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Numéro 19 09/2024

L’apport du coaching auprès d’un professionnel de santé – Dans la prévention de l’épuisement professionnel

Morgane Babin

Coach certifiée par Linkup Coaching a débuté sa carrière en tant qu’éducatrice spécialisée en protection de l’enfance. Pendant 12 ans, elle a travaillé auprès de familles en difficulté, développant des compétences précieuses en écoute, empathie, gestion de crises et accompagnement au changement. À la suite d’un épuisement professionnel, Morgane a réorienté ses actions vers le bien-être au travail. Aujourd’hui, elle met cette expertise au service du coaching, offrant un soutien personnalisé aux individus et aux équipes, notamment dans les secteurs de la santé, du social et du médico-social.

Introduction

L’épuisement professionnel également appelé burn out, est à l’origine de nombreux arrêts de travail en France. Un article de l’observatoire de la compétence métier de janvier 2023 explique que selon l’Institut de veille sanitaire, 480 000 personnes en France seraient en détresse psychologique au travail et le burn-out en concernerait 7%, soit 30 000 personnes sur le territoire français. Une étude du cabinet Technologia révèle un chiffre bien plus inquiétant : 3,2 millions d’employés, c’est-à-dire 12% de la population active, présenteraient un “risque de burn-out [1].

Selon Floru et Cnockaert, pour l’organisation qui emploie des victimes de burn out et plus généralement pour la société, le burn out est coûteux sur le plan moral et matériel.[2]

L’épuisement professionnel touche tous les métiers mais a initialement été observé chez les soignants. Autrefois appelé « syndrome des professions d’aide », ce syndrome est assez répandu chez les médecins, dentistes, chirurgiens, psychiatres, infirmières, infirmières psychiatriques mais il a également été observé chez les travailleurs sociaux, les enseignants et les agents de police

Selon un article d’octobre 2022 de caducee.net, 98% des professionnels de santé subissent une souffrance au travail, et près de 78% d’entre eux ont été diagnostiqués en burn-out, et un peu plus de 71% ont envisagé une reconversion, la crise du COVID-19 étant en partie responsable de l’aggravation de ce phénomène.

[…] Le secteur souffrant déjà d’un manque d’attractivité, de fortes inégalités territoriales et faisant face à des difficultés de recrutement (notamment en province), est en tension avec, d’une part une hausse de la demande et d’autre part, une raréfaction des talents.[3]

Selon l’enquête annuelle sur les besoins en main d’œuvre (BMO), en 2021, le métier d’aide-soignant est le second métier le plus recherché, le métier d’infirmier figure parmi les 10 métiers les plus demandé et 80% des employeurs estiment avoir des difficultés à attirer les médecins.

 D’après la Direction de l’Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques (DARES), sur la période 2010-2015, 9 % des professionnels de la santé, de l’action sociale, culturelle et sportive ont changé de métier, contre 22 % des actifs toutes professions confondues.

Depuis 2022, le gouvernement lance une campagne pour inciter à s’orienter vers les métiers d’assistant de régulation médicale (ARM), d’infirmier, d’aide-soignant, de sage-femme, de manipulateur en électroradiologie médicale, etc. et tente de valoriser ces métiers.

De plus, selon une récente étude publiée le 8 juin 2023 par la Direction de la Recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), le personnel soignant souffre nettement plus de dépression et d’anxiété que les autres salariés. Le ministère de la santé reconnait que la cause de cette prévalence accrue est liée aux conditions de travail. L’étude met en cause les surcharges inhabituelles de travail, les incitations à ne pas prendre ou à repousser un congé maladie et les difficultés à concilier vie personnelle et professionnelle.

Ces phénomènes amènent une interrogation :  comment ces professionnels qui ont choisi un métier à vocation, de relation, de soins, d’aide, tournés vers l’humain et qui évoluent dans des établissements de santé qui inscrivent la bientraitance dans leur projet institutionnel, sont-ils les plus impactés par leur travail ? Et en quoi le coaching peut être bénéfique pour ces professionnels ?

Pour tenter de répondre à ces questions, il paraît nécessaire dans un premier temps de cibler le professionnel de santé et de dégager les problématiques rencontrées par le soignant pour comprendre en quoi il est le plus impacté par l’épuisement professionnel. Il conviendra ensuite de définir le syndrome d’épuisement professionnel et de comprendre les étapes et les facteurs qui conduisent à ce mal-être au travail.

Dans un second temps, après avoir défini le coaching, il sera démontré en quoi le coaching peut être au bénéfice d’un professionnel de santé, dans le cadre d’un accompagnement individuel, en prévention de l’épuisement professionnel.

1       Le professionnel de santé et l’épuisement professionnel

Ils ne s’effondrent pas parce qu’ils travaillent trop, comme on l’entend souvent, mais parce qu’ils travaillent coupés d’eux-mêmes, de leur talent propre, de leur possibilité d’expression. Si leur métier leur permettait de s’accomplir, ils pourraient travailler encore plus sans faire de burn-out[4]

Charles Pépin

Afin de comprendre l’intérêt du coaching auprès d’un professionnel de santé, il est important avant tout d’identifier le professionnel de santé et la nature de son travail, de décliner les problématiques auxquels il est exposé et qui favorisent l’épuisement professionnel. Ensuite, il est nécessaire de définir le syndrome d’épuisement professionnel, de savoir comment le prévenir et par quels outils, de décliner les causes de ce syndrome et les moyens de prévention recommandé et pour finir de présenter les dispositifs de prévention déjà existants.

1.1      Le professionnel de santé, qui est-il ?

Premièrement, il est nécessaire d’identifier le professionnel de santé.

Le code de la santé publique distingue trois types de professions de santé :

  • Les professions médicales : médecins, odontologistes, chirurgiens-dentistes et sage-femmes
  • Les métiers de la pharmacie et de la physique médicale : pharmaciens d’officine et hospitaliers et physiciens médicaux
  • Les auxiliaires médicaux : aides-soignants, auxiliaire de puériculture, ambulanciers, assistant dentaires, infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, ergothérapeutes, psychomotriciens, orthophonistes, orthoptistes, manipulateurs d’électroradiologie médicale, techniciens de laboratoire médicale, audioprothésistes, opticiens-lunetiers, prothésistes, orthésistes, diététiciens.

Ils exercent leurs activités dans des établissements publics ou privés, ou en libéral et constituent une population importante.

Le taux de satisfaction au travail et l’exposition au stress varient entre professionnel de santé en fonction de la nature de leur travail, de leur environnement de travail et de leurs caractéristiques individuelles. Ainsi, selon une étude de 2018, si 65 % de l’ensemble des personnels de santé sont satisfaits de leur travail, c’est le cas de « seulement » 54 % des hospitaliers (dix points de moins qu’en novembre 2017). Moins de la moitié des infirmiers et aides-soignants se disent satisfaits (46 et 41 %) quand les orthophonistes et masseurs-kinésithérapeutes prennent la tête du palmarès du bonheur au travail (82 et 78 %).[5]

Dans le questionnaire que j’ai réalisé et que j’ai transmis à plusieurs professionnels de santé sur « l’apport du coaching auprès des professionnels de santé » (cf. annexe III), à la suite du graphique 7, je les ai questionné sur leurs facteurs d’épanouissement au travail. 26 soignants sur 59 répondent librement que la relation au patient est importante pour eux, ensuite vient la sensation d’être utile (10 sur 59), le travail en équipe (9 sur 59) et la stimulation intellectuelle (7 sur 59).

En commentaire, une infirmière préleveuse témoigne « J’ai dû faire le deuil des services d’hospitalisation et de beaucoup de mes compétences techniques en étant affectée sur ce poste pour raisons de santé mais en fait j’y ai trouvé un réel confort perdu depuis longtemps : rééquilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ; contact avec les patients nettement moins entravé par la pression quotidienne des services de soin ; pas de Médecin constamment « sur le dos » a imposer ses exigences, son autorité voire ses sautes d’humeur ; meilleure autonomie dans la travail car petite équipe en fonctionnement interne au sein du Laboratoire de l’Hôpital ; gestion du temps plus adapté aux soins, dont le côté relationnel si important pour moi (fini le reproche d’ avoir des heures supplémentaires parce qu’on me reprochait une « mauvaise organisation » et de passer « trop longtemps auprès du patient ») ; plaisir du travail bien fait ; fierté d’être reconnue comme « bonne professionnelle de santé » (malgré le fait d’être une « Infirmière cassée »: reconnue comme travailleuse handicapée). »

Le travail du professionnel de santé consiste à soigner, à aider des personnes qui ont besoin de son assistance. En contact direct avec les patients, il est témoin de la souffrance, la détresse, la peur, la maladie, la mort. Il agit en faveur du bien-être du patient et pour certain professionnel de santé, leur responsabilité est tel qu’une mauvaise décision peut conduire à l’aggravation de l’état de santé du patient, voire à sa mort ce qui constitue un facteur de stress important surtout que s’ajoute à ce risque celui d’être accusé de négligence ou de faute professionnelle par le patient ou la famille.

Le risque de burn out augmente lorsque le contact avec le patient est stressant. Les facteurs suivants qui dépendent du patient peuvent aggraver le stress :

  • Type de problèmes du patient (sévérité de la maladie)
  • Catégorie de patients (handicapés, maternité, psychiatrie)
  • Pertinence des problèmes du patient pour le professionnel (la personne soignante qui s’identifie alors avec le patient)
  • Attitude passive et dépendante adoptée par le patient
  • Évaluation négative de la part du patient, plaintes, critiques, colère envers le personnel.[6]

Il est observé que le stress du soignant peut avoir une influence négative sur le patient et alors un cercle vicieux s’installe : lorsque l’état du patient se dégrade cela augmente le stress du professionnel de santé et impacte la qualité des soins. Le rétablissement des patients est possible notamment grâce à la qualité des soins prodigués par le personnel infirmier. Le bien-être de ce dernier, quant à lui, est possible grâce à la création de milieux de travail de qualité (Ohler et al 2010). Cette circularité illustre l’interrelation entre la santé mentale des infirmières et leur rôle décrit par Fountain, 2012.[7]

A l’action prolongée des stresseurs propres à cette activité professionnelle, s’ajoutent d’autres facteurs de contrainte liés aux conditions de travail (organisation, relations avec les collègues, etc.)[8] ce qui peut conduire à un état d’épuisement physique et émotionnel.

1.2      L’épuisement professionnel

Des liens existent entre satisfaction au travail, stress et épuisement professionnel.

Les travaux de recherches sur l’épuisement professionnel se multiplient et font naitre différentes définitions.

Après avoir défini ce syndrome, nous verrons comment le reconnaitre et par quel moyen de dépistage, quelles sont les causes, et comment prévenir ce syndrome. Enfin nous aborderons les dispositifs de prévention existants.

  • Définition

L’épuisement professionnel est un trouble psychique résultant d’un stress chronique dans le cadre du travail. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), il se caractérise par un sentiment de fatigue intense, de perte de contrôle et d’incapacité à aboutir à des résultats concrets au travail.

En 1974, le psychologue Herbert J. Freudenberger fait des premières observations d’épuisement chez les professionnels en santé mentale au contact de leurs patients. Selon lui, si à l’extérieur les personnes semblent plus ou moins intactes, leurs ressources internes sous l’effet de la tension se sont épuisées et elles ne sont plus en capacité de s’adapter.

Un peu plus tard, en 1976, le Dr Maslach définit le burn out comme un syndrome caractérisé par un épuisement émotionnel c’est-à-dire une sensation de surcharge émotionnelle et d’épuisement lors du travail avec d’autres personnes ; une dépersonnalisation qui se manifeste par une insensibilité aux problèmes d’autrui et un faible sentiment de réalisation personnelle qui s’exprime par une perte de confiance dans sa compétence et dans la réussite de son travail.

D’autres auteurs, comme Suzanne Peters et le Dr Patrick Mesters expliquent que  le burn out est successivement et en même temps, une perte progressive de l’idéal, de l’énergie et des buts au sein de certaines professions consacrées à l’aide aux personnes ; une maladie du surinvestissement dans des tâches qui exigent un dévouement humain important et un déséquilibre entre les ressources disponibles de la personne, ses valeurs, ses attentes et les exigences de l’environnement qui ne lui rend rien (ou si peu) en retour de l’investissement personnel.[9]

Cette décompensation est le résultat d’une exposition intense et prolongée à des situations émotionnellement exigeantes et d’une confrontation à des conflits intérieurs portant sur les valeurs personnelles de l’individu. Le burn out est l’expression d’une tension excessive entre l’idéal qui habite des êtres et les contraintes de la réalité qui restreignent la concrétisation.[10]

L’épuisement professionnel est l’une des conséquences des risques psycho-sociaux auxquels les salariés sont exposés. Les facteurs de risques recensés comme l’intensité et temps de travail, les exigences émotionnelles, la faible autonomie de travail, les rapports sociaux dégradés, le conflit de valeurs, et l’insécurité de la situation de travail génèrent du stress, de la violence internes (tensions, conflits, harcèlement…) et de la violences externes (insultes, incivilités, agressions, …). (Cf. annexe I- les risques psychosociaux)

1.2.2      Comment le reconnaitre et quels sont les outils de dépistage ?

L’épuisement professionnel se reconnait sous trois dimensions :

  • Un épuisement émotionnel c’est-à-dire l’incapacité pour le professionnel de santé à accueillir une émotion nouvelle, l’incapacité à exprimer ses émotions ou à les contenir, une fatigue extrême que ses jours de repos ou de congés ne suffisent pas à le restaurer, le sentiment d’être totalement vidé de ses ressources.
  • Une déshumanisation de la relation à l’autre caractérisé par une mise à distance de l’autre qui s’installe progressivement à l’insu du soignant, à un détachement vis-à-vis de son travail. Cette seconde dimension correspond en quelque sorte à un mouvement d’auto-préservation face aux exigences (émotionnelles) du métier auxquelles la personne ne peut plus faire face.[11]
  • Une perte de sens et l’accomplissement de soi au travail c’est-à-dire que le soignant a le sentiment de ne pas être efficace, surtout dans la relation à l’autre, il perd le sens de ses missions de travail, se démotive, culpabilise, se dévalorise.

Ces trois composantes s’influencent réciproquement dans le temps et ont des relations distinctes avec les conditions environnementales et les caractéristiques individuelles. Le burn out représente un aspect particulier et le stade le plus sévère du stress professionnel […] car les facteurs psychosociaux de stress proviennent plus spécifiquement de l’environnement de travail : l’état de stress résulte alors de l’interaction entre les agents stresseurs et les tentatives de l’individu à leur faire face[12]

Dominique Barbier, psychiatre français, schématise l’installation insidieuse du syndrome d’épuisement professionnel du soignant en 4 étapes :

Le burn out est défini comme un syndrome qui regroupe un ensemble de symptômes cliniques qui vont apparaitre progressivement chez le professionnel de santé sous cinq manières :

  • Des manifestations émotionnelles : perte de contrôle, humeur triste, manque d’entrain, irritabilité, hypersensibilité ou impassibilité.
  • Des manifestations physiques : maux de tête, vertiges, nausées, fatigue, trouble du sommeil, douleurs rachidiennes (dos, nuque), perte ou prise de poids.
  • Des manifestations cognitives : troubles de la concentration, de l’attention, de la mémorisation.
  • Des manifestations comportementales ou interpersonnelles : repli sur soi, comportement agressif ou violent, absentéisme, conduites addictives, automédication, conduites à risque, risques suicidaires
  • Des manifestations motivationnelles : désengagement progressif, effritement des valeurs au travail, dévalorisation de soi.

Ces manifestations ne sont pas propres à l’épuisement professionnel. Elles sont caractéristiques également à une exposition prolongée à plusieurs facteurs de RPS et à un stress chronique.

La spécificité du burn out est que ce syndrome touche les personnes qui ont de fortes attentes envers leur travail et pour lesquelles le sens donné à leur travail est primordial.

Cf tableau ci-dessous extrait du guide d’aide à la prévention du syndrome d’épuisement professionnel ou burn-out.

Plusieurs échelles de dépistage ont été développé ces dernières années. Le Maslach Burnout Inventory (MBI) mis au point en 1981 par Maslach & Jackson est le plus utilisé et permet d’évaluer les trois dimensions du burn out : épuisement émotionnel, déshumanisation et accomplissement personnel. (Cf annexe II- Le maslach Burnout Inventory pour les professionnels de santé)

D’autres questionnaire existent comme le Copenhagen Burnout Inventory, le Burnout Measure, le Oldenburg Burnout Inventory.

1.2.3      Les causes de l’épuisement professionnel d’un professionnel de santé

Le syndrome d’épuisement professionnel des soignants est un syndrome multifactoriel et multidimensionnel qui résultent de facteurs environnementaux et des facteurs personnels.

1.2.3.1 Les facteurs environnementaux liés au travail :

. La charge de travail et l’intensité

Dans le travail médical, le rythme de travail n’est pas linéaire : des périodes d’accalmie alternent avec des périodes de « pointes » sans que cela ne puisse s’anticiper. Le professionnel doit s’adapter à ce changement de rythme. Cette pression de devoir répondre aux demandes des patients dans un temps imparti augmente le risque d’erreur médicale et le stress du professionnel de santé qui a conscience de ce risque.

De plus, il est constaté en France un ratio de personnel insuffisant : selon l’agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), dans les unités conventionnelles, le nombre observé de soignants présents peut être de 1 pour 6, 8 ou 10 patients voire 12 ou même 14 patients le jour et de 1 soignant pour 16, 20 ou 30 patients la nuit. Toute activité professionnelle comporte des tâches, des responsabilités, des problèmes. Les exigences et les contraintes font partie de la vie au travail. La satisfaction d’un travail bien accompli récompense souvent l’effort déployé à la fois pour effectuer la tâche et pour faire face aux contraintes et pressions de l’environnement du travail. Dans la plupart des cas, il existe un équilibre entre les exigences et les contraintes d’une part et la compétence, la capacité physique et mentale du travailleur d’autre part : la charge de travail est alors considérée comme raisonnable. En revanche, lorsque la personne est incapable de faire face aux sollicitations soit parce que les contraintes sont excessives, soit parce qu’une usure chronique diminue les ressources disponibles, l’équilibre est rompu. Le déséquilibre profond et durable entre demandes et capacités caractérise l’état de stress lequel, en retour, a des conséquences sur le travail et les relations au travail.[13]

Comme indiqué en introduction, le secteur médical rencontre des difficultés de recrutement et les professionnels de santé en poste doivent régulièrement pallier l’absence de collègue.

Stéphanie, 54 ans, infirmière libérale, explique lors d’une séance de coaching que lorsqu’elle doit entamer ses 9 jours consécutifs de travail et qu’elle est seule à faire « sa tournée », elle appréhende de tomber malade car elle ne sera pas remplacée et que les patients auront néanmoins toujours besoin de soins.

Cette charge de travail élevée a des conséquences sur le professionnel de santé : l’enchaînement des tâches favorise la déshumanisation des soins, l’augmentation du stress, la multiplicité des rôles engendre un sentiment de perte de contrôle et un manque de clarté sur les priorités.

. Les exigences émotionnelles

Selon la nature de la tâche et l’environnement de travail, la sensation d’anxiété, de tension, de fatigue, d’épuisement varie parmi les différentes sous-catégories des professionnels du médical et il est donc difficile de toutes les distinguer. Le degré de gravité des erreurs potentielles, l’annonce de mauvaise nouvelles, la fréquence des décès, la confrontation à la souffrance, l’échec des traitements, l’agressivité des patients et des familles constituent une charge émotionnelle importante. Le professionnel de santé doit être dans l’empathie[14], à l’écoute du malade sans se mettre à sa place et être dans une distance relationnelle suffisamment bonne, car la compassion[15] serait inefficace et épuisante.

Dans une relation de soin, le soignant ne se contente pas d’effectuer un simple geste technique ou un simple échange de mots, mais il laisse, qu’il le veuille ou non, un peu de lui-même dans la chambre du patient.[16]

Ce métier relationnel expose le soignant à des risques de transfert et de contre-transfert.

La notion de transfert est issue de la psychanalyse et elle est inévitable dès lors qu’un individu est en relation avec une personne vers laquelle il projette une image ou un conflit inconscient.

Le transfert est une réaction affective inconsciente qu’éprouve le patient à l’égard du soignant.

Un transfert positif permet au patient de s’appuyer sur la certitude que le soignant connaît les réponses à ses questions et lui permet d’avoir confiance.

Un transfert négatif est au contraire nuisible à la relation thérapeutique et va se manifester par des sentiments d’hostilité, de colère, de rejet envers le soignant.

Seulement, le soignant peut également éprouver une réaction affective inconsciente à l’égard du patient et un contre-transfert s’installe. Le soignant réagit en résonnance par rapport à son histoire personnelle.

Le plus souvent le contre-transfert est positif, permettant l’établissement d’une relation empathique et une action thérapeutique efficace. Un contre-transfert excessivement positif risque de conduire à une identification massive au malade, à une perte d’objectivité dans le soin. Un contre-transfert négatif induit l’agressivité et frustration du malade et risque de mettre en échec la relation thérapeutique. Une absence de contre-transfert conduit à une froideur excessive.[17]

La spécificité de la relation soignant/ soigné expose également les soignants à des jeux relationnels éclairés par l’analyse transactionnelle et notamment par Stephen KARPMAN qui a déterminé le concept d’une triangulation de rôles interdépendants et co-existants qu’une personne peut endosser lors d’une même transaction : sauveur, victime et persécuteur.

Dans une relation d’aide, il est facile de se laisser aspirer dans ce triangle puisque les rôles de sauveur et de victime sont « partiellement » remplis. […] Il est persuadé qu’il DOIT aider même quand on ne le lui a pas demandé. Tôt ou tard, il devient inévitablement victime puisqu’il attend la reconnaissance qui ne vient pas. […] Le malade, la victime est soumise, elle subit les circonstances, elle souffre et se plaint. Elle attire l’attention du persécuteur ou du sauveur. […] Elle peut se rebeller face à une infantilisation provoquée par la trop forte assistance du sauveur qui la prive d’autonomie et prendre alors le rôle de persécuteur. »[18]

Enfin, la relation soignant/ soigné semble avoir évolué. Aujourd’hui, avec internet, le patient prétend en connaitre autant et parfois plus que le soignant et se renseigne sur de nouvelles techniques de soins.

De plus en plus de patients contrôlent, vérifient l’information et n’hésitent pas à remettre en cause la proposition du médecin. Cela peut amener à une crispation du médecin et/ou à une co-construction du parcours de soin ou de la prise en charge. Le professionnel de santé doit aujourd’hui faire avec cette nouvelle relation.[19]

  • Les mauvais rapports sociaux et relations au travail :

Le défaut de communication au sein de l’équipe, le sentiment d’injustice de planning, la mauvaise définition des fonctions, des missions et des responsabilités de chacun, les retards, les arrêts de travail fréquents ou l’absentéisme des collègues sont des stresseurs, qui, sur le long terme, précipitent le professionnel de santé vers un burn out. De plus, le soignant peut être sollicité pour pallier l’absence d’un collègue dans un souci de continuité de service ce qui a un impact sur son équilibre vie privée et vie professionnelle.

Les soignants qui exercent en institution sont impliqués dans un très grand nombre de relations. Les effectifs étant souvent élevés, il est difficile de s’entendre avec tout le monde et le quotidien devient un véritable exercice de composition où chacun doit y mettre du sien pour travailler en harmonie. [20]

Amélie, 43 ans, sage-femme coordinatrice à l’hôpital public, signifie lors d’une séance de coaching qu’elle a dû sur la période estivale réorganiser le travail lors d’un week-end où elle était d’astreinte. Pour pouvoir répondre à la demande et à un sureffectif de patients, elle a demandé à une sage-femme de changer d’unité afin d’apporter les soins nécessaires dans une autre unité, plus en difficulté. La soignante lui a reproché ce changement et l’a menacé d’en faire part à sa cadre habituelle. Amélie indique être décontenancée par la réaction de sa collègue qui va à l’encontre de ses valeurs d’entraide, de solidarité.

  • Les conflits de valeurs et la qualité empêchée

Une perception insatisfaisante de la qualité des soins auprès des patients et des proches, le manque de temps de concertation et de communication en équipe, la qualité et durée des transmissions, le climat de travail insatisfaisant, le fait d’être contraint à trier les patients faute de lit, engendrent un manque de motivation et une perte de sens. Cette perte de sens peut avoir pour conséquence une altération de l’estime de soi (honte, dégout de soi, culpabilité, remise en cause de son identité professionnelle, de ses valeurs morales, des motivations qui ont amené au choix de ce métier).

Le manque de reconnaissance, notamment salariale active également une perte de motivation.

Une infirmière libérale m’explique que leur secteur n’a pas eu de revalorisation salariale depuis 2009 et qu’elle se déplace parfois pour un acte de soins à 2,50€ brut.

1.2.3.2 Les facteurs individuelles

Des études montrent que certains facteurs favorisent l’émergence de l’épuisement professionnel.

  • Le caractère du soignant : pessimisme, anxiété, perfectionnisme, idéal du soignant élevé et un décalage entre ses attentes et la réalité du terrain ;
  • Une difficulté à concilier vie privée et vie professionnelle : difficulté à garder ses enfants, rupture ou conflit dans sa vie personnelle, deuil, retour de maternité, longue journée, les horaires décalés ou le travail de nuit et de week-end qui empêchent parfois la pratique régulière de sport ou de loisirs.

En séance de coaching, Amélie, la cliente sage-femme coordinatrice, explique lors d’une séance de coaching qu’il était plus facile pour elle d’équilibrer sa vie familiale et sa vie professionnelle avant de prendre son poste de cadre, du fait d’un rythme de travail alternant jour/nuit avec des compensations en jour de repos, qu’aujourd’hui avec ses horaires de « bureau » (9h- 18h30). Elle vit très mal le fait que ses enfants soient systématiquement les derniers à la garderie du soir.

Stéphanie, 54 ans, infirmière en libérale explique de son côté, lors d’une séance de coaching, travailler trois week-ends sur quatre et ne pouvoir tenir qu’une activité chant un soir par mois.

  • Des antécédents psycho-pathologiques.

1.2.4      Comment le prévenir ?

Des études ont permis d’identifier les facteurs favorisant l’émergence du burn out. La prévention du syndrome d’épuisement professionnel des soignants passe avant tout par l’information et la formation auprès des professionnels de santé de la connaissance de ces facteurs. Elle doit mobiliser de façon synergique et concertée tous les niveaux collectif et institutionnel et individuel. Les recommandations sont les suivantes :

La prévention au niveau collectif

  • Mettre en place des espaces d’échanges et d’expression en direction des soignants ou des patients au sein de l’institution, en direction des soignants hors institution, en direction des managers
  • Mettre en place des formations pluri professionnelles internes au service
  • Elaborer des projets collectifs
  • Favoriser la mobilité des personnels en tenant compte de leur demande
  • S’interroger sur le style de management
  • Encourager l’existence de soignants référents au sein des équipes
  • Intégrer la qualité de vie au travail dans l’élaboration des projets

La prévention au niveau institutionnel

  • Reconnaître le risque en repérant les facteurs environnementaux et en diminuant le stress perçu (organisation du travail, gestion du temps et des conflits, formation, projet de service, établissement de protocoles de soins), en définissant une politique de qualité de vie et de santé au travail
  • Communiquer, créer du lien par des groupes de travail, un management participatif
  • Mener une politique de gestion des ressources humaines en facilitant l’information et l’accès à la formation, en ayant une politique sociale (crèche, comité d’entreprise, structure de sport ou de relaxation dans l’institution, …), en initiant des programmes de formation continue sur la gestion du stress, le prendre soin de soi, en apportant son soutien aux managers
  • Former les directeurs, les médecins seniors et les cadres aux signes de souffrance au travail précurseurs.

La prévention au niveau individuel

  • S’interroger sur son positionnement
  • S’informer et s’impliquer dans les ressources institutionnelles et extérieures
  • Utiliser le soutien privé et professionnel
  • Se former

1.2.5       Les dispositifs existants pour accompagner le professionnel de la santé en prévention du syndrome d’épuisement professionnel

En termes de prévention portant sur l’environnement de travail, les actions peuvent être impulsés par l’employeur avec la collaboration du service des ressources humaines, le médecin et le service de santé au travail, et le CHSCT.

En plus de ces dispositifs internes, en prévention individuelle, le professionnel de santé peut solliciter :

  • Le Médecin généraliste : il a une vision globale de la personne et peut prescrire un arrêt de travail. Seulement, les soignants à forte valeur travail, vont difficilement se saisir de cette solution.

Dans le questionnaire transmis aux professionnels de santé sur « l’apport du coaching auprès d’un professionnel de santé » (cf. annexe III- graphique 6), 17 personnes sur 59 ont consulté le médecin du travail ou le médecin généraliste afin de faire part de leur problématique rencontrée dans le cadre du travail, soit près de 29% d’entre eux.

Reprenons l’exemple d’Amélie qui dit en séance de coaching « selon moi, je coche toutes les cases de l’épuisement professionnel ». Je lui rappelle alors la nécessité de prendre soin d’elle et l’invite à prendre rendez-vous avec son médecin traitant. Elle dit qu’elle ne veut pas solliciter un rendez-vous chez son médecin de crainte qu’il l’arrête car cela va mettre « son équipe » en péril.

Derrière cette préoccupation qui peut être regardée sous l’angle d’une conscience professionnelle se cache également la crainte de se trouver seule, à son domicile, face à soi-même et à du vide.

  • Un psychologue clinicien ou du travail : Le soignant peut solliciter le psychologue afin de bénéficier d’un rôle d’écoute, d’accompagnement et d’aide à la reconstruction lorsque le burn-out est installé ou post burn-out.

Dans le questionnaire transmis aux professionnels de santé sur « l’apport du coaching auprès d’un professionnel de santé » (cf. annexe III- graphique 6), seule 7 personnes sur 59 ont consulté un psychologue du travail ou clinicien afin de faire part de leur problématique rencontrée dans le cadre du travail, soit près de 12% d’entre eux.

Le Centre d’épuisement professionnel des soignants (PEPS) : exemple du CHU de Toulouse. Le centre a vocation de recevoir les personnels des établissements de soins publics ou privés, sanitaires et médico-sociaux de la région, et les professionnels soignants libéraux, adressés par leur médecin du travail, leur médecin traitant, leur psychiatre eux-mêmes pour prévenir l’épuisement professionnel. Le soignant ne peut pas faire de démarche individuelle.

Ce temps de prévention est différent selon chacun des cas :

  • Primaire : l’accompagnement du professionnel à risque, du fait de son activité et de ses caractéristiques personnelles
  • Secondaire : il s’agit de la prise en charge d’un burn-out
  • Tertiaire : l’accompagnement des professionnels, afin d’éviter une rechute et de permettre un maintien dans l’emploi.

L’intervention de différents professionnels de santé tels que des médecins spécialistes des pathologies professionnelles et environnementales, des psychologues (clinicienne ou du travail), des infirmières, des addictologues et des psychiatres permet d’offrir une prise en charge globale et adaptée. Le soignant doit se soumettre à une évaluation médico-psychologique pour pouvoir bénéficier d’une prise en charge individuelle ou collectives comme participer à des ateliers « développer ses ressources pour faire face à l’épuisement », « gestion du stress relationnel, des outils pour améliorer l’affirmation de soi. »

Ce centre est ouvert 6 jours sur 7, du lundi au samedi et un numéro est mis à la disposition des soignants pour prendre rendez-vous mais cela ne concerne que les soignants de la région Midi-Pyrénées.

  • Association soins aux professionnels de la santé : Créée en novembre 2015, Soins aux Professionnels de la Santé (SPS) est une association nationale reconnue d’intérêt général. Il est composé d’un groupe d’expert et son but est de venir en aide aux professionnels de la santé en souffrance au travail et aux étudiants et d’agir en prévention pour leur mieux-être.

Un numéro de service et d’appel gratuit est mis à disposition pour apporte run accompagnement psychologique anonyme et confidentiel 24h/24 et 7j/7.

SPS réalise des enquêtes, met en œuvre des actions et développe des outils pour améliorer la qualité de vie des étudiants et professionnels de la santé, prévenir et protéger leur santé. Elle organise des colloques sur comment redonner sens au travail par exemple.

Dans le questionnaire transmis aux professionnels de santé sur « l’apport du coaching auprès d’un professionnel de santé » (cf. annexe III- graphique 6), aucune personne n’a interpellé cette association ce qui peut être interprété par une méconnaissance de l’association.

2       place et apport du coaching auprès d’un professionnel de sante

 

C’est au contact d’autrui que l’homme apprend ce qu’il sait.

Euripide

 

Dans la première partie, il est démontré comment le professionnel de santé, par la nature de son travail, est plus à risque d’être sujet au syndrome de l’épuisement professionnel. Ce mal-être au travail a été défini, les étapes et les causes ont été détaillé et les actions de prévention ont été développé.

Si les moyens de prévention de l’épuisement professionnel se situe avant tout au niveau institutionnel et organisationnel, il est recommandé néanmoins au professionnel de santé de s’interroger sur son positionnement, c’est-à-dire avoir une réflexion sur ses motivations et son orientation professionnelle, clarifier ses valeurs et objectifs propres, avoir une capacité d’auto-analyse, de ressourcement, de connaissance de ses limites, etc. Aux vues de ces éléments, le coaching apparaît comme une solution adaptée pour permettre cette prise de recul.

 

Il convient alors dans cette seconde partie d’évoquer les fondements du coaching et son intérêt auprès d’un professionnel de santé.

2.1      Définition du coaching

Le coaching est un accompagnement qui permet à une personne, à une équipe ou à une organisation de faire évoluer ses compétences, d’améliorer sa connaissance de soi et sa performance par l’atteinte d’un objectif.

Dans le cadre d’un coaching individuel, le client va faire part auprès d’un coach d’une demande explicite dans « l’ici et le maintenant ».

Dans le respect de la charte éthique du coaching et du code de déontologie afférent, le coach va, dès les premières séances, clarifier la demande du client et chercher la présence ou l’absence de demande implicite, non-formulée. L’objectif de travail doit répondre à des critères précis afin d’établir un cadre de travail clair et des étapes planifiées afin d’amener le client vers son futur désiré.

Tout au long du processus, le client va bénéficier d’un espace de verbalisation, d’écoute et de questionnement qui va favoriser un éveil à la conscience de ses capacités. Il va mettre en réflexion ses croyances, identifier ses valeurs, ses besoins et mobiliser ses ressources pour se mettre en action et trouver lui-même des solutions. Cette alternance entre action et réflexion, encouragé par le coach, permet une mise en confiance, une autonomie et une responsabilité dans les changements que le client souhaite apporter dans l’ici et maintenant mais également dans le futur pour une meilleure cohérence entre son identité profonde et ses comportements.

« Le coaching professionnel se définit comme une relation continue qui permet au client d’obtenir des résultats concrets et mesurables dans sa vie professionnelle et personnelle. A travers le processus de coaching, le client approfondit ses connaissances, améliore ses performances. Grace à l’interaction qui s’établit avec le coach, le client clarifie ses objectifs et s’engage dans l’action. L’accompagnement permet au client de progresser plus rapidement vers l’atteinte des résultats qu’il vise, car la relation de coaching l’invite à se centrer sur ses priorités et à être conscient de ses choix. Le processus de coaching se concentre sur la situation présente du client et sur ce qu’il est prêt à mettre en œuvre pour atteindre ses objectifs futurs » (définition de l’International Coach Fédération)[21]

 

2.2      Les fondamentaux du coaching

2.2.1      Le rapport collaboratif

Le rapport collaboratif est la relation qui va s’établir entre le coach et le coaché et qui va permettre, grâce à la synergie de leurs intelligences respectives, d’atteindre un but commun.

Le rapport collaboratif doit être entretenu par le coach afin de favoriser une dynamique de changement.

Il est constitué de quatre composantes qui doivent être en équilibre :

  • Une relation empathique, c’est-à-dire la capacité du coach à se déplacer intellectuellement dans le cadre de référence du coaché afin de s’imprégner de sa réalité, et comprendre ses préoccupations sans ressentir ce qu’il ressent.
  • Une relation chaleureuse qui se traduit par l’accueil inconditionnel, sans jugement du coaché et par la bienveillance que le coach témoigne à l’égard du coaché.

Dans l’optique de Carl Rogers, c’est accepter l’autre tel qu’il est, comme un sujet en développement, non figé mais en devenir.[22]

Le coach va tenter d’adopter l’attitude la plus neutre possible

Croire que nous sommes neutres est donc un leurre : ce qui est neutre, c’est ce qui n’envoie pas de message et nous ne pouvons pas ne pas envoyer de message. Que nous le voulions ou non, que nous nous taisions ou pas, nous ne pouvons pas ne pas communiquer et donc nous ne pouvons pas ne pas influencer.[23]

Françoise KOURILSKY, psychologue, propose alors d’exercer une influence intègre, consciente des effets que le coach souhaite produire sur son client avec un notion d’éthique et de respect de son client.

  • Une relation authentique, ce qui signifie que le coach doit être lui-même, conscient de ses émotions, de ses sentiments, de ses pensées automatiques, de son énergie mais également conscient des jeux relationnels qui se mettent en œuvre au cours du processus de coaching (contre-transfert par exemple). Le coach a la capacité de s’auto-évaluer et d’évaluer dans le même temps la relation au client, en adoptant une « métaposition ».
  • Une relation professionnelle c’est-à-dire que le coach doit faire preuve de sérieux, de légitimité et suivre la charte déontologique du coaching.

 

Le coach, par un ensemble de savoir-être et de savoir-faire, va favoriser la mise en confiance du client pour lui permettre d’atteindre un objectif visé.

L’enjeu du coaching est souvent de dépasser, de s’écarter de la zone de confort du coaché afin de tester de nouveaux comportements, savoirs, attitudes, créateurs de progrès. Ce dépassement est encouragé et rendu possible par la relation au coach qui protège par ses interventions et stimule par la confiance qu’il témoigne au coaché.[24]

2.2.2      L’écoute active et bienveillante

L’écoute active est une technique de communication, initiée par Carl Rogers, essentielle et complexe pour le coach. Comme le mentionne Plutarque, On dit encore que la nature, nous donnant deux oreilles, et une seule langue, voulut nous obliger à moins parler pour mieux entendre.[25]

Elle consiste, pour le coach à développer une capacité d’observation en direction :

  • Du coaché, cette approche exige de témoigner d’une attention réelle et sincère à ce que le client a à dire en saisissant chaque message verbal, non verbal (gestes, postures du corps, expression du visage, réaction physiologique) ou paraverbal (voix, tonalité, rythme, débit) et de lui signifier qu’ils ont été entendus et compris. Cette attitude permet ainsi de créer un climat de confiance et favorise la libre expression du client.

Le coach sert de miroir et son écoute active lui permet de pointer les éléments clefs qui donnent une nouvelle lecture et une compréhension qui vont aider la personne à retrouver son moi profond, à se reconnecter à ses valeurs et à retrouver le sens de son métier.[26]

De plus, l’écoute permet au coach de se prémunir des conseils qu’il serait tenté de prodiguer au client.

Quand on s’est fait l’habitude d’écouter avec beaucoup de maîtrise et de réserve, on saisit, on retient ce qu’un discours a de bon et d’intéressant.[27]

  • De la relation coach/ coaché et d’identifier les transferts/ contre-transfert et les jeux relationnels qui se mettent en œuvre au cours du processus de coaching, d’évaluer constamment l’équilibre des quatre dimensions du rapport collaboratif.

L’écoute réelle implique de se dissocier de soi, c’est-à-dire d’adopter une « métaposition » pour mieux envisager l’ensemble de la situation interactionnelle[28]

  • Du coach, dans la relation authentique qui doit être préservée dans l’intérêt d’un rapport collaboratif de qualité, le coach doit être attentif à ses émotions, à ses sentiments, à ses pensées automatiques, à ses hypothèses. Il doit tendre vers un silence intérieur pour se libérer des parasites mentaux et être pleinement disponible à l’autre.

Quand nous sommes pleinement attentifs à l’autre, nous nous mettons inconsciemment en harmonie. Nous accédons mieux à notre intuition et nous utilisons mieux notre espace d’influence.[29]

2.2.3      Le processus de coaching

Le coaching est un processus d’accompagnement qui se décline en plusieurs étapes. Lors de ce processus, le coach doit être en position haute sur le cadre et en position basse sur le contenu.

Premièrement, lors d’un entretien préalable le coach va accueillir la demande du coaché et vérifier si elle peut être traitée dans une démarche de coaching. Il est à exclure, par exemple, un client qui est au cœur de l’épuisement professionnel. Ensuite, il va se présenter en tant que coach, mais aussi présenter le coaching, le code de déontologie, le cadre (établissement d’un contrat, nombre de séances, lieu, durée d’une séance, intervalle entre les séances, prix et modalité de paiement, modalité de contact entre les séances) et la règle des « 3 P ».

La règle des « 3 P » est issue de l’analyse transactionnelle. Patricia Crossman, collègue du psychiatre Éric Berne, a développé le concept d’une triade qui se compose de Permission, c’est-à-dire la liberté d’expression (« je dis ce que je veux ») et de Protection qui sécurise les propos par le principe de confidentialité, de respect, de non-jugement, de bienveillance, par le contrat, etc. Ces deux conditions réunies permettent la Puissance d’agir, de se mettre en action.

À la suite de l’entretien préalable, si le client décide de s’engager dans le processus de coaching, un contrat va être établi entre le client et le coach afin d’encadrer l’accompagnement.

Sur les premières séances, le coach va explorer les faits du contexte de vie du coaché, en relation avec sa demande en utilisant par exemple l’hexamètre de Quintilien (quoi ? qui ? où ? quand ? comment ? Combien ?) dans l’objectif de clarifier la demande du coaché afin de déterminer et formuler un objectif de coaching, clair précis avec des indicateurs de mesure.

Le Protocole de Formulation et de Détermination de l’Objectif (PFDO) fournit pour cela quinze critères qui permettent :

  • D’assurer la sécurité ontologique du client : l’objectif doit faire sens et être en cohérence avec ses valeurs, avec son identité profonde. L’objectif doit également être écologique, c’est-à-dire respectueux du client et de son entourage. Enfin, il doit être challengeant et source de motivation ;
  • D’assurer son autonomie c’est-à-dire que le client exprime de manière affirmative, précisément et clairement son objectif qui ne dépend que de lui ;
  • De définir un objectif contextualisé et d’assurer sa réalisation avec des critères d’atteinte spécifique, mesurables, atteignables, réalisables et définit dans le temps.

Tout au long du processus de coaching, le coach explorera par le questionnement, le présent du coaché, lui permettra d’identifier les ressources nécessaires à l’atteinte de son objectif mais également les obstacles, lui permettra d’identifier ses croyances, ses valeurs, ses besoins, lui permettra de déterminer des options potentielles dans l’atteinte de son objectif, d’élaborer une stratégie, et de s’engager et de renforcer sa motivation.

Le processus de coaching est marqué par trois principaux temps forts que sont :

– les premières séances où le rapport collaboratif se crée et l’objectif se détermine,

– la séance de mi-parcours qui permet au coaché de prendre conscience du chemin parcouru et de faire le point sur ce qu’il lui reste à mettre en œuvre pour atteindre son objectif

– la séance de clôture qui permet au client de faire le bilan, d’évaluer s’il a atteint ou non son objectif. Cette dernière séance permet également de clôturer le travail effectué communément entre le coach et le client et de se dire au revoir.

 

2.2.4      L’analyse transactionnelle (ou AT)

 

L’AT est née au Etats-Unis dans les années. Éric Berne est celui qui a modélisé l’Analyse transactionnelle dont les travaux se sont depuis étoffés.

L’AT a pour objectif de permettre à l’individu :

  • D’accéder à une plus large conscience de lui-même et d’agir en responsable de sa vie (autonomie) ;
  • D’être spontané, notamment dans l’expression de ses sentiments ;
  • D’être capable de proximité, d’intimité sincère franche et sans calcul ;
  • D’être capable de vivre des relations ok/ok, c’est-à-dire basée sur la confiance et le respect, plutôt que sur la méfiance et le rapport de force. Cf tableau[30]

Une personne épanouie et accomplie au sens de l’AT est une personne qui se sent « gagnante », autonome, capable de gérer sa vie et ses relations positives et assertive, c’est-à-dire capable de s’affirmer.

L’analyse transactionnelle est un outil de développement d’évolution personnelle, permettant d’élargir, de développer sa propre personnalité.[31]

 

La personnalité d’un individu est structurée sur 3 Etats du MOI (Parent- Adulte- Enfant) représenté comme suit :

 

 

L’individu échange, à partir de ces 3 Etats du Moi, des transactions (échanges verbaux ou non verbaux) avec les autres. Dans ses transactions apparaissent des jeux psychologiques où, en fonction de la situation dans lequel il se trouve, l’individu peut adopter un rôle de Persécuteur, de Sauveur ou de Victime.

L’Etat Parent est subdivisé en :

  • Parent normatif qui instruit les règles indiscutables mais qui agresse les autres- rôle de Persécuteur dans sa fonction critique ou dévalorisante
  • Parent Bienveillant ou Nourricier qui aide, encourage, soutient, réconforte mais surprotège, de sur-bienveillance – rôle de Sauveur qui empêche une personne de se prendre en charge elle-même ou d’apprendre à se prendre en charge.

L’Etat Adulte est celui qui informe et s’informe, qui réfléchit, qui analyse mais qui ignore ou ne prend pas en compte les ressentis et les émotions.

L’Etat Enfant est également subdivisé en :

  • Enfant Libre qui exprime spontanément ses désirs, ses sentiments
  • Enfant Intuitif (petit professeur) qui pressent la meilleure conduite à adopter sans être totalement soumis
  • Enfant Adapté Soumis qui respecte les règles sociales mais se soumet jusqu’à adopter le rôle de Victime dans une forme de dévalorisation de soi-même
  • Enfant Adapté Rebelle qui est agressif, règle les comptes de son enfance, est facilement destructeur des relations, des choses et alors Persécuteur.

Ci-dessous, Triangle dramatique de Karpman extrait du mémoire « l’apport du coaching auprès des professionnels de santé » de Patricia LITARDI

Il n’y a pas de transactions meilleures que d’autres

Dans la réalité, il faut cependant constater qu’il faut, par contre, bien dire que certaines transactions se révèlent plus adéquates que d’autres.[32]

Par le questionnement, le coach va amener le soignant à découvrir dans quel rôle il se situe et va l’amener à réfléchir à des stratégies pour adopter une position plus adéquate et développer de meilleures relations.

Amélie, 43 ans, sage-femme coordinatrice, a tendance à se dévaloriser, à regarder les autres avec admiration et se situe souvent en Enfant Adapté soumis. Elle doute d’elle, ne se sent pas à la hauteur ce qui est un frein pour elle dans le cadre professionnel car elle occupe une fonction de manager mais elle ne se sent pas légitime face à ses autres collègues managers et a tendance à ne pas affirmer son point de vue.

Il s’agit alors de remettre l’Etat Adulte en présence, c’est-à-dire de lui permettre d’analyser, de réfléchir sur son comportement pour l’amener vers du changement.

 

L’AT met en exergue que l’un des besoins essentiels des êtres humains est celui de recevoir des strokes positifs (compliment, caresse, reconnaissance positive) ou négatifs (coup physique ou psychologique, reconnaissance négative) et qu’ils préfèrent recevoir des strokes négatifs plutôt que pas de strokes du tout.

S’ajoute à ces éléments, des mots d’ordre ou drivers, c’est-à-dire des messages généralement transmis par l’Etat Parent de nos aînés et destinés à façonner notre Enfant Adapté[33]. Les drivers sont des leviers motivationnels mais peuvent également être des freins au développement et à l’épanouissement personnel car ils présentent tous des avantages et des inconvénients.

Taïbi Kahler publie vers 1970 un article concernant les drivers. Il en décrit cinq :

  • Sois parfait

Signification : faire les choses parfaitement, ne rien laisser au hasard, considérer tous les détails

Comportement : l’individu vit dans l’anxiété de ne rien oublier, recommence les choses plusieurs fois, est tendu, chercher à contrôler tout ce qui se passe, agit comme un « vrai bourreau de travail », très exigeant à l’égard des autres

Croyance erronée et destructrice : on peut faire les choses à la perfection.

  • Fais Plaisir

Signification : il vaut mieux être bien avec les autres et se montrer dévoué, aimable, gentil à leur égard

Comportement : l’individu agit pour satisfaire les autres, quitte à faire les choses qui ne lui conviennent pas, quitte à le regretter par la suite. Se frustre beaucoup lui-même pour ne pas décevoir. N’ose pas refuser, dire « non ».

Croyance erronée et destructrice : on peut faire plaisir à tout le monde.

  • Fais des efforts

Signification : il est important de montrer qu’on essaye avec acharnement.

Comportement : l’individu considère que les efforts montrés à faire quelque chose sont ce qu’il y a de plus important.

Croyance erronée et destructrice : si on fait des efforts, on finit par réussir.

  • Sois fort

Signification : être solide

Comportement : l’individu se montre réservé, ne montre rien de ce qu’il ressent, de ce qu’il pense.

Croyance erronée et destructrice : c’est important de faire croire qu’on est fort

  • Dépêche-toi

Signification : mieux vaut aller vite ou se montrer pressé que de prendre son temps

Comportement : l’individu court, s’agite, entraine les autres dans son tourbillon

Croyance erronée et destructrice : on ne fait bien les choses que vite.

 

Chacun se comporte dans la vie en manifestant tous les mots d’ordre (selon les circonstances et l’évolution personnelle) mais il y a un ou deux qui dominent[34]

En séance de coaching, il peut être intéressant que le coach permette au professionnel de santé d’identifier ses drivers pour que ce dernier envisage des permissions.

Amélie, par exemple, a un driver « Fais plaisir ». Elle prend conscience que ce driver l’empêche d’effectuer correctement son travail car elle accepte les tâches que ses collègues lui donnent dans le but de ne pas décevoir, quitte à effectuer plus d’heures de travail et à ne plus satisfaire sa valeur FAMILLE et BIENVEILLANCE car sa vie privée et sa vie professionnelle se trouve en déséquilibre et alors même qu’elle ne reçoit pas en retour de strokes positifs.

Le coaching porte alors sur les permissions qu’elle peut s’accorder. Amélie indique lors d’une séance qu’elle va partir un jour dans la semaine à 17h et que, dans la perspective de l’absence d’une collègue-cadre, elle va créer un outil de roulement d’astreinte avec les cadres restantes et leur soumettre, ce qui, pour elle, va faciliter l’organisation de l’absence et lui permettre de plus facilement dire « non » à leurs sollicitations.

 

L’AT apporte un éclairage sur les possibilités de changement de scénario de vie par le concept de redécision.

Chacun en redécouvrant dans sa propre vie le poids des injonctions qu’il a reçues, peut en effet redécider d’opter pour la mise en pratique des permissions- nouvelles- en lieu et place des injonctions limitantes qu’il découvre à l’œuvre en lui-même[35]

  

2.3      Le coaching au bénéfice d’un professionnel de la santé

2.3.1      Se recentrer sur soi pour retrouver de la cohérence, identifier ses Croyances, ses Valeurs, ses Besoins, ses Limites, ses Parasitages et ses Emotions (CVBLPE)

 

Le professionnel de santé se tourne vers un métier de soin, de relation et d’accompagnement souvent par vocation parce que ce métier véhicule des valeurs fortes qui correspondent à ses propres valeurs et à son identité.

Dans le questionnaire sur « l’apport du coaching auprès des professionnels de santé » (cf. annexe 3), 88,1% des professionnels de santé qui ont répondu estiment que leur travail correspond à leur identité (cf. graphique 8) et 21 professionnels sur 56 (soit 37,5%) considèrent que le coaching pourrait leur être utile pour se recentrer sur soi, pour retrouver de la cohérence et être en phase avec leur identité (cf. graphique 11).

 

Comme indiqué plus haut, il arrive que la perception du travail du professionnel de santé, son idéal se confronte à la réalité (cf. Les causes de l’épuisement professionnel d’un professionnel de santé). S’installe alors une perte progressive de sens et d’accomplissement de soi au travail.

La place centrale du travail dans la quête identitaire de la personne fait souvent de l’activité professionnelle un lieu d’enjeux forts où la question de la réalisation de soi se pose de façon aigüe. Cette recherche de sens est essentielle dans le coaching puisqu’elle est un facteur d’harmonisation, et d’alignement des croyances et des valeurs du coaché qui, en retour, a un impact favorable sur sa performance.[36]

En accompagnant un professionnel de santé dans un processus de coaching, le coach va alors lui proposer d’identifier ses valeurs par un atelier qui consiste tout d’abord à sélectionner, spontanément, 10 valeurs parmi une liste suggérée. Cet exercice permet une prise de recul, une centration sur soi et une réflexion. Une fois que le soignant a procédé à des choix, le coach lui indique de hiérarchiser les valeurs entre elles, c’est-à-dire de comparer la première valeur avec la seconde, la seconde avec la troisième et ainsi de suite, afin de ne retenir que les cinq premières valeurs. Le coach veille à intervenir le moins possible, même lorsque le client se questionne sur le sens d’une valeur pour ne pas l’influencer et laisse le silence s’installer afin de favoriser cette centration sur soi. Enfin, le coach questionne le professionnel de santé sur le sens des valeurs qu’il a retenues (« quel sens donnez-vous à ce mot ? qu’est-ce que cela signifie ?»), sur le besoin qu’il associe à ces valeurs (« qu’est-ce que cela vous apporte ? »), sur ce qu’il agit pour nourrir cette valeur (« que mettez-vous en place pour répondre à votre besoin ? ») et ses émotions (« que ressentez-vous quand … ? »).

Ce travail d’identification de ses valeurs, de ses besoins, de ses émotions, proposé dès les premières séances de coaching et mis à jour tout au long du processus, permet au coaché de repérer sa cohérence et sa congruence.

Comme l’indique Timothy GALLWEY, Pour bien vivre, il me semble nécessaire d’arriver à se construire un équilibre intérieur, ce qui implique de commencer par reconnaître qu’il existe un moi intérieur avec ses besoins propres.[37]. Il ajoute Ses besoins se rappellent à vous par une pression douce, mais constante. Chaque fois qu’un individu agit en accord avec ce moi, il ou elle se sentira contenté. La question fondamentale est de savoir quelle priorité accorder à ses demandes par rapport aux pressions extérieures.[38]

Ainsi, en séance de coaching n°2, Amélie, fait le choix de ne retenir que trois principales valeurs qui sont la FAMILLE, la BIENVEILLANCE et l’EXEMPLARITE. Après avoir identifié ses valeurs, Amélie fait le constat qu’elles ne sont pas suffisamment nourries et pleure. Elle explique, par exemple, que souvent, elle fait le choix de rester plus longtemps au travail même si elle ressent de la culpabilité à constater que sa fille, scolarisée en primaire, est la dernière à la garderie. Par cet exemple, ses trois valeurs sont affectées car pour elle la FAMILLE « doit passer en priorité » car « c’est son roc, son cap », que la BIENVEILLANCE signifie « le respect de l’humain, de l’autre, de ses valeurs et de celles des autres » et que pour elle, cette dernière valeur est en lien avec l’EXEMPLARITE car Amélie a envie d’être exemplaire pour ses filles.

Sur tout le processus de coaching, le coach s’appuie sur ce travail d’identification des valeurs et des besoins pour favoriser la cohérence et la congruence du client et le questionne « rappelez-vous de votre valeur FAMILLE, que mettez-vous en place à ce jour pour nourrir cette valeur ? »

A partir de ce travail, le coach questionne le professionnel de santé sur les limites et les parasitages : « Qu’est-ce qui vous empêche de… ? » « Quels avantages avez-vous à continuer comme cela ? », « Qu’est-ce que cela vous coûte ? », « Est-ce que vous voulez continuer ? Est-ce que vous voulez changer ? », « Est-ce que ce changement est bon pour vous ? Pour votre entourage ? » « Souhaitez-vous poser des limites ? Lesquelles ? Comment concrètement pensez-vous faire ? »

Pour reprendre l’exemple d’Amélie ci-dessus, après ce questionnement, et après pris conscience que l’allongement de son temps de travail ne lui permettait pas d’être plus efficace décide « demain, je finis à 16h30, je vais chercher ma fille à la sortie de l’école et on prends le goûter au bord de la rivière. » Cette mise en action va nourrir ces trois valeurs essentielles pour elle.

De même, tout au long du processus de coaching, le coach est attentif aux croyances que le client verbalise lors des séances.

Les croyances sont des certitudes tenues comme vraies (sans avoir pris la peine de les vérifier) et sur lesquelles nous construisons notre stabilité intérieure. Elles nous sont indispensables pour diriger notre vie […]. Si les croyances sont des constructions nécessaires pour assurer notre compréhension du monde, elles peuvent devenir nuisibles au fil du temps, inadaptées à la réalité du monde. […] Lorsqu’elles sont limitantes, les croyances nous enferment à l’intérieur de frontières de pensées qui nous fragilisent.[39]

Le coach va repérer les croyances dites « aidantes » du soignant sans venir les interroger car elles sont motrices pour l’individu. En revanche il va interroger les croyances dites « limitantes » qui sont un frein à son épanouissement dans le but de créer une dissonance cognitive et permettre au professionnel de santé de reconsidérer sa vision de la réalité.

Une croyance est dite limitante dès lors qu’elle génère des prédictions d’échec ou qu’elle freine les possibilités de la personne en l’empêchant d’utiliser de façon constructive les données présente.[40]

Nos comportements dépendant largement de nos croyances, elles-mêmes construites à partir de nos expériences, vécues ou empruntées. Or les croyances qui limitent nos comportements peuvent être modifiées par la vertu du recadrage notamment, et c’est par ce biais que nos comportements évolueront le plus rapidement.[41]

Selon Paul Watslawick, John H. Weakland et Robert Fisch […] Recadrer signifie modifier le contexte conceptuel et/ou émotionnel d’une situation, ou le point de vue selon lequel elle est vécue, en la plaçant dans un autre cadre.[42]

Dans le processus de coaching, Amélie est bloquée dans l’atteinte de son objectif qui est « Je veux fournir un réussir un travail de mémoire de DU où je me suis donné les moyens. » Amélie a constitué un questionnaire mais elle n’ose pas l’envoyer à son tuteur de mémoire afin qu’il le valide car elle estime qu’elle aurait dû lui adresser ce travail deux mois auparavant. Elle prend conscience de sa logique comportementale et du fait que sa procrastination vienne du fait qu’elle a peur car elle pense que son travail n’est pas satisfaisant. (CROYANCES     PENSEE             EMOTION              COMPORTEMENT). Amélie pense que son tuteur va lui demander de refaire son questionnaire, qu’il va lui faire une réflexion sur le fait qu’elle aurait dû rendre ce travail en juin, etc. Cette croyance est limitante pour elle et la bloque dans l’atteinte de son objectif. Avec un peu d’humour et de provocation et parce que le rapport collaboratif est de qualité, je questionne alors la cliente « Waouh, comment vous faites pour savoir ce que votre tuteur pense ? ! ». La cliente me regarde, sourit et verbalise « oui, c’est vrai, c’est ce que je me dis mais ce n’est pas la réalité parce que je ne suis pas dans la tête de mon tuteur. »

2.3.2      Identifier ses ressources et retrouver confiance en soi

Lorsqu’un professionnel de santé subi un épuisement professionnel, l’image qu’il a de lui-même va être impactée : il perd confiance en ses capacités, doute de ses compétences, culpabilise de n’avoir pas su poser des limites, de n’avoir pas su déléguer, de n’avoir pas su dire « non », etc.

Le coaching professionnel permet, par l’écoute active et bienveillante, par le questionnement, et à l’aide de certains outils d’identifier ses ressources et de retrouver confiance en soi.

Avant tout outil, c’est la posture du coach et son savoir-être qui sont un facteur de puissance pour permettre au soignant de retrouver confiance en soi. En effet, l’attitude bienveillante et positive du coach à l’égard du client, le non-jugement et les croyances dans ses capacités et dans ses ressources sont vecteurs de changement.

Renouer avec une saine estime de soi et la bienveillance est donc une priorité pour prévenir efficacement la survenue d’un burn out[43] 

Dès la première séance de coaching, le coach explore par le questionnement les ressources du coaché pour lui permettre d’atteindre son objectif : « quelles ressources avez-vous déjà ? (Connaissances acquises, compétences, motivation, soutien familial, soutien hiérarchique, moyen financier, etc…) »

Le SCORE, développé par Robert Dilts est également un outil complet pour permettre à la fois à un client de déterminer un objectif, d’identifier ses ressources, ses valeurs, ses besoins, de prendre du recul et de se projeter vers l’avenir. Cet atelier est proposé lors de l’une des trois premières séances. Le coach installe 5 feuilles au sol, comme suit :

Le coach invite alors le coaché à se déplacer de case en case et questionne :

  • SITUATION : « Que se passe-t-il pour vous aujourd’hui dans votre contexte professionnel ? ». Le coach peut à ce moment utiliser l’hexamètre de Quintilien afin de préciser le contexte « Quoi ? Qui ? Où ? Quand ? Comment ? Combien ? »
  • CAUSES « Quel a été le facteur déclencheur ? » « Quel regard portez-vous sur cela ? »
  • OBJECTIF : « Vers quoi aimeriez-vous aller ? Que voulez-vous atteindre ? »
  • EFFET : « qu’est-ce que cela vous apporte ? comment vous sentirez-vous ? en quoi cela répond-il à vos besoins ? (Croyances, Valeurs, Besoins, Limites, Parasitages et Emotions) »
  • RESSOURCE « Quelles compétences avez-vous déjà ? De quelles ressources disposez-vous selon vous ? de quoi avez-vous besoin pour atteindre votre objectif ? »

Enfin, le coach invite le professionnel de santé à faire un pas en arrière et questionne « si vous prenez un peu recul, que pensez-vous de tout ce que vous avez dit ? ».

Un autre outil qui permet d’identifier ses ressources et de retrouver confiance en soi est les « Domaines de conscience » conceptualisé par Grégory Bateson car il projette le professionnel de santé dans une situation qu’il désirerait profondément se trouver. Tout comme l’outil SCORE, le coach se place légèrement en retrait par rapport au coaché et lui demande de s’avancer sur des cases imaginées ou matérialisées et questionne :

  • ENVIRONNEMENT : « Où êtes-vous ? Pouvez-vous me le décrire précisément ? Que voyez-vous ? Que ressentez-vous dans cet endroit ? A quel moment ? etc. »
  • COMPORTEMENT : « Que faites-vous ? qu’êtes vous en train de faire ? »
  • CAPACITES : « Quand vous faites-cela, de quoi êtes-vous capable ?  Quelle capacité vous mobilisez ?»
  • VALEURS/CROYANCES : « En quoi c’est important pour vous ? Qu’est-ce que cela vous apporte ? Et plus encore ? Que croyez-vous au sujet de ces capacités ? »
  • IDENTITE : « Qui êtes-vous quand… ? Qui vous sentez-vous être ? »
  • APPARTENANCE : « Quelle contribution apportez-vous aux autres ? Quelle est votre mission ?»

Le coach note les propos du client et demande à la fin au professionnel de santé de se retourner. Il lui fait une restitution case par case en l’invitant, par un geste de la main, à faire le chemin-retour. Cette restitution par le coach permet au soignant un ancrage

Cet outil est proposé à Amélie dans l’intention de lui permettre de lever un blocage, de développer et renforcer sa motivation. En effet, Amélie n’ose pas envoyer un questionnaire à son tuteur de mémoire, nécessaire à l’avancement vers son objectif de coaching « Je veux fournir un réussir un travail de mémoire de DU où je me suis donné les moyens. » Amélie manifeste des signes de tensions corporelles au début de l’atelier, elle touche ses mains, sa mâchoire est crispée. Elle se visualise stressée. Après avoir avancé pas après pas et après avoir identifié toutes les cases et notamment sa contribution, il est constaté un changement d’attitude corporelle : ses épaules s’affaissent, elle sourit et semble détendue. Amélie dit être sereine. Il est alors plus facile pour elle de concevoir une mise en action « vendredi prochain, je ne travaille pas, je relirai mon questionnaire puis je l’enverrai à mon tuteur par mail en mettant ma collègue en copie »

 

Enfin « la ligne de vie » et le travail sur « le scénario de réussite » qui suit est également un outil puissant pour permettre au professionnel de santé de prendre conscience de ses compétences et de retrouver confiance en soi.

Dans cet atelier, le coach propose au coaché de tracer une ligne qui représente sa ligne de vie à partir de ses 18 ans, par exemple, jusqu’à ce jour et de la prolonger dans le futur sur les cinq années à venir. Ensuite le coach donne pour consigne de tracer des sommets au dessus de la ligne de vie représentant des périodes d’accomplissement personnel, de réalisation en indiquant des dates, des lieux, des personnes importantes et des vallées en-dessous de la ligne de vie qui représentent des périodes de doute, de repli sur soi. L’objectif de cet outil, dans l’intention d’identifier ses ressources et de retrouver confiance en soi, est de prendre conscience de ce qui a été accompli. Une fois cet exercice effectué, le coach propose d’observer plus précisément chacun des sommets et questionne le professionnel de santé :

  • ENVIRONNEMENT : « où étiez-vous ? »
  • COMPORTEMENTS « que faisiez-vous ? »
  • RESSOURCES, TALENTS, COMPETENCES « de quoi étiez-vous capable ? «
  • VALEURS ASSOCIEES, CROYANCES POSITIVES ?
  • VISION POSITIVIE QUANT A L’IDENTITE
  • PLAISIR ASSOCIE, BESOINS SATISFAITS, MOTIVATIONS ?

Cet atelier est proposé en cinquième séance de coaching à Sandra, une femme de 53 ans, en arrêt maladie depuis deux ans pour épuisement professionnel. Sandra repère deux grands sommets dans sa vie mais trace surtout de nombreuses vallées. En ce concentrant exclusivement sur ces deux sommets, l’exercice permet effectivement à Sandra d’identifier ses ressources et ses compétences mais il est surtout intéressant de constater des effets de l’exercice entre les séances. Associé au travail sur les croyances, Sandra signifie en séance 6 avoir repensé à l’exercice au moment où elle a redécouvert ses journaux intimes. Ainsi elle a reconsidéré sa ligne de vie avant ses 18 ans et a pris conscience de nombreux sommets. Sa perception de la réalité s’est modifiée « c’était écrit noir sur blanc « j’ai passé une journée merveilleuse » et j’avais votre voix dans ma tête et je me disais « j’ai été capable de faire tout ça ! » ». Cet exercice a permis à Sandra de retrouver de la confiance en elle, et de l’énergie pour se mettre en action pour faire ce qu’elle aime faire : archiver des documents pour remettre les choses à leur place (et retrouver une place.)

2.3.3      Mieux gérer stress et pression au travail : entre le contrôle et le lâcher-prise

A la lecture du graphique n°11 du questionnaire sur « l’apport du coaching auprès d’un professionnel de santé » (cf. annexe III), une meilleure gestion du stress et de la pression au travail est la première problématique pour laquelle les professionnels de santé indiquent que le coaching leur pourrait être utile. (32 personnes sur 59 soit environ 54%)

Les causes de l’épuisement professionnel d’un professionnel de santé ont été explicité plus haut (cf. partie 1-2-3) et N. COMBALBERT & C.RIQUELME-SENEGOU indiquent que Le burn-out est donc causé par la confrontation régulière à des aspects professionnels stressants. Les professionnels sont amenés à déployer des stratégies afin de faire face. On parle alors de stratégies de coping (ou stratégie de « faire face »).[44]

Même si le professionnel de santé est confronté à des stresseurs communs avec ses collègues, liés à l’environnement de travail, il n’aura pas les mêmes stratégies pour y faire face car ses ressources internes lui sont propres.

Face à un professionnel de santé qui interpelle sur cette problématique particulière et après avoir clarifier sa demande, déterminer un objectif, identifier ses valeurs, ses besoins, ses ressources et ses croyances associés à la problématique, le coach peut lui proposer d’évaluer son niveau de stress sur une échelle de 0 à 10 « A combien situez-vous votre stress actuel ? Que veut dire cette note pour vous ? A combien aimeriez-vous être ? »

Puis il peut proposer un atelier nommé « la balance du stress » qui consiste à inviter le professionnel de santé à dessiner sur une feuille un grand plateau et d’y mettre sous forme de représentation, dessin, nom, volume, etc. les exigences actuelles de son environnement. Le coach lui demande ce qu’il a représenté.

Sur une seconde feuille, le coach propose au soignant de dessiner un second grand plateau sur lequel il va inscrire les ressources à sa disposition et qu’il peut mobiliser pour répondre aux exigences de son environnement.

Le coach invite à rapprocher les deux plateaux et interroge le client sur la perception qu’il se fait de l’équilibre ou du déséquilibre entre les deux.

Un aide-soignant occupant un poste de maître de maison dans un EPHAD a accepté de se soumettre à cet exercice. Il manage une équipe de 7 soignantes dans une unité de 28 résidents.

Le soignant a une perception plutôt équilibrée de son état de stress. Je lui demande alors s’il pense pouvoir agir sur certains stresseurs et repère effectivement « des zones d’influence » pour améliorer l’équilibre de sa balance.

Pour poursuivre sur la gestion du stress, le coach peut ensuite proposer l’outil de « la capacité maximale d’absorption. »

Le coach explique au client qu’on a tous à l’intérieur de nous une « bouteille » dont on ne peut modifier la taille. En revanche, il est possible de modifier le contenu, de la vider un peu ou de la remplir.

Le coach demande au client de dessiner un récipient sur une page entière puis d’y indiquer son niveau de stress actuel. Le coach invite ensuite à compartimentez, sans hiérarchiser, des couches de stresseurs qu’il identifie.

Le coach demande ensuite au client d’ajouter le niveau optimal, celui qui correspond à la deuxième note de l’échelle du stress et interroge « qu’avez-vous besoin d’enlever dans cette bouteille pour arriver à cela ? »

Le coach explore avec le professionnel de santé chaque couche identifiée « A quoi cette couche correspond-elle ? C’est où ? Cela se passe quand ? Avec qui ? Est-ce que cela agit comme un moteur pour vous ou comme un frein ? Cela arrive-t-il régulièrement ? Combien ? et depuis combien de temps ? Sur quelle intensité ? Sur quelle durée ? Quelle est votre sensation par rapport à cela ? ».

Le coach peut inviter le client à classer ces stresseurs selon deux zones distinctes : la zone impact où il peut agir et la zone hors impact qui ne dépend pas de lui. Le coach interroge alors « Qu’est-ce qui dépend de vous ? Qu’est-ce qui ne dépend pas de vous ? ». Selon Timothy Gallwey, Votre stabilité se développera à mesure que vous apprendrez à accepter ce que vous ne pouvez pas contrôler et à contrôler ce qui dépend de vous.[45]

Le professionnel de santé peut ainsi situer par lui-même s’il a le pouvoir d’agir sur ces stresseurs et de mener un plan « d’action-confort » qui permet de diminuer l’impact négatif des stresseurs.

Le coach interroge son client : « A l’éclairage de ce travail, que voulez-vous enlever ? »

Se libérer du stress n’implique pas forcément de renoncer à quelque chose, mais plutôt d’être capable de cesser de s’y accrocher s’il le faut en sachant que tout ira bien malgré tout. Cette libération est possible quand nous apprenons à être plus indépendant, ce qui ne veut pas obligatoirement dire plus solitaire, mais plus capable de ne compter que sur ses ressources intérieures pour assurer sa propre stabilité.[46]

 

2.3.4      Planifier des tâches, définir leurs priorités, évaluer leur faisabilité en fonction des ressources et des limites du soignant

 

Rappelons qu’une charge de travail élevé engendre un sentiment de perte de contrôle et un manque de clarté sur les priorités. Le professionnel de santé se sent dépassé, a l’impression de faire un travail de mauvaise qualité, est insatisfait du travail fourni.

Le manque de temps souvent ressenti, associé à un manque de moyen met le professionnel de santé dans un état de stress (cf. annexe III- graphique 5).

Face à cette problématique, la « matrice d’Eisenhower » est un outil qui peut être proposé en coaching afin de permettre au professionnel de la santé de mieux gérer son temps et être plus efficace et lui permettre de poser des limites et apprendre à « dire non ».

En séance de coaching, il est proposé au soignant de prendre une feuille et dessiner un tableau comme suit :

Le coach tend quatre feutres de couleurs différentes et invite le professionnel de santé à inscrire dans chaque case, les tâches qu’il a à réaliser (maximum 10) en les hiérarchisant :

  • En vert, les tâches urgentes et importantes.
  • En jaune, les tâches pas urgentes et importantes
  • En bleu, les taches urgentes mais pas importantes
  • En rouge, les taches pas urgentes et pas importantes.

Le coach précise qu’une tâche urgente est celle à réaliser impérativement, et qui engendrera des conséquences si elle n’est pas effectuée dans le délai imparti. Cette tâche est inévitable et le niveau de stress augmente à mesure qu’elle est retardée. Une tâche importante n’est pas prioritaire mais participe à l’atteinte d’un objectif à long terme.

Un fois que le client a effectué cet exercice, le coach explique que la case n°1 correspond à ce qu’il a à faire, que la case n°2 est ce qu’il a à planifier, la case n° 3 est ce qu’il peut déléguer, et la case n°4 est ce qu’il peut éliminer.

 

2.3.5      Préserver un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle

 

Dans le questionnaire transmis aux professionnels de santé (cf annexe III), seulement 7 professionnels sur 59 répondent ne jamais avoir rencontré de déséquilibre entre vie personnelle et vie professionnelle (soit près de 12% d’entre eux) ce qui signifie qu’un peu plus de 88% d’entre eux ont été confronté à cette problématique. (cf graphique n°5). En commentaire, un soignant interroge « le travail un week-end sur deux toute l’année, que pourrait apporter un coach à cette problématique ? ».

En effet, le coach n’a pas le pouvoir de modifier une organisation de travail, en revanche, un coach peut proposer à cette personne qui dit vivre « un roulement de travail inadapté vie pro, vie perso » d’explorer ses « domaines de vie » pour lui permettre de situer la part relative dans sa vie professionnelle par rapport à sa vie amoureuse (le temps pour le couple), à sa vie personnelle (le temps pour soi), à sa vie familiale (le temps pour les proches), à sa vie sociale (amis, évènements, sorties, …), etc.

Cet outil permet une prise de conscience d’une situation donnée et d’un futur désiré afin de déterminer un objectif.

Afin de mesurer l’investissement et l’énergie mis dans les différents domaines de vie, le coach propose au professionnel de santé de dessiner un cercle puis de les représenter de manière intuitive, sous la forme d’un camembert (A).

Le coach interroge alors « souhaitez-vous conserver cet équilibre ou bien faire évoluer les choses ? Quelle nouvelle répartition vous conviendrait mieux ? Souhaitez-vous apporter davantage de cohérence, de congruence entre ces différents domaines ? »

Puis le coach propose de refaire le même exercice un deuxième camembert (B) en représentant cette fois son futur désiré.

Le coach demande au client de comparer les deux représentations et de développer un plan d’action pour passer de A vers B et qui correspond de façon plus juste à ses valeurs, ses besoins, ses croyances, etc.

Stéphanie, 54 ans, infirmière en libérale, réalise cet exercice lors d’une séance de coaching. Dans son futur désiré, elle aimerait apporter du changement sur la part « personnel » et diminuer la part « professionnel ». Stéphanie dit qu’actuellement elle s’accorde 45 minutes par jour de temps de lecture et deux heures par mois de chant bien-être. Elle souhaite mettre en place une à deux fois par mois un temps bien-être (massage, reiki par exemple) et reprendre une activité yoga une fois par semaine mais que pour cela elle doit planifier c’est-à-dire « bloquer » des temps dans son agenda.

Cet outil peut aussi se présenter sous la forme suivante :

Le coach explique au client que chaque cercle de la roue représente l’indice de satisfaction du plus petit au plus grand. Il demande au client d’évaluer de façon spontanée, par une croix rouge ses domaines de vie, tel qu’il se les représente au moment de la séance dans « l’ici et le maintenant ». Ensuite, le coach invite le client à tracer un point vert sur cette même roue qui correspond à l’indice de satisfaction que le client souhaiterait atteindre pour un meilleur équilibre de vie. Le coach invite le client à prendre conscience du résultat. Quels écarts observe-t-il ? Que faudrait-il modifier ? Que faudrait-il arrêter ? Que faudrait-il prioriser ? Que faudrait-il déléguer ?

Conclusion

Les professionnels de santé font partie des professions les plus impactés par le syndrome de l’épuisement professionnel de part la nature de leur travail.

Ils sont soumis à une charge de travail élevée qui augmente leur niveau de stress et le risque d’erreur médicale, à un enchaînement des tâches qui favorise la déshumanisation des soins et à une multiplicité des rôles qui engendre un sentiment de perte de contrôle et un manque de clarté sur leur priorité.

L’implication du soignant dans une relation d’aide et de soins le soumet à des situations émotionnelles importantes. En plus d’être confronté à la souffrance, la maladie, la mort, le soignant doit faire face à des patients et/ou à leur famille parfois exigeants et intransigeants.

Leur dévouement et leur valeur, qui les ont orientés vers ce choix de métier, ne suffisent plus pour supporter les exigences environnementales et trouver du sens et de la motivation, ce qui peut avoir des conséquences sur l’estime de soi.

De plus, les problèmes de recrutement dans le secteur et la nécessité de pallier l’absence de collègue dans un souci de continuité de soins impactent l’équilibre vie privée et vie professionnelle et renforcent le sentiment d’un déséquilibre entre l’implication et l’engagement personnel et le manque de reconnaissance professionnel.

Des dispositifs existent pour accompagner en individuel le professionnel de santé en prévention du syndrome de l’épuisement professionnel. Il est recommandé, entre autres, au professionnel de santé de s’interroger sur son positionnement.

Le coaching professionnel apparait alors bénéfique pour permettre au professionnel de santé de prendre du recul et faire évoluer ses compétences, améliorer sa connaissance de soi et sa performance.

En effet, le coaching apporte tout d’abord une écoute active et bienveillante où le soignant, dans un travail collaboratif avec le coach, peut s’exprimer et se recentrer sur soi pour retrouver de la cohérence en identifiant ses croyances, ses valeurs, ses besoins vers un meilleur alignement.

De plus, le coaching permet d’identifier ses ressources et de les mobiliser pour reprendre confiance en soi, en ses capacités et ses compétences.

Par le coaching, des outils de gestion du stress peuvent être proposés au professionnel de santé afin d’appréhender différemment la pression au travail et développer des stratégies pour y faire face. De même que le coaching peut permettre au soignant de planifier des tâches, définir des priorités et évaluer leur faisabilité en fonction de ses ressources et de ses limites.

Enfin, le professionnel de santé peut, avec le coaching professionnel, trouver un meilleur équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle et ainsi prévenir l’épuisement professionnel.

Aux vues de ces éléments, le coaching apparaît être complémentaire à un suivi thérapeutique ou médical, pour prévenir l’épuisement professionnel du soignant.

Néanmoins, le coaching professionnel auprès des professionnels de santé doit gagner en popularité. En effet, dans le questionnaire transmis aux professionnels de la santé, 69,5% des professionnels de santé ne connaissent pas le coaching professionnel (cf annexe III- tableau 9). Xavier Florian, travailleur social, dirigeant associatif et coach- consultant certifié indique dans un article publié sur LinkedIn le 6 février 2016 que bien que les apports du coaching soient aujourd’hui très largement reconnus dans le monde de l’entreprise, cette pratique s’est très peu répandue au sein des organisations non lucratives (associations, fondations), en particulier dans le secteur sanitaire, social et médico-social.[47] 

De plus, des représentations véhiculent autour du coaching professionnel et même si 49,2% des soignants qui ont répondu au questionnaire estiment que le coaching pourrait leur être bénéfique, certains craignent en commentaire que cela les amènent à démissionner.

Il s’agit alors de présenter le coaching et de faire valoir son intérêt auprès des professionnels de santé en proposant par exemple, des interventions dans les écoles d’infirmières, d’aide-soignante, les facultés de médecine.

 

Annexes

BIBLIOGRAPHIE

Livres

PIERRE BLANC-SAHNOUN (2023), Comment rétrécir un dragon sans se brûler les ailes, Interéditions

– RENE DE LASSUS (1993), L’analyse transactionnelle, une méthode révolutionnaire pour bien se connaître et mieux communiquer, Marabout

TIMOTHY GALLWEY (2022), Le jeu intérieur du tennis, Editions Eyrolles

FRANCOISE KOURILSKY (2004), Du désir au plaisir de changer, Dunod

CHARLES PEPIN (2018), Les vertus de l’échec, Pocket

PLUTARQUE (1995), Comment écouter, Rivages poche

PIERRE ANGEL & PATRICK AMAR (2005), Le coaching, Que sais-je ?

COMBALBERT, N. & RIQUELME-SENEGOU C (2006), Le mal-être au travail, Presse de la Renaissance

– SUZANNE PETERS & Dr PATRICK MESTERS (2008), Le Burn out comprendre et vaincre l’épuisement professionnel, Marabout*

– DOMINIQUE PICARD & EDMOND MARC (2013), l’école de Palo Alto, Que sais-je ?

 

Articles

 

– BARBIER, D. (2004). « Le syndrome d’épuisement professionnel du soignant » in La Presse Médicale, 33(6), 394-399.

– BOIVIN-DESROCHERS, C., & ALDERSON, M. (2014). « Les difficultés/souffrances vécues par les infirmières: stratégies permettant de préserver leur santé mentale, leur sens au travail et leur performance au travail »in Recherches en soins infirmiers, (3), 85-96.

– COLOMBAT, P., DAUCHY, S. & MACHAVOINE, J.L (2014). « Le syndrome d’épuisement professionnel des soignants en oncologie et hématologie. Hématologie »

– FLORU, R., & CNOCKAERT, J. C. (1998). « Stress professionnel et Burnout » in Les Cahiers de l’Actif-N, 264(265), 265

 

Sites web

 

INRS (2015), « Guide d’aide à la prévention. Le syndrome d’épuisement professionnel ou burn out. Mieux comprendre pour mieux agir » in INRS.fr, disponible sur [Guide d’aide à la prévention. Le syndrome d’épuisement professionnel ou burnout. Mieux comprendre pour mieux agir. – Détail (inrs.fr)]. Consulté en août 2023

-OCM (27/01/2023), « Les chiffres du burn-out en France » in observatoire-ocm.com, disponible sur [Les chiffres du burn-out en France (observatoire-ocm.com)] Consulté en juillet 2023

-ROY Soline (10/12/2018) « sous pression, les professionnels de santé souffrent de leur travail » in LeFigaro.fr santé, disponible sur [Sous pression, les professionnels de santé souffrent de leur travail (lefigaro.fr)]. Consulté en juin 2023

 -TCHENG Cédric (24/10/2017), « L’éthique des soignants : un regard sur le monde de la santé et son quotidien » in Revue Européenne de Coaching, disponible sur [L’éthique des Soignants : un regard sur le monde de la santé et son quotidien – Revue Européenne de Coaching (revue-europeenne-coaching.com)]. Consulté en Juin 2023

 FICHE IDE, « Relation soignant-soigné », disponible sur [Relation soignant-soigné – Fiches IDE (fiches-ide.fr)]. Consulté en Août 2023.

Talentsanté.fr, « Pénuries de soignants : quels métiers sont les plus touchés », disponible sur [Pénuries de soignants : quels métiers sont les plus touchés ? – Talents sante.fr (talentsante.fr)]. Consulté en octobre 2023.

-FLORIAN Xavier (06/02/2016), « Le coaching dans le secteur sanitaire, social et médico-social ? » in Linkedin disponible sur [(23) Le coaching dans le secteur sanitaire, social et médico-social ? | LinkedIn]. Consulté en Mai 2023.

– LITARDI Patricia (2014-2015). « L’apport du coaching auprès des professionnels de santé» in médiablog- coaching disponible sur [Patricia-LITARDI-Memoire-de-Certification-1.pdf (mediablog-coaching.com)]. Consulté en Mai 2023

– CAMHI Kévin (31/10/2023) « Situations extrêmes de RPS : burn out, brown out, bore out » in médiablog- coaching disponible sur [Situations extrêmes de RPS : burn out, brown out, bore out (mediablog-coaching.com)]. Consulté en novembre 2023

– Ministère de la Santé et de la Prévention- https://sante.gouv.fr

– Linkup-university

 – OMS- Site officiel de l’Organisation mondiale de la Santé (who.int)

– ANAP- Plateforme anap.fr

ANNEXE I : Les risques psychosociaux

ANNEXE II : Le Maslach Burnout Inventory pour les professionnels de sante

ANNEXE III : Résultats du questionnaire que j’ai réalisé et transmis aux professionnels de santé

 

[1] Les chiffres du burn-out en France (observatoire-ocm.com)

[2] Floru, R., & Cnockaert, J. C. (1998). Stress professionnel et Burnout, p.36

[3] Pénuries de soignants : quels métiers sont les plus touchés ? – Talents sante.fr (talentsante.fr)

[4] PEPIN Charles (2018), les vertus de l’échec, p. 103

[5] ROY Soline, (2018) Sous pression, les professionnels de santé souffrent de leur travail (lefigaro.fr)

[6] FLORU, R., & CNOCKAERT, J. C. (1998), Stress professionnel et Burnout, p.35-36

[7] BOIVIN-DESROCHERS, C. & ALDERSON, M. Les difficultés/souffrances vécues par les infirmières: stratégies permettant de préserver leur santé mentale, leur sens au travail et leur performance au travail, p.86

[8] FLORU, R., & CNOCKAERT, J. C. (1998), Stress professionnel et Burnout, p 26

[9] SUZANNE PETERS & Dr PATRICK MESTERS (2008), Le Burn out comprendre et vaincre l’épuisement professionnel, p.50.

[10] SUZANNE PETERS & Dr PATRICK MESTERS (2008), Le Burn out comprendre et vaincre l’épuisement professionnel, p.45

[11] INRS, Guide d’aide à la prévention. Le syndrome d’épuisement professionnel ou burn out, p.8

[12] FLORU, R., & CNOCKAERT, J. C. (1998), Stress professionnel et Burnout, p 28

[13] FLORU, R., & CNOCKAERT, J. C. (1998), Stress professionnel et Burnout, p 25

[14] Selon le Larousse, faculté intuitive de se mettre à la place d’autrui, de percevoir ce qu’il ressent

[15] Selon le Larousse, sentiment de pitié qui nous rend sensible aux malheurs d’autrui.

[16] TCHENG Cédric (2017), L’éthique des soignants : un regard sur le monde de la santé et son quotidien

[17] Fiches IDE, Relation soignant-soigné (fiches-ide.fr)

[18] LITARDI Patricia (2014-2015), L’apport du coaching auprès des professionnels de santé, p.49

[19] TCHENG Cédric (2017),  L’éthique des soignants : un regard sur le monde de la santé et son quotidien

[20] TCHENG Cédric (2017), L’éthique des soignants : un regard sur le monde de la santé et son quotidien

[21] SUZANNE PETERS & Dr PATRICK MESTERS (2008), Le Burn out comprendre et vaincre l’épuisement professionnel p.236

[22] P ANGEL & P.AMAR, le coaching p.85

[23] FRANCOISE KOURILSKY (2004), Du désir au plaisir de changer, p.104

[24] P ANGEL & P.AMAR, le coaching p.17

[25] PLUTARQUE, Comment écouter, p.22

[26] SUZANNE PETERS & Dr PATRICK MESTERS (2008), ), Le Burn out comprendre et vaincre l’épuisement professionnel p.237

[27] PLUTRAQUE, Comment écouter, p. 24

[28] FRANCOISE KOURILSKY (2004), Du désir au plaisir de changer, p.120

[29] FRANCOISE KOURILSKY (2004), Du désir au plaisir de changer, p.162

[30] RENE DE LASSUS, L’analyse transactionnelle, p.159

[31] RENE DE LASSUS, L’analyse transactionnelle, p.188

[32] RENE DE LASSUS, L’analyse transactionnelle, p.76

[33] RENE DE LASSUS, L’analyse transactionnelle, p.129

[34] RENE DE LASSUS, L’analyse transactionnelle, p.133

[35] RENE DE LASSUS, L’analyse transactionnelle, p.142

[36] P.ANGEL & P. AMAR, Le coaching, p.122

[37] GALLWEY Timothy (2022), Le jeu intérieur du tennis, p.153

[38] GALLWEY Timothy (2022), Le jeu intérieur du tennis, p.153

[39] SUZANNE PETERS & Dr PATRICK MESTERS (2008), Le Burn out comprendre et vaincre l’épuisement professionnel p.124-125

[40] FRANCOISE KOURILSKY (2004), Du désir au plaisir de changer, p.226

[41] FRANCOISE KOURILSKY (2004), Du désir au plaisir de changer, p.164

[42] DOMINIQUE PICARD & EDMOND MARC, L’école de Palo Alto, p.80

[43] SUZANNE PETERS & Dr PATRICK MESTERS (2008), Le Burn out comprendre et vaincre l’épuisement professionnel p.124

[44] N. COMBALBERT & C.RIQUELME-SENEGOU, Le mal-être au travail, p. 108

[45] GALLWEY Timothy (2022), Le jeu intérieur du tennis, p157

[46] GALLWEY Timothy (2022), Le jeu intérieur du tennis, p153

[47] Xavier Florian, 2016, (23) Le coaching dans le secteur sanitaire, social et médico-social ? | LinkedIn

Par Diego Torraca

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