coaching intervient là où le politique s’arrête

En fait, la demande intervient auprès du coach là où le politique, les affaires de la Cité, s’arrêtent, afin de souvent résoudre une frustration. Par exemple la demande de « comment concilier vie familiale et vie professionnelle » ou « j’entreprends et j’aimerais être accompagnée » intervient lorsque les modes de garde trouvent leurs limites, ou le travail domestique ou entrepreneurial ne pas reconnus ou promus. C’est à cet interstice que le groupe social laisse le champ à l’individu, l’espace dans lequel il pourra atteindre ses objectifs personnels.

Des demandes de reconnaissance individuelles

Dans le cas de mes clientes, professionnelles ou entrepreneuse cet objectif passe par la reconnaissance de leur travail et de leurs valeurs. Elles tiennent ainsi à faire reconnaitre leur leadership authentique. Pour moi coach, cet élément marque le fait que le coaching est un biais pour développer son pouvoir de représentation à titre individuel par un travail sur les croyances, les besoins, les valeurs, les émotions notamment. Il aide à ancrer et aligner la personne avec son projet et ses objectifs.

Cependant, le coaching, pris dans son cadre d’exercice, parce qu’intervenant là où le politique s’arrête, et parce que mu par une exigence d’extériorité politique et cognitive, ne peut pas placer ces demandes à l’aune d’un prisme revendicatif. Le coaching est donc plutôt le catalyseur de demandes certes singulières, mais d’après mon expérience, souvent liée à une volonté de développement de son pouvoir d’action sur les évènements et d’une expérience sociale commune (ex. plafond de verre, rémunération inférieure à celle des hommes pour un même poste, etc.). Il s’agit d’une volonté d’agir dans un contexte d’incertitude social, politique et personnel.

Pour résumer, durant les séances, le coach est neutre dans sa posture, il procure un espace libre au développement du pouvoir d’action du client. La posture même du coach ne s’accorde avec la promotion du rôle social et professionnel de la femme que si elle interroge. Cette posture permet de reconnaitre un point commun à toutes ces demandes singulières : le pouvoir d’action sur les déterminants de sa vie. Il ne s’agit pas de les appliquer froidement, mais en ayant conscience du vécu de sa cliente.

Bibliographie

Livres

  • Valérie-Claire PETITSarah SAINT-MICHEL (2016)« HOMMES, FEMMES, LEADERSHIP : MODE D’EMPLOI » , PEARSON
  • Pierre Angel, Patrick Amar ( 2017), « LE COACHING », Que sais-je ?
  • Jean-Paul Sartre (1996), « L’EXISTENTIALISME EST UN HUMANISME », Folio
  • Sheryl SANDBERG (2014), « EN AVANT TOUTES», le livre de poche
  • Gill WHITTY COLLINS (2022), « LES FEMMES TRAVAILLENT, LES HOMMES TRIOMPHENT», Larousse
  • Stéphane SEIRACPQ (2019), « COACHER, 6 ÉTAPES POUR STRUCTURER SA PRATIQUE », InterEditions
  • Dora PANNOZO-MOCHON (2011), « COACHING DE FEMMES – FAMILLE, TRAVAIL ET IDENTITÉ FÉMININE», QUINTESSENCE
  • Julia de FUNES (2021), « DÉVELOPPEMENT (IM)PERSONNEL: LE SUCCÈS D’UNE IMPOSTURE », J’ai lu
  • Simone de BEAUVOIR (1986), « LE DEUXIEME SEXE », Folio Essais

Chapitres de Livre

  • Viola KLEIN (2016), « LE CARACTÈRE FÉMININ, CRITIQUE D’UNE IDÉOLOGIE», pages 21 à 47, L’Harmattan
  • Margaret MARUANI (2017), « Travail : le marécage des inégalités stagnantes », in « TRAVAIL ET EMPLOI DES FEMMES», La découverte

Articles

  • Marion Chapsal – interview réalisée par Chloé Bonnet – première publication le 24/10/2017 – Revue Euopéenne de coaching : https://revue-europeenne-coaching.com/numeros/n4-octobre-2017/coaching-au-feminin/
  • Jessica Gourdon – « Cinquante ans après son ouverture aux femmes, polytechnique reste un bastion masculin », Le Monde, 11 avril 2022
  • Dominique Epiphane – Les femmes dans les filières et les métiers « masculins » : des paroles et des actes, La Découverte | « Travail, genre et sociétés » 2016/2 n° 36
  • MARLÈNE SCHIAPPA – Le « plafond de mère », qu’est-ce que c’est ? HUFFPOST, 5 octobre 2016
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  • Sarah SAINT-MICHEL, Laurence LAFOSSE (2013), « II N’Y A PAS DE DIFFÉRENCE ENTRE HOMMES ET FEMMES EN MATIÈRE DE LEADERSHIP », in Entreprise & Carrières
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  • Sarah SAINT-MICHEL (2010) «LE GENRE ET LE LEADERSHIP – L’importance d’introduire les traits de personnalité des leaders », in Revue internationale de psychosociologie »
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  • Chantal MORLEY (2004), « MASCULIN/FÉMININ- Le genre des technologies de l’information », in Revue française de gestion
  • Irène JONAS et Djaouida SEHILI (2009), « L’ESSENTIALISME AU SERVICE D’UNE MIXITÉ ÉCONOMIQUEMENT PERFORMANTE », Cahiers du Genre n°47
  • Margaret MARUANI (2005), « HOMMES ET FEMMES AU TRAVAIL », Revue Projet n°287
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  • Georges DESVAUX et Sandrine DEVILLARD (2016), « WOMEN MATTER 2

LE LEADERSHIP AU FÉMININ, UN ATOUT POUR LA PERFORMANCE DE DEMAIN », in McKinsey & Company, n°2

  • Dominique JAILLON (2014),« Socioanalyse existentielle et accompagnement professionnel personnalisé » – revu « le sujet dans la cité » n°2014/1 aux éditions L’Harmattan

[1]https://www.coachfederation.fr/images/Communiqu%C3%A9s/FR_2016_ICF_Coaching_Study_Synth%C3%A8se.pdf

[2] Marion Chapsal – interview réalisée par Chloé Bonnet – première publication le 24/10/2017 – Revue Euopéenne de coaching : https://revue-europeenne-coaching.com/numeros/n4-octobre-2017/coaching-au-feminin/

[3] https://www.aufeminin.com/ma-psychologie/feminin-sacre-s4015537.html

[4] Le deuxième sexe, Simone de Beauvoir, Gallimard, 1949

[5] LE CARACTÈRE FÉMININ, CRITIQUE D’UNE IDÉOLOGIE – L’Harmattan | « Cahiers du Genre » – 2016

[6] Travail et emploi des femmes – Margaret MARUANI – la découverte

[7] Margaret Maruani, travaille : le marécage des inégalités stagnantes

[8] Femmes et hommes, l’égalité en question, Insee Références, Édition 2022

[9] Femmes et hommes, l’égalité en question, Insee Références, Édition 2022

[10] « Cinquante ans après son ouverture aux femmes, polytechnique reste un bastion masculin », Jessica Gourdon – Le Monde, 11 avril 2022

[11] LES FEMMES DANS LES FILIÈRES ET LES MÉTIERS « MASCULINS » : DES PAROLES ET DES ACTES, La Découverte | « Travail, genre et sociétés »

2016/2 n° 36

[12] « En avant toutes : les femmes, le travail, le pouvoir », Sheryl Sandberg, 2013, édition livres de poche

[13] Professeur en ingénierie mécanique à Cambridge.

[14] « Peut-on briser le plafond de verre » : Datavidéo  » Le Lab’  » Anne Boring, directrice de la Chaire pour l’emploi et l’entrepreneuriat des femmes à Sciences Po

[15] Le « plafond de mère », qu’est-ce que c’est ? HUFFPOST, 5 octobre 2016

[16] Women’s Forum for the Economy & Society, McKinsey & Company (2016)

[17] « Le genre et le leadership : l’importance d’introduire les traits de personnalités des leaders », Sarah SAINT-MICHEL

[18] L’ESSENTIALISME AU SERVICE D’UNE MIXITÉ ÉCONOMIQUEMENT PERFORMANTE Irène Jonas, Djaouida Séhili L’Harmattan | « Cahiers du Genre »

[19] LE GENRE ET LE LEADERSHIP L’importance d’introduire les traits de personnalité des leaders. Sarah Saint-Michel | « Revue internationale de psychosociologie »

[20] L’essentialisme au service d’une activité économiquement performante, Cahier du GeNre n°47/2009

[21] Le travail domestique : 60 milliards d’heures en 2010 – Delphine Roy, division Redistribution et politiques sociales, Insee N° 1423 – NOVEMBRE 2012

[22]Socioanalyse existentielle et accompagnement professionnel personnalisé »  – revu « le sujet dans la cité » n°2014/1 aux éditions L’Harmattan

[23] Socioanalyse existentielle et accompagnement professionnel personnalisé » – revu « le sujet dans la cité » n°2014/1 aux éditions L’Harmattan

[24] Jean Paul Sartre – « l’existentialisme est un humanisme » – Gallimard – 1996

[25] Dominique Jaillon

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