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Le coaching comme levier de l’épanouissement professionnel des femmes : Comment le coaching peut permettre de déjouer les biais de genre internalisés par les femmes

Lisa Morales
Lisa est coach certifiée, elle utilise le coaching afin d’accompagner les femmes dans une vie plus alignée à leurs ambitions tant professionnelles que personnelles, notamment en modifiant des comportements ancrés qui ne servent pas leurs attentes et objectifs. Elle travaille à la fois en entreprise et directement avec ses clientes.

INTRODUCTION

Les femmes représentent 51,6% de la population française[1], pourtant en 2022, elles sont toujours moins représentées au sein des instances dirigeantes des entreprises, touchent environ 75% du salaire de leurs homologues masculins à poste équivalent, et ont des pensions de retraites inférieures de 40%[2] en moyenne à celles des hommes. Ces constats sont étonnants en 2024, année qui fait pourtant suite aux années #metoo[3] ou #balancetonporc ou à l’accès d’une femme à la vice-présidence des Etats-Unis. Tout porterait à croire que les combats féministes de nos aïleuls sont gagnés, et que les femmes jouissent désormais des mêmes opportunités que les hommes. Mais que disent alors ces chiffres ?

L’existence du plafond de verre perdure malheureusement encore. Ce plafond de verre est directement issue du mode de société dans laquelle nous vivons depuis de nombreuses années et qui présentent nécessairement certaines faiblesses, notamment du fait des conséquences sur le bien-être et l’épanouissement professionnel des femmes.

Pour autant, il serait faux de penser qu’en 2024 nous vivons dans une société où les femmes et les hommes sont opposés et où les hommes ne sont pas très majoritairement en faveur de l’égalité hommes – femmes. Pourtant, ces inégalités perdurent et se placent en travers du plein épanouissement des femmes, notamment dans la sphère professionnelle. 2022 a été marquée par un nombre de burn-outs et de démissions records, le taux de démissions atteint 2,7% au 1er trimestre 2022, ce qui est le plus haut niveau depuis la crise financière de 2008-2009. Le taux de burn-out, quant à lui a doublé en 1 an, 2 millions de personnes sont concernées en France en 2021[4], et les femmes sont plus touchées que les hommes par l’épuisement professionnel[5]. Comment se fait-il alors que malgré les avancées de ces dernières années, les femmes n’atteignent pas l’épanouissement attendu ? Comment notre modèle de société a pu causer aux femmes l’internalisation de biais de genre qui peuvent parfois bloquer leurs épanouissement professionnel ? Et plus important encore, comment le coaching peut-être un outil de levier à l’épanouissement professionnel des femmes ?

1        LA CULTURE PATRIARCALE COMME CONTEXTE À L’ÉVOLUTION PROFESSIONNELLE DES FEMMES

Quelle est la place sociale des femmes dans le monde du travail aujourd’hui ?

1.1       Problématique sociale du plafond de verre en France

Dans un contexte où les femmes Iraniennes peinent à obtenir la plus élémentaire des libertés, les femmes américaines voient la liberté à disposer de leurs propres corps leurs être restreinte, nous françaises, ne sommes pas les plus à plaindre. Il est évident que nous jouissons malgré tout d’une liberté importante et de larges droits.

Pour autant, devrions-nous laisser la comparaison avec ces malheureux pays nous démunir de notre volonté d’obtenir davantage d’égalité ? Evidemment non.

Notre Constitution dispose que « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme ». Ce troisième alinéa au préambule de la constitution de 1946 ne laisse pas de place à l’ambigüité.

Effectivement, factuellement, les mêmes droits sont bels et bien accordés aux hommes et aux femmes de France. La loi ne discrimine a priori pas. Mais qu’en est-il dans les faits ?

Dans les faits, en France, les femmes ne perçoivent encore que 75% du salaire de leurs  homologues masculins. Un peu moins d’un tiers de cet écart s’explique par des différences de durée de travail. Dans les entreprises du CAC40, le pourcentage de postes de président ou directeur général occupés par des femmes est de 2,5% en 2021.

La loi pose clairement l’égalité entre les hommes et les femmes, pourtant, les chiffres sont là.

Nous pourrions même aller plus loin, la loi française, face aux constats de la réalité statistique, cherche à améliorer l’égalité hommes-femmes.

Dès 1972, l’obligation d’accompagner un travail identique entre homme et femme d’un salaire égal s’inscrit dans la loi. Pourtant 10 ans plus tard, face à l’inapplication de cette loi, la loi Roudy revient rappeler l’égalité de salaire dont doivent bénéficier les femmes par rapport à leurs collègues masculins.

En 2022, les femmes sont fictivement considérées comme travaillant sans rémunération à partir du 4 novembre.

Le législateur continue donc ses efforts. Le 27 janvier 2011, la loi Copé-Zimmermann instaure un quota de 40% de femmes dans les conseils d’administration des sociétés anonymes de plus de 250 salariés et 50 millions d’euros de chiffre d’affaires. Ce quota devant être atteint à partir de 2017.

Le dernier effort date ensuite de la fin de l’année 2021.

Dans l’objectif d’accélérer la représentation équilibrée entre les femmes et les hommes parmi les cadres dirigeants et les membres des instances dirigeantes des grandes entreprises, la loi Rixain a été adoptée le 24 décembre 2021. Cette loi, applicable pour toute entreprise de plus de 1000 salariés pour le troisième exercice consécutif, a pour vocation de pousser ces entreprises à atteindre 30% de femmes dirigeantes et 30% de femmes membres des instances dirigeantes en 2027, puis 40% à partir de 2030.

Pourtant, face à cette multitude de lois, les progrès sont lents, en France comme dans tout autre pays développé.

Lors de sa défaite aux élections présidentielles américaines de 2016, Hillary Clinton emploiera la fameuse expression de « plafond de verre » : « A toutes les femmes, les jeunes femmes particulièrement, qui ont cru en cette campagne, qui ont cru en moi, sachez une chose : rien ne me rend plus fière que d’avoir été votre représentante. Je sais que nous n’avons pas encore brisé ce plafond de verre, mais un jour quelqu’un le fera et j’espère que ça sera plus tôt que nous le pensons

Ce plafond de verre serait, selon l’expression américaine datant de la fin des années 70, un plafond invisible auquel se heurtent les femmes dans l’avancée de leur carrière ou dans l’accession à de hautes responsabilités, et qui les empêche de progresser aussi rapidement et autant que les hommes[6].

Le plafond de verre est donc une séries d’obstacles et de problèmes non légitimes venant limiter l’accès aux femmes à des postes de haut niveau. S’il est invisible, et s’il ne vient pas de la loi, s’il est même contraire à la loi, d’où vient alors ce plafond de verre et de quoi est-il constitué ?

1.2       Le monde professionnel encore marqué par une culture patriarcale

Après la loi Copé-Zimmermann de 2011, une formation particulière a vu le jour dans l’une des meilleurs écoles de management française : l’EMLYON Business School. Un programme appelé « Formation pour les administratrices : Objectif administratrice » explique être créé suite à la loi Copé-Zimmermann qui impose pour 2017 un quota concernant les femmes.

Cette formation datant de 2014 n’existait auparavant pas et ne cible à ce moment-là que les femmes. Quelques années plus tard, la présentation de la formation ne cible plus uniquement les femmes « Devenez actrice et acteur de la gouvernance », mais est menée en partenariat avec HeR value, un cabinet de formation ciblant les femmes. Selon nos recherches, aucune autre formation n’existeraient à destination exclusive des hommes.

Qu’est-ce qui créerait un besoin de formation spécifique aux femmes alors même qu’aucune formation à destination des hommes n’existaient auparavant ? L’existence même d’une telle formation est-elle une preuve flagrante de la différence de traitement entre les hommes et les femmes, ou un pas en avant vers plus d’égalité ? Et qui sont ces femmes qui cherchent à se former à un poste pour lequel les hommes, eux, ne semblent pas éprouver un besoin de formation spécifique ?

Évidemment, notre objet n’est pas d’acculer cette formation, ni les femmes l’intégrant, mais de se questionner par exemple sur ce qui distingue une femme cherchant à être administratrice, d’un homme cherchant à l’être.

En 2016, l’Express titrait « Le plafond de verre, résultat d’une éducation patriarcale » et mettait en valeur le fait que les inégalités salariales entre hommes et femmes cachent également une difficile accession des femmes aux postes de directions. Cet article lie ces différents constats à une éducation patriarcale.

Selon la définition du dictionnaire Larousse de 2022, le patriarcat est « une forme d’organisation sociale dans laquelle l’homme exerce le pouvoir dans le domaine politique, économique, religieux, ou détient le rôle dominant au sein de la famille, par rapport à la femme. »

A lire les statistiques énoncés plus haut, ou l’absence de femme ayant exercé la fonction de chef d’état, tout porte à croire que nous sommes bien, en France, dans ce type de société. Chacun d’entre nous n’ayant jamais connu un autre type d’organisation sociétale à ce jour.

Il serait alors aisé de croire que l’organisation de la société selon les règles du patriarcat sont un ordre naturel, qui a toujours existé. Pourtant, ce système social est entré dans nos vies il y a environ 10 000 ans seulement. Rappelons qu’il est généralement considéré que la date de naissance de l’homme moderne « homo sapiens » est daté d’environ 300.000 ans. L’humanité telle que nous la connaissons n’a donc pas toujours été organisée autour d’un système patriarcal. Cette organisation sociale n’ayant donc rien de naturel et inné.

Quels sont les effets du patriarcat sur le monde professionnel ?

Historiquement, l’entreprise moderne n’a fait son apparition qu’à partir du 16ième siècle. A cette date, le rôle des femmes se limite essentiellement au travail domestique, l’entreprise est donc pensée et créée par des hommes, pour des hommes. Peu à peu, les femmes pénètrent l’entreprise et le monde du travail. Nous l’avons vu, en 1946, la loi prévoit que la femme dispose des mêmes droits que les hommes, pourtant, à cette époque, le fait même d’être une femme suppose un abattement de salaire systématique, on parle de « salaire féminin » ; un arrêté est pris en juillet 1946 pour supprimer le salaire féminin de la loi.

Il faudra ensuite attendre 1965 pour que les femmes puissent travailler sans l’accord de leur mari, jusque-là, leur présence dans le monde professionnel ayant à être autorisée – et donc supervisée – par leur mari.

L’histoire nous donne suffisamment de preuves de la culture patriarcale dont sont issues les femmes actuellement présentes sur le marché du travail français.

Historiquement, les hommes entendent et identifient depuis de nombreuses générations qu’ils ont leur place dans le monde professionnel, les femmes, elles, identifient leur place dans la sphère professionnelle depuis moins d’une centaine d’années.

Ces années pèsent encore aujourd’hui sur la construction identitaire des femmes, s’affranchir d’une culture patriarcale vieille de 10 000 ans ne se fait pas en 100 années de lois favorisant l’égalité hommes-femmes.

La culture patriarcale véhicule certaines idées et certains rôles associés à la fois à l’homme et à la femme. Si l’homme se voit être historiquement à la tête de l’entreprise, du foyer, de la famille, la femme, quant à elle, se voit être considérée différemment, son genre féminin lui impose un certains nombres de règles et d’attentes parfois peu adaptée à une évolution professionnelle.

En étant initialement à la tête de son foyer, de son entreprise, l’homme a pu bénéficier d’une certaine intériorisation de sa qualité de leader. Le leadership serait donc, selon les stéréotypes de genre, davantage associé à un genre masculin.

Le genre peut être considéré comme un ensemble de comportements et de pratiques symboliquement associées à des constructions culturelles de la féminité et de la masculinité[7]. Les hommes comme les femmes se réfèreraient alors à des répertoires d’action, de pensée, de discours et s’aligneraient sur des modèles masculins ou féminins véhiculés par la société et ses récits collectifs. Leurs constructions identitaires se baseraient sur ces répertoires et impliqueraient donc dans la majorité des cas une certaine adhésion à des stéréotypes de genre.

Il peut être cliché d’identifier l’intégralité des femmes comme se référant à des caractéristiques dites féminines, il est bien entendu qu’en 2024, les mentalités évoluent et que le carcan pesant sur les femmes des années 1920 est bien différent que celui pesant sur les femmes aujourd’hui. Pour autant, ces répertoires d’actions subsistent bien, et peuvent être lourds à porter et à incarner tant pour les femmes que par ailleurs pour les hommes, soumis à leurs propres injonctions sociétales

Les inégalités subsistent donc bien, les chiffres ne mentent pas, factuellement, à l’échelle globale, les femmes n’occupent que 24% des postes de leadership avec une certaine séniorité. Le plafond de verre y est de toute évidence pour quelque chose, mais le besoin des femmes à se former à des postes que les hommes s’estiment être compétents à occuper sans formation spécifique semblent également nous donner un enseignement important : les femmes elles-mêmes ont internalisé certains messages issus de la culture patriarcale.

1.3       L’internalisation par les femmes des messages issus de la culture patriarcale

Baignant dans la culture patriarcale depuis des millénaires, des générations de femmes ont été bercées et ont retransmis ces messages à l’origine du plafond de verre. Comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement ? Les femmes sont, comme tout individu, façonnées par le milieu dans lequel elles évoluent. Un message selon lequel les hommes sont destinés à être en posture de leadership sera tout aussi assimilé par les hommes que par les femmes.

A l’inverse, le message incessamment répété par les récits collectifs de notre société, martelant la place des femmes comme n’étant pas nécessairement au sein de l’entreprise ou à un poste de haut niveau, sera tout aussi entendu et assimilé.

Ces récits collectifs sont créés par les livres, la télévision, le cinéma, les séries-télé, et avant tout autre chose, par l’absence ou le peu d’exemples de femmes à des postes de leadership au sein de notre société. En 2022, le nombre de femmes à la tête d’entreprises du CAC 40 est au nombre de 2 : Véronique Penchienati-Bosetta, Directrice Générale de Danone et Catherine Macgregor, directrice générale d’Engie.

Selon une étude Ipsos « Recherche, sciences et stéréotypes », 73% des femmes interrogées estime « qu’il est exact de dire qu’il est plus difficile pour les femmes de devenir scientifique de haut niveau, car elles devraient alors accepter de sacrifier en partie leur vie de famille et de couple ». Les femmes elles-mêmes semblent alors avoir accepté qu’elles ne peuvent pas accéder à des postes élevés sous peine de ne pas remplir leur rôle social au sein de leur couple ou leur famille, sous peine de passer à côté d’une vie de famille épanouie ; si les hommes, en 2024, peuvent bien entendu être soumis à des choix similaires, il semble que les études montrent qu’il leur sera moins reproché d’investir la majorité de leur énergie dans leur vie professionnelle. Cette tendance serait traditionnellement validée par le rôle de « bon père de famille » cher au domaine juridique et qui fait peser sur l’homme d’autres types d’injonctions liées au travail, injonctions qui peuvent par ailleurs engendrer d’autres types de mal-être chez les hommes.

En effet, selon l’enquête « Conditions de travail et risques psychosociaux » de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère du Travail (DARES) de 2016, la probabilité pour une femme de recevoir des reproches de son entourage concernant son manque de temps libre du fait de son activité professionnelle est d’environ 20% plus élevée que pour un homme. Et la probabilité de présenter un syndrome dépressif est multipliée par deux pour les femmes recevant ce type de reproches ; pour les hommes subissant ces reproches, il n’y a pas d’effet significatif sur la probabilité de développer un syndrome dépressif.

En s’autolimitant à des postes qui permettraient de préserver leurs vies personnelles, les femmes s’éviteraient donc – consciemment ou non – un certain nombre de reproches et de risques sur leur santé mentale.

Cette autolimitation des femmes est notamment guidée par les stéréotypes de genre ancrés et par le manque profond de représentation des femmes à des postes de haut niveau.

Les femmes deviennent alors à la fois victimes – plus ou moins silencieuses- du plafond de verre, et vont parfois entretenir elles-mêmes ce plafond de verre qu’elles ont lentement mais sûrement internalisé.

Certaines autrices vont jusqu’à parler de coresponsabilité de l’existence du plafond de verre. Cette idée provocatrice est par exemple portée par Myriam Cohen-Welgryn. Celle-ci affirme que les femmes doivent dompter leurs propres biais de genre pour déjouer les pièges du plafond de verre. Cette même idée est portée par Sheryl Sandberg. Cette militante américaine et directrice des opérations de Facebook affirme « Prenez la place qui vous est due car on ne vous la donnera pas, prenez la parole, occupez l’espace et agissez… davantage comme les hommes ».

Ce message est cependant critiqué par d’autres autrices féministes qui affirment en substance que le problème ne vient pas des femmes, mais bel et bien des obstacles sexistes auxquels elles se heurtent. Précisant par ailleurs qu’« agir comme les hommes » n’est pas un modèle de réussite universel enviable pour chaque femme. Ce n’est par ailleurs probablement pas souhaitable compte tenu de la richesse des différences entre les hommes et les femmes.

Effectivement, ces obstacles sexistes existent et les femmes s’y confrontent quotidiennement dans le monde professionnel.

Un sondage OpinionWay publié le 28 mars 2022 partageait un constat accablant basé sur 1009 salariés du privé et du public : 60% des femmes et hommes interrogés affirment avoir été exposés à au moins un agissement à connotation sexiste et/ou sexuelle dans le cadre de son travail au cours des 12 derniers mois. Parmi les réponses apportées par les participant.e.s du sondage, 47% ont entendu des « blagues » à connotation sexuelle dont 10% au moins une fois par semaine.

Ce type d’ambiance, les inégalités salariales, l’existence du plafond de verre sont autant de facteurs qui nous permettent évidemment de ne pas identifier les femmes comme les co-autrices mais comme les victimes de la culture patriarcale. Ressentir une certaine culpabilité vis à vis de l’internalisation de l’ensemble de ces biais et stéréotypes n’est évidemment pas la solution, pour autant, se contenter d’attendre des jours plus propices à l’évolution professionnelle des femmes n’est pas non plus une solution viable et adaptée, au risque de laisser passer sa chance de vivre une vie professionnelle épanouissante.

Une voie est alors possible : apprendre à déjouer les pièges internalisés de la culture patriarcale afin de tirer le meilleur résultat possible des constats énoncés plus hauts.

En se connaissant elles-mêmes, en prenant conscience de l’internalisation de ces biais de genre et des conséquences de ces biais, les femmes peuvent sortir de ce piège et être d’autant plus actrices de leur évolution professionnelle. Évidemment, les obstacles seront nombreux et l’injustice ressentie pourra parfois être importante, mais ne pas se laisser décourager par cette situation de fait repose entre les mains des femmes. Au sein même du monde professionnel, ces femmes feront une par une bouger les lignes et influeront donc sur la société entière.

Sur la marge de manœuvre des femmes concernant les biais de genre, l’autrice Clara Moley déclare qu’« il ne faut pas seulement des résultats, il les faut rapidement. Et la seule manière de les obtenir est de se concentrer sur ce que l’on peut mettre en place soi-même, tout de suite ».

Si le constat est amer, il est cependant indubitable, les femmes doivent faire face à une double problématique, celle du plafond de verre, les inégalités salariales et le sexisme ambiant, et celle contre leurs propres biais internalisés et leurs propres blocages internes pour trouver leurs places dans un monde professionnel construit initialement par et pour les hommes.

Sur la problématique des inégalités salariales et du patriarcat, les femmes, tout comme les hommes pour qui cette cause peut également être chère, ont beaucoup à faire à l’échelle sociétale.

Mais concernant la problématique des femmes vis à vis de leurs propres biais internes, le coaching peut être d’une aide précieuse et permettre aux femmes de développer le leadership nécessaire à leur évolution professionnelle, quel que soit le niveau de poste recherché.

 

2        LE COACHING POUR DÉVELOPPER LE LEADERSHIP DES FEMMES

2.1       Les biais et freins internes au leadership des femmes

De nombreux biais et freins internes sont  donc favorisés par cette culture patriarcale, et le rôle des femmes dans notre société est encore dicté par de nombreux stéréotypes de genres.

Dans cet article, nous nous attacherons aux biais et freins les plus partagés par les femmes souhaitant évoluer dans leur carrière professionnelle.

Cela ne veut évidemment pas dire que certains hommes ne sont pas touchés par ces mêmes freins, simplement que ces freins se retrouvent de manière extrêmement récurrentes au sein de la population s’identifiant au genre féminin et que ce mémoire se concentre sur cette cohorte.

2.1.1      Le perfectionnisme

Le perfectionnisme commence à faire l’objet d’études à partir de 1950, dans ces premiers articles, il est présenté comme un trait de personnalité unidimensionnel très dommageable. Benzion Sorotzkin parlera du perfectionnisme comme un stratagème inconscient « pour éviter de ressentir la honte ou la culpabilité[8] ». En 1980, Burns, à l’origine d’une des premières échelle de perfectionnisme, complètera que le perfectionniste est acteur de son propre malheur en « s’efforçant compulsivement et sans relâche d’atteindre des objectifs impossibles et en mesurant sa valeur personnelle en termes de productivité et d’accomplissement ».

La littérature scientifique se questionne par la suite sur le fait de savoir si le perfectionnisme peut être vertueux. Sur ce sujet, de nombreux articles sur le perfectionnisme citeront l’exemple de Michel-Ange, qui aurait mis son perfectionnisme et sa méticulosité au service du plafond de la chapelle Sixtine, généralement considéré comme un chef d’œuvre presque divin. A l’inverse, d’autres auteurs préfèreront citer l’exemple de La Callas, ayant interrompu sa performance de Norma de Bellini après le premier acte, certains diront que sa voix – faible à ce moment là- ne pouvait assurer la fin de la représentation, d’autres diront qu’elle avait « fait un caprice de diva » en estimant qu’il lui était préférable de mettre fin à sa performance qui n’était – selon elle – pas à la hauteur. Une performance gâchée par du perfectionnisme donc ?

En guise de conclusion sur le potentiellement « bon » perfectionnisme, et le « mauvais » perfectionnisme, nous pouvons résumer que le perfectionnisme peut être utile et avantageux lorsque l’individu a les moyens de ses ambitions et ne connaît pas de troubles pathologiques et handicapant dans la réalisation de ses tâches diverses. En revanche, si des exigences très élevées voire irréalistes sont également accompagnées d’une anxiété ou de préoccupations excessives, il s’agit vraisemblablement d’un perfectionnisme s’opposant à l’exigence d’individus ambitieux et talentueux (Tozzi et al., 2004).

En 2012, dans son livre « Daring greatly », la célèbre chercheuse américaine Brenée Brown précise à propos du perfectionnisme qu’il « n’est pas synonyme d’aspirer à l’excellence. Le perfectionnisme n’est pas une réalisation saine ni la croissance {…} c’est un mouvement défensif. C’est croire que si nous faisons les choses à la perfection et qu’elles semblent parfaites, nous pouvons minimiser ou éviter la douleur du blâme, du jugement et de la honte. C’est un essai de gagner l’approbation »[9].

En coaching, le perfectionnisme s’appréhende autour de la notion de driver, dirigeant nos comportements. Un driver est une consigne interne, un corpus de repères constitué de valeurs et de croyances qui va dicter nos comportements de façon inconsciente et réflexe. Nous identifions 5 drivers principaux : sois parfait, sois fort, fais des efforts, fais plaisir, fais vite.

Chaque individu possède généralement 1 ou 2 drives dominants, mais peut-être soumis aux 5.

Un driver n’est pas nécessairement positif ou négatif, il va, tout comme le perfectionnisme, présenter des avantages et des inconvénients.

Le driver « sois parfait » relève donc du perfectionnisme. Il peut effectivement présenter plusieurs avantages tels que le souci du détail, la précision, la rigueur, mais il peut également présenter de nombreux inconvénients. A titre d’exemple, l’exigence peut se transformer en intransigeance, la recherche de la perfection peut entraîner la lenteur et le dédain envers ce qui est considéré comme médiocre, poussé à l’extrême le perfectionnisme entraîne la procrastination ou la paralysie dans le passage à l’action : plutôt que de faire quelque chose imparfaitement, il est préférable de ne pas le faire du tout. Dans ces inconvénients, le perfectionnisme peut entraîner une éternelle insatisfaction et une frustration permanente.

Lors de notre séance d’entretien préalable, Christine a partagé la chose suivante :

 

Cliente « J’ai du mal à donner de la valeur à ce que je fais, je me dis toujours que c’était pas non plus incroyable, et puis tout ce que j’ai fait je savais que j’allais le réussir, y’a pas d’autres choix en fait, si je suis pas sûre de réussir je le fais même pas de toute façon. L’échec c’est pas une option pour moi. Par exemple, récemment j’ai validé un Diplôme universitaire, une formation de 2 ans pour compléter mon diplôme de kiné, bon, j’ai réussi. Et là, j’ai reçu des appels des parents de mon conjoint, ils me félicitaient d’avoir réussi, me disaient que j’étais super douée, qu’ils étaient fiers de moi, ils ont voulu qu’on fasse un diner pour fêter ça. Je suis restée sur le cul. Ce que j’ai fait c’est loin d’être extraordinaire, mais pour eux c’était génial. Ma mère par contre m’a dit « ben oui encore heureux que t’as réussi ton DU »…je tiens d’elle là-dessus, comme l’échec n’existe pas, la réussite est entendue et ça n’a pas tant de valeur que ça finalement, d’autant que je peux toujours faire mieux, même ce DU, je veux dire j’ai pas travaillé nuit et jour non plus, c’était pas dur de l’avoir. »

 

La demande initiale de Christine était la suivante : « Je voudrais me sentir à l’aise pour facturer mes clients le vrai prix, ne pas trouver ça trop cher et m’excuser de mes prix, je veux donner la vraie valeur aux choses que je vends ».

Rapidement, je me suis questionnée s’il y avait un lien entre l’apparent perfectionnisme de Christine – qui souhaite ne rien entamer qu’elle ne pourrait être sûre de réussir et pense toujours pouvoir mieux faire – et sa difficulté à reconnaître la valeur des choses qu’elle propose.

Si l’on pense toujours pouvoir et devoir faire mieux, comment apprécier la valeur de ce que l’on fait déjà ?

Derrière la demande initiale de Christine, se cache le prisme du perfectionnisme et de la course au « toujours mieux », avec une vision quasi irréaliste de ce que devrait être la réussite. Dans le cas de Christine par exemple, réussir le DU ne suffit pas, il faudrait l’avoir réussi en ayant travaillé jour et nuit, en ayant eu du mal, en ayant sué sang et eaux, dans ce cas-là, peut-être que cela serait une réussite suffisante pour que Christine accepte la valeur de son DU, ou peut-être pas…

Un client ne vient donc pas nécessairement présenter à son coach une demande concernant directement le perfectionnisme, un autre type de demande pourra cacher ce biais excessivement répandu.

Dans le milieu de l’entreprise, ce biais pourra également se retrouver sous une forme différente.

Par exemple, la manageuse[10] perfectionniste partage qu’elle relit 10 fois son dossier avant de le présenter à sa hiérarchie, qu’elle va passer un temps infini à le peaufiner dans ses moindres détails et donc avoir une productivité bien moindre par rapport à ses collègues qui acceptent l’imperfection. Poussé à son paroxysme, une manageuse perfectionniste nous confiera qu’elle préfère parfois ne pas se porter volontaire pour prendre en charge une tâche, de peur de ne pas pouvoir rendre un travail impeccable, se mettant alors en retrait par rapport à ses homologues qui ne sont pourtant pas plus compétents qu’elle. Le perfectionnisme peut alors pousser à la procrastination, la peur de ne pas être à la hauteur de la perfection pouvant être totalement immobilisante.

2.1.2. Le syndrome de l’imposteur

Le syndrome de l’imposteur, autrement appelé sentiment d’illégitimité est un terme utilisé en psychologie qui renvoie à une habitude de comportement par laquelle les personnes concernées doutent de leurs capacités et ont ainsi une peur permanente d’être identifiées comme étant une fraude ou un imposteur. Ces personnes ont alors la croyance qu’elles ne méritent pas leur place. Il a été nommé ainsi par les psychologues Pauline Clance et Susanne Imes en 1978. Ces deux psychologues étudient alors 150 femmes diplômées, exerçant des métiers prestigieux et reconnues pour leurs solides compétences. Si l’essentiel des homologues de ces femmes mettaient en valeur leurs compétences et leur travail, ces femmes, quant à elles, pensaient avoir bénéficié de la chance ou du hasard, elles entretenaient la croyance qu’on les surestimait et qu’elles seraient un jour démasquées.

Une étude[11] publiée le 6 novembre 2019 dans la revue Medical Education identifie le syndrome de l’imposteur comme spécifiquement problématique en ce qu’il est associé à un nombre important de burnouts et de suicides. Pour contrebalancer la peur d’être démasquée, les personnes concernées peuvent se résoudre à travailler de manière acharnée de façon à atteindre un haut niveau de perfection – réelle ou supposée – ce qui peut donc aisément conduire au burn out ou à l’épuisement et renforcer la croyance qu’elles ne sont pas compétentes. Cette étude, basée initialement sur une population de physiciens, a mis en valeur que des facteurs tels que le genre féminin, une estime de soi basse, et la culture institutionnelle favorisaient le développement du syndrome de l’imposteur.

Dans une conférence « TED Talks » visionnée près de 900 000 fois[12], Lou Solomon, PDG, autrice, et experte en communication parle de son syndrome de l’imposteur. Lorsqu’on lui a fait remarquer qu’elle avait une carrière réussie, celle-ci a répondu qu’elle avait eu de la chance, elle identifiait elle-même avoir une tendance à repousser ce genre de félicitations sur sa carrière voire même à repousser des opportunités. Après avoir étudié attentivement sa propre tendance au syndrome de l’imposteur, Lou Solomon présente les comportements types des personnes concernées par ce syndrome :

  • Refuser des opportunités s’offrant à eux par doute d’être compétent
  • Banaliser leurs réussites ou les attribuer à la chance
  • Se sur-préparer et dépasser perpétuellement leurs objectifs
  • S’auto-saboter

Les personnes concernées ont donc tendance à présenter ces 4 comportements, et à, en outre, être davantage stressés, anxieux, déprimés, épuisés, insatisfaits de leur poste voire parfois de leur vie. Une faible estime d’eux-mêmes les pousserait en outre à ne pas mettre en place des changements, tels que changer de postes, de peur de ne pas être à la hauteur. Ils auraient donc tendance à laisser perdurer plus longtemps des situations d’insatisfaction.

S’il était nécessaire de le préciser, ce syndrome n’a rien à voir avec la réelle compétence des personnes concernées, il s’agit simplement de leur propre perception de leurs compétences.

Une étude[13] publiée en 2016 analyse les différences démographiques parmi les personnes touchées par le syndrome de l’imposteur, cette étude se concentrant sur une cohorte d’étudiants en médecine. Cette étude a confirmé des résultats d’ores et déjà établis : les femmes y étaient deux fois plus concernées par le syndrome de l’imposteur que les hommes. En l’occurrence, 49,9% des femmes présentaient un syndrome de l’imposteur, contre 23,7% des hommes.

Une tendance qui est largement confirmé par d’autres études, et notamment par une étude[14] publiée par le journal Science en 2017 qui analyse la perception de l’intelligence par les enfants.

A l’âge de 5 ans, les enfants, tout genre confondus, qualifient autant les filles que les garçons de « très très intelligents ». Mais dès l’âge de 6 ans, les filles ont tendance à identifier les garçons comme étant bien plus « très très intelligents » que les filles, et à s’abstenir d’intégrer des jeux qui font appel à l’intelligence.

Les stéréotypes de genre, et la perception qu’ont les femmes de leur intelligence, commence à diviser hommes et femmes dès l’âge de 6 ans.

Puisqu’il est acquis que les petites filles de 6 ans, et les femmes de manière générale, ne sont pas moins intelligentes que leurs homologues masculins, tout le sujet tient donc en la perception de sa propre intelligence et de ses propres capacités. Si la société patriarcale et le manque de représentation de femmes à certaines positions clefs de la société sont une partie de l’explication du syndrome de l’imposteur, il faut également noter que les réactions au syndrome de l’imposteur ont leur importance.

Nous avons déjà évoqué que le syndrome de l’imposteur peut mener à des cas de burnout et d’épuisement, du fait de l’énergie consacrée à tenter de rééquilibrer le manque de compétences perçue par un travail acharné. Un second type de réaction peut également arriver, il s’agit de la procrastination ou de l’absence de mise en action.

Dans une étude[15] de la revue Psychology parue en 2016, les personnes concernées par le syndrome de l’imposteur ont également tendance à être touchées par des comportements de procrastination.

Les individus entièrement compétents peuvent donc être amenés à s’auto-saboter par des comportements de procrastination, du simple fait d’une mauvaise perception de leurs compétences.

Lors de l’entretien préalable avec Pauline, celle-ci me confie vouloir accéder à un poste de management au sein de son entreprise, pourtant, lorsqu’une position s’est ouverte, elle n’a pas manifesté à sa hiérarchie son envie d’être promue, elle a laissé l’opportunité filer et une personne plus jeune qu’elle, avec moins d’expérience, et qui venait juste de rejoindre l’entreprise a été promue au poste.

Cliente « J’ai l’impression d’être complètement nulle, personne n’a pensé à moi alors que je suis chez ce client depuis 2 ans, tout se passe très bien, je suis appréciée de toute l’équipe, j’aurais pu manager ce compte.

Coach : Est-ce que vous avez postulé à la position de manager lorsqu’elle s’est libérée ?

Cliente : Non…j’espérais qu’ils pensent à moi…mais j’ai rien dit, j’étais pas sûre, je me dis que si on pense pas à moi c’est que je dois pas encore être prête

Coach : Selon vous vous êtes prête ?

Cliente : Je pense, je pense que je pourrais le faire, mais je sais pas.

Coach : Qu’est-ce que vous n’auriez pas et que la personne qui a été promue à votre place vous semble avoir ?

Cliente : Je sais pas, elle a l’air tellement sûre d’elle, mais bon je connais mieux le client, mieux l’équipe, mieux l’activité, mieux le cabinet, je suis plus âgée, j’ai plus d’expériences, je sais pas ce qu’elle a de plus que moi, elle est peut-être juste plus douée c’est tout.

 

 

Sa demande initiale était la suivante : « Je veux devenir manageuse d’ici la fin de l’année prochaine », rapidement, nous comprenons donc qu’elle n’a jamais manifesté à sa hiérarchie sa volonté de passer manageuse, et qu’elle a elle-même laissé passer une opportunité parfaite d’accéder à cette fonction. Elle-même ne semble pas certaine de son incapacité à passer à l’action. Petit à petit, nous creuserons donc cette question.

2.1.3.  La rumination

La rumination fait l’objet de nombreuses recherches. Elle est définie comme un mode de pensée selon lequel les individus vont répétitivement et passivement se concentrer sur les symptômes d’une détresse et sur les raisons potentielles et conséquences de ces symptômes (Nolen-Hoeksema et al., 2008[16]). La rumination a fait l’objet d’une « théorie de la rumination[17] » en 1989 par Leonard Martin et Abraham Tesser selon lesquels cette théorie permet de désigner le fait qu’un individu puisse ressasser sans limites apparentes des pensées négatives. Cette forme de pensée serait en outre contre-productive car en décalage avec l’objectif poursuivi par l’individu concerné. La chercheuse en neurosciences Sonia Lupien précise que contrairement à la réflexion constructive, la rumination occupe inutilement la pensée et ne permet pas de trouver de solutions à nos problèmes. Selon elle, la rumination a ceci de dangereux qu’elle mène à 5 risques importants :

  • Créer une forme de dépendance à ce type de mécanisme de pensées qui engendre un cercle vicieux
  • Déraper vers la dépression
  • Développer une pensée négative permanente et avoir une perception fondamentalement négative de notre environnement
  • Diminuer sa capacité à trouver des solutions, passer à l’action et affronter les problèmes
  • Être plus vulnérable au stress.

 

La rumination est donc une cognition qui est centrée sur soi, qui implique des pensées répétitives, intrusives et surtout négatives, ces pensées aboutissant rarement à une action ou une conclusion.

Le point de départ de nos ruminations est souvent une interrogation sur nos problèmes, donc beaucoup penseront qu’ils réfléchissent.

Là encore, les études laissent penser que les femmes seraient plus touchées que les hommes par ce frein pouvant handicaper leurs carrières professionnelles.

Une étude[18] de Johnson et Whisman de 2013 note que les femmes sont deux fois plus touchées par la dépression que les hommes et base ce constat sur la tendance des femmes à ruminer davantage. Selon cette étude agrégeant et analysant un nombre substantiel d’autres études sur le sujet de la rumination selon le genre, la différence en terme de rumination entre les garçons et les filles pendant l’enfance est faible, non significative, par contre, cette différence augmente significativement dès l’adolescence pour devenir substantielle. La conclusion semble donc être qu’effectivement les femmes sont plus sujettes à la rumination que les hommes.

Certains neuroscientifiques avancent une cause relevant d’un facteur biologique. Selon ces neuroscientifiques la taille du medial-frontal cortex, zone qui serait activée lors des pensées de rumination, serait d’une taille supérieure chez les femmes. Ces études sont cependant controversées, la taille ne serait a priori pas nécessairement lié à une capacité augmentée. En outre, les neuroscientifiques n’ignorent pas que le cerveau est en constante évolution selon le contexte social et culturel dans lequel l’individu est plongé, chaque étude est donc intrinsèquement influencée par la société dans laquelle l’individu évolue, et il ne serait dès lors pas possible de théoriser l’existence d’une nature biologique du cerveau engendrant certains comportements chez les femmes et non chez les hommes.

Selon la psychologue américaine Susan Nolen-Hoeksema qui l’annonce dès les premières pages de son livre[19], la rumination est « une maladie dont les femmes souffrent bien plus que les hommes », la cause serait selon elle d’ordre culturel et éducationnel. Elle ajoute que cette tendance serait liée à l’éducation qui, très tôt, encourage les femmes à être à l’écoute des autres et à parler de leurs difficultés, quand les hommes sont plutôt incités à privilégier des comportements axés sur la mise en action vers des solutions concrètes. Là encore, il semble que les biais de genre entrent en jeu dans les freins des femmes à leurs carrières professionnelles.

Car si la rumination peut avoir des effets dans l’ensemble des domaines de la vie, y compris personnelle, elle impactera également la vie professionnelle.

Le cas d’Anaïs en est un parfait exemple :

Lors de l’entretien préalable, Anaïs a partagé sa demande :

Cliente : « J’ai du mal à aller de l’avant, dès qu’il y a le moindre conflit, la moindre remarque, je me renferme totalement, je deviens agressive, on me l’a déjà fait remarquer et je le réalise moi-même. Le problème c’est que je garde tout en tête et j’y pense constamment. Je voudrais vraiment que les choses me glissent dessus comme tout le monde, je suis trop sensible.

Coach :  Est-ce qu’il y a une situation particulière qui vous viendrait en tête et que vous pourriez partager avec moi ?

Cliente : Oui par exemple la semaine dernière, mon patron m’a demandé de venir dans son bureau avec un collègue avec lequel je travaille chez un client. Il nous a reproché de ne pas être carré, qu’il n’avait pas de visibilité sur notre mission. C’est même pas mon travail de faire ça, c’est celui de mon collègue, mais il me regardait moi, parce que je soutenais son regard alors que mon collègue semblait s’en foutre totalement. C’était pas méchant mais je me suis complètement remise en question. Je rejoue la conversation en boucle, je me demande ce que j’aurais dû dire, et j’évite soigneusement mon patron depuis, je me sens trop bête. Alors que mon collègue lui s’en fiche, il m’a dit qu’il ferait mieux à l’avenir mais voilà, c’est tout, il est même allé déjeuner avec notre patron cette semaine. Pendant que moi je me cache en ressassant cette histoire…J’aimerais vraiment apprendre à lâcher prise sur ce genre de trucs, à débrancher mon cerveau. »

 

 

Dans le cas ci-dessus, Anaïs est victime de ses propres pensées de rumination, une mise au point avec son patron la pousse à se cacher et à repasser en boucle la discussion, se demandant si elle aurait du dire ou faire les choses différemment, elle ne semble pas trouver de solutions puisqu’elle évite son patron. Nul doute que ce genre de comportements ne seront pas bénéfiques à Anaïs qui ne renverra pas une image positive à sa hiérarchie, au contraire, elle le relève, elle devient agressive et se renferme sur elle-même lorsqu’elle est confrontée à des situations qui peuvent être qualifiées de tendues. Sa demande est d’apprendre à « débrancher son cerveau » ce qui paraît effectivement illusoire, cependant, Anaïs pourra trouver des solutions pour sortir de la rumination.

Généralement, les femmes se plaignant de pensées de rumination ont des comportements similaires : elles échouent à sortir des situations de conflits par le haut, et au lieu de privilégier la recherche de solutions, elles auront tendance à tourner le problème en boucle jusqu’à ce qu’un nouveau problème vienne le remplacer. Dans le monde du travail, légitimement orienté vers l’action et la recherche de solutions, ce genre de comportement ne pourra que porter préjudice aux femmes qui en sont victimes.

Ces trois biais et blocages sont les plus répandus parmi les femmes et les plus à même de limiter leur épanouissement professionnel.

Évidemment, chaque femme n’est pas concernée par ces 3 biais, ni même parfois par un seul de ces biais, d’autres seront bien concernées mais n’en n’auront pas nécessairement conscience. Mais les demandes et l’exploration contextuelle et motivationnelle des demandes de ces femmes peuvent alors ouvrir la voie au traitement de ces blocages.

Le professionnel de l’accompagnement en charge d’identifier la meilleure façon de vaincre ce type de blocages devra porter une oreille attentive, lui permettant de déceler ce type de problématiques derrière les demandes et attentes exprimées.

A l’instar d’Anaïs, qui partage qu’elle souhaiterait que les remarques « lui glissent dessus » et qu’elle voudrait pouvoir « débrancher son cerveau », autant d’expressions nous laissant croire un niveau d’anxiété important du fait de possibles pensées de rumination.

2.2       Le processus de coaching pour déjouer ces biais et freins internes

Ces trois biais ne sont évidemment pas une fatalité, y compris dans un contexte qui pousse les femmes à développer ce type de blocages. Chacun de ces blocages pourra être adressé de façon à contrer les effets de la société patriarcale sur les femmes. L’avancée individuelle représentera une avancée collective et sociétale.

Ces trois biais ont ceci en commun que pour les surmonter, une démarche en 3 étapes paraît être la plus efficace :

  • Identifier le biais, c’est l’étape de la prise de conscience
  • Comprendre le biais, c’est à dire après avoir pris conscience de son existence, comprendre ses tenants et aboutissants
  • Enclencher un changement de comportements, passer à l’action

Cette démarche en 3 étapes correspond tout à fait à celle d’un processus de coaching.

Le travail consiste alors à amener le client à prendre du recul sur lui-même et sa situation, afin de reconsidérer son rapport à son environnement, aux autres et parfois à lui-même. Par ce travail commun entre le client et le coach, une réponse endogène du client fait surface et va ouvrir le champs de la mise en action vers des solutions.

Tout processus de coaching va être organisé autour de l’atteinte d’un objectif, c’est à dire le passage d’une situation A non désirée à situation B désirée, donc d’un changement, tout en favorisant les prises de conscience et la compréhension par l’individu de ses propres mécanismes internes.

Pour entrer dans ce type de démarche, les demandes initialement communiquées par les femmes concernées devront être explorées par la coach. La coach devra donc s’attacher à faire une exploration contextuelle précise qui permettra parfois même d’amener les premières prises de conscience.

Dans nos exemples ci-dessus, nous avons 3 demandes majeurs qui sont :

Christine : Je voudrais me sentir à l’aise pour facturer mes clients le vrai prix, ne pas trouver ça trop cher et m’excuser de mes prix, je veux donner la vraie valeur aux choses que je vends.

Pauline : Je voudrais accéder à un poste de management, mais je n’ose pas le manifester à ma hiérarchie, j’ai laissé filer la parfaite opportunité, je ne sais même pas pourquoi.

Anaïs : Lorsque l’on me fait des remarques, je les ressasse pendant des jours, je me ferme complètement et ça me tourne en boucle et me déprime complètement, je voudrais pouvoir débrancher mon cerveau.

 

 

Ces demandes seront au cœur des premières séances de coaching et serviront de base au processus de coaching. Le coach devra s’assurer qu’il s’agisse bien de demandes explicites, avec une réelle volonté d’atteindre une situation espérée. Les plaintes formulées plus haut, en elles-mêmes, ne peuvent faire l’objet d’un processus de coaching, un tel processus s’organise autour d’un objectif claire, précis, et formulé positivement. La coach devra donc dans un premier temps être particulièrement attentif à identifier et qualifier le type de demande que le client lui présentera.

Le ou la coach devra systématiquement amener sa cliente à contextualiser et clarifier ses propos, là encore, dans l’objectif d’aboutir à une situation claire permettant de poser l’objectif du processus de coaching.

Cet objectif devra répondre à plusieurs enjeux : il devra avoir du sens selon l’échelle de valeurs de la cliente, il devra être inscrit dans le contexte de la cliente, il devra permettre de respecter l’écologie de la cliente, il devra respecter des impératifs de formulation, et il devra pouvoir être atteignable, mesurable et mesuré. Ces 5 enjeux sont ensuite creusés au travers de 15 critères englobant ce que l’on nomme le PFDO, le Protocole de Formulation et de Détermination de l’Objectif.

Par ses premiers questionnements, le coach pourra donc bien amener des premières prises de conscience, mais s’appliquera surtout à saisir toute l’ampleur de la demande afin d’amener la cliente à la qualifier sous forme d’objectif.

2.2.1       Identification du biais

Pour se lancer dans la démarche d’exploration de la demande, et permettre au client de clarifier sa propre pensée, la coach pourra utiliser différents outils à sa disposition.

Un outil qui semble particulièrement adapté au sujet est le score.

Il s’agit d’un outil permettant de donner, en un minimum de temps, une vision d’ensemble de la situation, l’objectif ne sera donc pas de rentrer dans le détail, d’ailleurs l’utilisation de cet outil doit logiquement durer une vingtaine de minutes.

Prenons l’exemple de Pauline, qui souhaite devenir manageuse mais n’a pas manifesté à sa hiérarchie son souhait lorsqu’un poste idéal pour elle s’est libéré.

Coach : Dans votre situation professionnelle actuelle, que se passe-t-il concrètement ?

Pauline : Et bien je suis consultante sénior depuis 3 ans, et je ne passe pas le grade de manager, ça fait 2 ans que je suis chez un client chez qui tout se passe bien, le manager de la mission est parti et je pensais pouvoir le remplacer, mais mon cabinet a finalement recruté quelqu’un d’autre, un peu plus jeune que moi, avec moins d’expérience que moi. Ca m’a beaucoup vexé, je comprends pas pourquoi personne n’a pensé à moi, mais c’est vrai que je me suis pas faite connaître.

Coach : Qu’est-ce que cette situation vous amène à ressentir ?

Pauline : De la frustration, de l’humiliation, un peu de découragement, un peu de colère aussi

Coach : Qu’est-ce qui a causé cette situation selon vous ?

Pauline : Ben peut-être le fait que je m’isole un peu trop de ma hiérarchie, que je n’ai pas dit que je souhaitais passer manager, autant ils n’ont même pas pensé à moi, ou alors ils pensent que je suis nulle. Mais la cause je dirais que c’est que j’ai pas osé me mettre en avant et dire que je voulais le job.

Coach : Sur quoi vous êtes-vous appuyée pour essayer de résoudre la situation ?

Pauline : Ah bah j’ai rien essayé de résoudre, c’est fait c’est fait, mais la prochaine fois je veux que ça se passe différemment, c’est pour ça que je fais ce coaching. Je m’appuie peut-être sur ma capacité à me remettre en question pour faire mieux la prochaine fois ?

Coach : Qu’est-ce que vous voulez et sur lequel vous avez le pouvoir d’agir ?

Pauline : Je veux devenir manager et je pense que j’ai le pouvoir d’agir là-dessus en me mettant en avant, en sortant du bois en fait, en mettant en valeur mon travail, en osant dire que je veux passer au stade supérieur, en arrêtant de me mettre des limites et de me faire petite en fait

Coach : Qu’est-ce que l’atteinte de cet objectif vous apportera ?

Pauline : Ben déjà j’évoluerais dans mes compétences professionnelles, j’apprendrais d’autres choses, j’aurais une meilleure rémunération aussi, mais je crois que surtout je me sentirais valorisée, ça c’est le plus important, j’aurais l’impression d’être douée dans ce que je fais et que mon travail mérite d’être récompensé

 

 

Du fait du temps limité consacré à l’utilisation de cet outil, la cliente va être amenée à répondre directement aux questions et à cibler inconsciemment les réponses les plus directes. Evidemment il s’agira ensuite d’aller explorer chaque axe et entrer dans le détail, mais c’est un outil adapté pour identifier les premiers biais éventuels.

2.2.2       La prise de conscience

Coach : Prenons un peu de recul, que pensez-vous de la personne qui vient de raconter cette histoire ?

Pauline : Je trouve que c’est un peu triste de pas prendre sa place, je me rends compte que je suis ma propre ennemie et que je me mets en retrait, j’aurais très bien pu crier haut et fort que j’étais capable de prendre en charge ce job, que je voulais ce job, mais il aurait fallu que je crois en moi plutôt que d’attendre que mes boss croient en moi à ma place…Ca m’énerve de me rendre compte de ça, en fait c’est une question de confiance en moi non ?

 

 

 

En posant très peu de questions, la coach a pu avoir une première vision de la situation globale et en outre, une première prise de conscience a émergé. Si Pauline sentait qu’elle avait sa part de responsabilité dans le fait qu’elle n’ait pas été promu au grade de manageuse, elle a lors de cet exercice pris pleinement conscience qu’elle s’autolimitait elle-même.

En outre, cet exercice a aussi permis de mettre en avant une première esquisse d’objectif : devenir manageuse ne peut être l’objectif du processus de coaching puisqu’il ne dépend pas intégralement de la cliente, c’est un des critères du PFDO, en revanche, le fait de mettre en avant son travail, de gagner en visibilité, d’assumer son souhait d’être promue auprès de sa hiérarchie est une première piste solide vers la détermination de l’objectif de Pauline.

Le score aura permis de très rapidement prendre la mesure de la situation et d’amener Pauline à structurer sa propre pensée.

Dès l’utilisation de cet outil et avant même l’élaboration de l’objectif, le spectre du syndrome de l’imposteur semble se dessiner au travers de phrases telles que « en osant dire que je veux passer au grade supérieur », « en arrêtant de me mettre des limites et de me faire petite », « je suis ma propre ennemi », « je me mets en retrait », et « il aurait fallu que je crois en moi ».

A partir de ce premier constat, la coach pourra orienter son questionnement sur les limites que Pauline estime se mettre, sur sa capacité à croire en elle, sur ce qu’elle estime être ses capacités et compétences, sur sa confiance en son travail et en elle-même.

Ce type de questionnement permettra à Pauline, peu à peu, de prendre conscience de l’existence de son blocage, qui semble d’ores et déjà commencer à émerger.

 

Un second outil qui peut être intéressant à utiliser dans le cas de Pauline est l’outil des 6 chapeaux de Bono. Etant donné que Pauline a tendance à beaucoup identifier les problèmatiques face à elle et de ne pas se laisser l’autorisation de « prendre sa place », amener Pauline a envisager ce qu’elle pourrait faire, la place qu’elle pourrait prendre en lui disant par exemple de porter le chapeau vert de Bono pourrait être pertinent. En amenant Pauline à s’imaginer coiffée du chapeau vert de la pensée créative, de l’ambition, la coach donne à Pauline la possibilité de ne plus se faire petite – pour reprendre sa propre expression. La coach, par son questionnement et en rappelant à Pauline l’état d’esprit du chapeau de Bono, l’amènera à ouvrir davantage son champs des possibles, ce qui permettra à Pauline d’assumer entièrement ses ambitions, d’envisager que tout est possible. Libérée du poids de l’auto-limitation, Pauline pourrait découvrir, avec l’aide de cet outil et du questionnement, quelles sont ses envies et ambitions profondes.

Nous avons exploré l’exemple de Pauline, mais pour chacune de ces femmes, la première étape sera donc la prise de conscience des mécanismes en jeu dans leurs frustrations et qui ressortent donc dans leurs demandes. Pauline ne saura pas nécessairement si elle est, ou non, concernée par le syndrome de l’imposteur, de même qu’Anaïs n’aura pas forcément conscience d’être éventuellement prise dans le cercle vicieux de la rumination. Mais le questionnement et les outils utilisés par la coach les amèneront à ces prises de conscience.

Dans un deuxième temps, l’étape à envisager sera celle de la compréhension du biais à l’œuvre.

2.2.3       La compréhension du biais

Après avoir pris conscience de l’existence d’un blocage, qu’il s’agisse de perfectionnisme, de syndrome de l’imposteur ou de rumination, il faudra s’assurer de comprendre entièrement ce biais et ses tenants et aboutissants. Cette étape intervient à la fois pendant et après la formulation de l’objectif, le plus gros du travail sera cependant généralement réalisé après la détermination de l’objectif.

Le sujet du travail sera donc de comprendre quand ce biais se met en place, dans quelles situations particulières, éventuellement pour palier quoi, avec quel résultat ?

Les séances autour de l’élaboration de l’objectif et après l’élaboration de celui-ci auront cet objectif.

Différentes stratégies de questionnements peuvent-être utiles pour appréhender chacun des 3 biais identifiés ci-dessus : le perfectionnisme, le syndrome de l’imposteur, et la rumination.

 

Prenons un nouvel exemple, celui d’une cliente qui se sent dépassée par sa charge de travail depuis le début de sa vie professionnelle, quelque soit le contexte, le questionnement aura été le suivant :

 

Coach : Qu’est-ce qui selon vous est à l’origine de votre épuisement ?

Marjorie : Ben le fait que je bosse 3 fois plus que les autres, mais c’est aussi comme ça que l’on reconnaît la qualité de mon travail, je peux pas juste arrêter

Coach : Quels sont les avantages à bosser 3 fois plus que les autres ?

Marjorie : D’être reconnue comme une bosseuse qui ne fait jamais aucune erreur, mes dossiers sont toujours parfaits

Coach : Quels sont au contraire les inconvénients à bosser 3 fois plus que les autres ?

Marjorie : Ben on me reproche aussi de ne pas travailler assez vite, et d’en faire trop parfois, mon manager m’avait dit d’éviter la surqualité, mais je peux pas m’en empêcher.

Coach : Qu’est-ce que c’est la surqualité ?

Marjorie : C’est le fait de toujours faire davantage que ce qui est attendu, et que tout ce qui est fait soit fait parfaitement, c’est important pour moi.

 

 

Coach : Qu’est-ce que ça vous apporte de faire cette sur-qualité ?

Marjorie : Qu’on me reproche rien, enfin on me reproche quand même des choses finalement, mais différemment, on me reproche d’être stressée, de m’isoler dans mon bureau et de pas travailler en équipe, mais parallèlement on loue la qualité de mes dossiers et j’ai toujours réponse à tout.

Coach : En quoi faire de la sur-qualité pourrait vous impacter négativement aujourd’hui ?

Marjorie : Ca m’impacte déjà négativement puisque finalement on me reproche aussi des choses et en plus je suis épuisée et moi je me sens quand même nulle puisque rien n’est jamais assez bien pour les gens, on me dit que mes dossiers sont bons « MAIS » que je suis trop stressée, trop isolée, que je bosse lentement. Au final rien ne suffit jamais.

Coach : Rien ne suffit pour qui ?

Marjorie : Plutôt pour moi…parce que je pense que si je ne faisais pas de sur-qualité ça irait très bien à mon manager vu qu’il me le demande lui-même…donc c’est pour moi que rien ne suffit jamais…

Coach : Qu’est-ce qui vous fait penser que rien ne vous suffit jamais ?

Marjorie : Bah je me dis toujours ça, si je fais quelque chose juste correctement je pourrais être critiquée. Et puis j’ai été élevée comme ça, si je faisais mal je me faisais engueuler et je me sentais tellement triste, j’avais vraiment l’impression que mes parents m’en voulaient. Je pense que j’ai gardé un peu ça à l’âge adulte. Si c’est pas parfait c’est un risque qu’on m’engueule, ou qu’on me rejette je pense.

Coach : Qu’est-ce que vous ressentez dans ces cas-là ?

Marjorie : De la honte, j’ai envie de me cacher quand je fais une erreur, j’ai l’impression d’être une gamine prise en faute et que je vais être punie, c’est terrible comme sensation.

 

 

Marjorie prend peu à peu conscience de l’origine de son comportement axé vers le perfectionnisme, elle fait le lien entre son perfectionnisme et sa peur d’être rejeté. C’est un début de piste pour aller comprendre les tenants et aboutissants de son perfectionnisme et les inconvénients qu’il occasionne dans sa vie.

Les domaines de vie ont également été un outil très utile dans le cadre du processus de coaching de Marjorie. La cliente se plaignait d’être submergée par son travail, de passer beaucoup plus de temps que les autres sur ses dossiers, et fatalement, son travail prenait beaucoup de place dans sa vie personnelle, tant en terme de temps que d’énergie.

L’outil des domaines de vie consiste à représenter sur une feuille de quoi notre vie est constituée par exemple au travers d’un camembert.

Le cercle représentant toute notre vie, et il s’agira donc de dessiner la place du travail dans notre vie, puis la place de notre vie familiale, amicale, sportive, ou tout autre type d’activités qui a de l’importance dans la vie de votre client.

Ce premier camembert représente donc la vie actuelle de Marjorie, avec une large place laissée au travail. Marjorie a cependant souhaité faire un camembert concernant son temps, et un second camembert concernant son énergie, pour marquer la distinction entre le temps qu’elle donne à son travail, qui représentait 60% du camembert, et l’énergie qu’elle consacre à son travail, qui représente quasi 90% du camembert. Cette réalisation a été difficile pour Marjorie et l’enjeu a été à ce moment-là d’être attentive à l’écologie de cette cliente qui a été bousculée par la représentation illustrée de sa vie.

Se lancer dans la seconde partie de l’exercice a été évidemment crucial, Marjorie a apprécié se projeter dans une vie idéale, dans laquelle les deux camemberts (temps et énergie) étaient similaires et dans laquelle elle pouvait toujours consacrer 60% de son temps à son travail, mais en mettant cette fois 60% de son énergie, ce qui correspond davantage à la vision qu’a Marjorie de sa vie idéale.

Lorsque l’on réalise cette exercice, il est crucial d’amener le client à se projeter sur une vie idéale qui lui semble à la fois atteignable, afin d’éviter tout effet de découragement intense, ça a été le cas avec Marjorie qui, en voyant le camembert idéal, a pris conscience que c’était une réalité atteignable pour elle.

Christine, est également un cas intéressant, sa demande initiale est la suivante : « Je voudrais me sentir à l’aise pour facturer mes clients le vrai prix, ne pas trouver ça trop cher et m’excuser de mes prix, je veux donner la vraie valeur aux choses que je vends ».

Lors de nos premiers échanges, Christine identifie que pour elle, seul ce qui a été difficile peut avoir de la valeur, elle lie directement la notion de valeur au fait d’avoir fourni de gros efforts. Au premier abord, j’ai donc envisagé que Christine puisse avoir un driver « fais des efforts », mais Christine ne valorise pas l’effort en lui-même, elle ne valorise l’effort que s’il aboutit à la réussite, sinon, elle estime ne pas avoir suffisamment fait d’efforts. Quelles que soit les situations, Christine estime aussi qu’elle aurait toujours pu faire mieux. Son driver principal semble alors être le perfectionnisme, pour confirmer mon ressenti, j’expose les différents drivers à Christine, qui se reconnaît immédiatement dans le driver « sois parfait » et me confirme que pour elle faire juste des efforts ne vaut rien, il faut réussir et non pas essayer. Seule la victoire compte, et elle doit être parfaite. Le perfectionnisme de Christine semble se dessiner.

Pour continuer à explorer son perfectionnisme, une piste intéressante a été de travailler sur ses valeurs. Je ne fus pas surprise de trouver parmi ses valeurs les plus hautes : efficacité (en 2ième position), Rigueur (en 3ième position) et fiabilité (en 5ième position), trois valeurs qui entrent parfaitement dans le champs lexical du perfectionnisme.

Tant dans le processus de Christine que dans celui de Marjorie, le mot perfectionnisme est sorti rapidement. Les deux femmes ont bien conscience d’être perfectionniste, l’enjeu du processus de coaching est alors de les amener à réaliser où elles se situent sur le continuum du perfectionnisme, quelles sont les occasions qui les pousse vers le perfectionnisme, au contraire dans quelles occasions s’autorisent-elles à ne pas l’être, quelle peur cache ce perfectionnisme, quelle émotion occasionne-t-il ? Quels sont les avantages à être perfectionnisme, et quels en sont les inconvénients ?

L’objectif est la compréhension.

Après les deux premières étapes validées : la prise de conscience et la compréhension du biais, il s’agira d’axer le coaching vers les changements de comportements qui permettront de surmonter les biais, et donc par exemple de remplacer le perfectionnisme par des comportements adaptés à l’objectif de la personne coachée.

La démarche du processus de coaching sera d’amener la personne à se mettre en action pour remplir des objectifs intermédiaires jusqu’à l’atteinte de l’objectif final.

2.2.4      Le changement de comportements pour surmonter le biais

Après avoir identifié le biais, et compris de façon extensive la façon dont il entre en jeu, il s’agira d’orienter le processus de coaching vers la modification des comportements qui peuvent impacter négativement les femmes concernées. L’enjeu reste bien l’atteinte de l’objectif, et comme le rappelle cette célèbre citation d’Alfred Einstein : « la folie c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à des résultats différents ». Pour atteindre un objectif jamais atteint auparavant, il faut donc favoriser les nouveaux comportements qui vont permettre l’atteinte de l’objectif.

Cette étape du processus de coaching est la plus importante, la prise de conscience seule ne suffisant souvent pas à entraîner un réel changement de comportements. Il faut donc ancrer directement le changement lors du processus de coaching afin que le changement se mette en place petit à petit.

Afin d’amener des changements profonds, dès les premières séances, il est nécessaire d’identifier des petites actions à mettre en place, ce que j’appelle avec mes clientes « la théorie des petits pas ».

A partir de l’identification de l’objectif en accord avec les critères du PFDO, chaque fin de séance doit être accompagnée d’une mise en action, même minime, mais permettant d’avancer vers l’objectif.

Après plusieurs séances, l’objectif de Pauline – qui souhaitait évoluer dans sa carrière professionnelle – a été le suivant : Je veux valoriser et mettre en avant mon travail par la communication et la prise d’initiative, afin de solliciter une promotion lors des entretiens annuels de Janvier.

Et voici le type de mises en actions que nous avons élaboré ensemble :

Séance 3 : Solliciter un feedback à 360° de mon manager

Séance 4 : Appeler mon manager pour lui raconter le séminaire organisé chez le client et lui faire part de la satisfaction du client vis à vis du travail de l’équipe.

Séance 6 : Avoir une conversation avec mon manager pour parler de ma volonté de passer manager et avoir ses conseils sur les efforts à fournir

Séance 8 : Mettre en place une réunion de 15min chaque vendredi avec mon manager pour échanger sur ma semaine

 

Pauline souhaitait avancer vite et se sentait capable de mettre en place des actions importantes, tout au long du processus elle a réussi à remplir chaque action qu’elle avait décidé de faire, en ajoutant même parfois d’autres.

Parallèlement à cette mise en action, le travail a été approfondi sur la notion de confiance en soi et en ses capacités, Pauline souffrant d’un syndrome de l’imposteur la poussant à cacher son travail.

Pour orienter le client vers la mise en action, avoir des objectifs intermédiaires moins ambitieux peut être d’une grande aide. En effet, en début de processus de coaching, l’objectif peut et doit paraître challengeant, face à une cliente qui aurait un fort syndrome de l’imposteur, et donc une relative confiance en elle, cela pourrait être décourageant. La solution dans ce cas sera d’amener le client à se focaliser sur des petits objectifs intermédiaires qui amèneront petit à petit l’atteinte de l’objectif plus global. Au fur et à mesure des avancées de la cliente, celle-ci verra les objectifs atteints et tirera de la confiance pour aller atteindre son objectif final. C’est donc un levier important pour permettre de déjouer des biais comme le syndrome de l’imposteur, qui peuvent être profondément ancrés et jouer sur la confiance de la cliente à aller atteindre son objectif.

A l’issue du processus de coaching, l’utilisation de l’outil crée par Gregory Bateson a également permis de renforcer Pauline afin qu’elle accède d’autant plus aux ressources nécessaires pour se mettre en action. Lors de nos précédentes sessions de coaching, Pauline était particulièrement réceptive aux techniques de visualisations utilisées par exemple au travers de la méthode rétrograde. Ces techniques lui permettaient d’avoir une grande motivation en visualisant son but. Utiliser l’outil Bateson a donc permis de suivre 3 objectifs :

  • Vérifier que l’ensemble des blocages liés au syndrome de l’imposteur avaient été traités
  • Faire du renforcement sur la confiance en soi
  • Augmenter la motivation de Pauline à poursuivre son objectif à l’issue de notre coaching

2.2.5      La posture du coach dans un processus de coaching sur les biais internalisés

En tant que coach sur ce genre de biais, il n’est évidemment pas question d’entrer dans des considérations politiques et de chercher à apporter à la cliente un éclairage sur les origines sociétales de ces biais. La coach devra garder en tête que chaque cas est différent, chaque femme est unique et si ces biais peuvent toucher davantage de femmes que d’hommes, ou s’ils sont présents de façon endémique au sein des femmes qui sollicitent du coaching, il ne veut pas dire qu’ils s’exprimeront à l’identique chez toutes ces femmes.

Chaque nouveau processus de coaching est une page blanche, chaque cliente est à découvrir par la coach, qui ne devra donc pas chercher à appliquer des solutions toutes faites qui auraient pu marcher avec une autre cliente touchée par les pensées ruminatives ou le syndrome de l’imposteur.

La posture du coach devra donc rester une posture basse sur l’intégralité du contenu de chaque coaching.

Le risque également en se spécialisant dans une niche sur les biais freinant l’épanouissement professionnel des femmes est aussi de chercher à voir – et donc de voir- ces biais partout et chez toutes les clientes. Une coach devra donc être particulièrement attentive à ne pas à tout prix faire « rentrer » ses clientes dans les cases de sa spécialité. Tout manque de confiance ne cache pas nécessairement un syndrome de l’imposteur, toute anxiété ne cache pas nécessairement de la rumination et avoir un driver « Soit parfait » n’est pas nécessairement en cause dans l’épanouissement professionnel d’une femme.

L’auto-évaluation, la technique du petit-vélo, et la supervision seront les mécanismes garantissant une posture adéquate pour accompagner au mieux mes clientes.

3 La part de responsabilité des organisations

3.1       Les constats à améliorer

Au-delà de la capacité à de ces femmes à adresser d’éventuels biais au sein d’un processus de coach et par une démarche d’accompagnement, d’autres facteurs sont cruciaux pour permettre aux femmes de développer leurs leadership. Les femmes ne pouvant évidemment pas percer le plafond de verre en travaillant uniquement sur leurs propres biais.

Certains de ces facteurs sont donc entre les mains des entreprises et de leurs instances dirigeantes.

Il s’agit donc pour ces entreprises de questionner l’héritage culturel que nous partageons tous, hommes comme femmes, dirigeants, managers ou non. Il s’agit alors de se questionner sur le fait d’offrir de véritables opportunités d’expression de soi et d’épanouissement aux femmes – tout comme aux hommes cela dit.

Concernant l’égalité hommes-femmes, certaines entreprises aiment surfer sur la mode du moment et afficher par exemple des chiffres parfait sur la parité : 50% de femmes – 50% d’hommes au sein de leurs effectifs, en plus d’enveloppes importantes pour renforcer la mixité et la promotion des femmes. BNP Paribas par exemple, affiche une enveloppe de 10 millions d’euros pour 2023 et 2024, destinée à cette mission et notamment à la « correction éventuelle des écarts injustifiés de rémunération ».

Pourtant lorsque l’on creuse, on peut parfois observer que s’il y a bien 50% d’effectifs féminins et 50% d’effectifs masculins, la grande majorité des postes de management sont occupés par des hommes tandis que la grande majorité des postes non cadres sont occupés par des femmes. Dans le cas de BNP Paribas, l’enveloppe de 10 millions d’euros en faveur notamment de l’égalité salariale paraît être un bon signal, pourtant, l’organisation vient d’être condamnée en première instance pour ne pas avoir intégré la part variable du salaire dans le calcul des écarts salariaux entre hommes et femmes. Cette part variable est en effet extrêmement substantielle dans le secteur financier, elle peut parfois aller jusqu’à un doublement du salaire.

Ces organisations, du secteur financier comme des autres secteurs, doivent donc être particulièrement vigilantes à porter des valeurs d’égalité non seulement auprès de ses clients, mais avant tout en interne auprès de ses salarié-e-s. Nul doute que BNP Paribas, tirant apprentissage de ses erreurs, se placera désormais en chef de file sur le sujet et pourra inspirer tout le secteur sur le type de pratiques à mettre en place.

Mais quelles peuvent donc être ces types de pratiques ?

3.2       Les leviers d’amélioration des conditions des femmes en entreprise

Tout d’abord, il s’agit de prendre conscience que même avec la meilleure volonté du monde, nous avons toutes et tous des biais de genre qui nous sont inculqués dès notre naissance, il s’agit donc pour toute femme et homme du 21ièmesiècle de prendre conscience de l’existence de ces biais et de la façon dont ils s’expriment au sein de notre vie.

3.2.1      La formation aux biais de genre

A l’échelle de l’entreprise, une formation sur les biais associés aux genres pourra être un premier pas extrêmement bénéfique, par exemple une telle formation pourra enseigner aux manageuses et managers à identifier à quel moment de leurs management ils ont pu faire preuve de sexisme sans même s’en être rendu compte. A ce titre, nous pourrions citer l’exemple que mon amie anesthésiste-réanimatrice a partagé avec moi récemment : « Ca nous arrive tout le temps à l’hôpital, si je rentre dans une chambre avec un infirmier et que le patient ne nous connaît pas encore, il va d’abord s’adresser à l’infirmier en pensant qu’il est le médecin et que je suis l’infirmière, c’est pas méchant du tout et une fois que je me présente ça pose aucun problème de légitimité ou de confiance, mais je pense qu’on est juste programmé comme ça en fait ». Même avec la meilleure volonté du monde nous pouvons ignorer que nous sommes toutes et tous confrontés aux biais de genre et pouvons avoir de tels comportements.

La formation et la sensibilisation est donc le premier pas.

3.2.2      Le coaching des talents féminins sous l’impulsion de l’organisation

Le deuxième pas majeur fait l’objet de ce mémoire : les entreprises peuvent également inciter leurs talents féminins à exploiter leurs pleins potentiels en leur finançant un accompagnement de coaching.

Un tel accompagnement aura pour principal intérêt de permettre aux talents féminins identifiés par l’entreprise de bénéficier d’un accompagnement pour atteindre leurs objectifs professionnels et donc a priori pour évoluer dans leurs carrières vers davantage d’épanouissement et de réalisation de soi.

Lorsque l’entreprise promouvra ce type d’initiatives, il y a plusieurs question à se poser. La première est que la ou les clientes ne pourront a priori pas choisir leurs coachs, qui pourront être choisis par l’entreprise elle-même, voir même parfois, le ou la coach pourra être directement interne à l’entreprise.

Dans ce cas, la question se pose : quid du coaching de ces problématiques par un homme ?

Tout au long de ce mémoire, nous avons focalisé notre analyse sur les femmes, mais il est important de préciser que bon nombres d’hommes ont à cœur de supporter et soutenir l’égalité hommes – femmes, si les mentalités des femmes évoluent, celles des hommes les accompagnent également.

Quel pourrait être alors l’avantage de faire appel à un coach homme pour ce genre de problématiques ?

Nous l’avons abordé précédemment, chaque coach – en tant qu’être humain – est soumis à ses propres biais, que ces biais concernent le genre ou tout autre chose, les femmes comme les hommes ont donc leurs propres biais de genre. Un coach homme, aura évidemment ses biais de genre, mais n’aura a priori pas vécu de discrimination basé sur le genre dans le cadre de sa vie professionnelle. L’usage du terme « a priori » étant ici important dans la mesure où certains métiers dits « féminins » sont également touchés par des biais de genre dont cette fois-ci les hommes pourraient souffrir. Mais restons dans la grande majorité des cas, dans lesquels les hommes sont donc moins soumis aux discriminations liés aux genres que les femmes. Un coach homme, en ayant pas été soumis à ce genre de biais, pourra donc avoir une extériorité cognitive et une neutralité importantes. En n’ayant pas lui-même vécu les situations qui pourraient être dépeintes par ses clientes, il aura moins de risques de transferts et contre-transferts et aura donc plus de facilité à respecter la posture basse nécessaire au processus de coaching.

L’extériorité cognitive est évidemment très importante chez un coach, mais avoir un coach qui peut rapidement saisir votre situation du fait d’une expérience de vie similaire peut également avoir de l’intérêt, une coach peut donc tout autant être utile à sa cliente et à l’atteinte de ses objectifs.

Les entreprises, en optant pour la formation et le coaching, donnent à la fois aux hommes et aux femmes l’opportunité de combattre leurs biais liés aux genres, et d’œuvrer à l’échelle individuelle pour une meilleure égalité entre les hommes et les femmes, tant dans le monde professionnel que dans la sphère personnelle. Ce genre d’initiatives sont donc à promouvoir et à développer, il est naïf de penser que nous sommes au-dessus de ces biais, chacun d’entre nous est malheureusement concerné, une entreprise reflétant la somme de ses individualités, chaque entreprise pourra donc également être concernée.

Faire appel à un coach en entreprise pour soutenir l’épanouissement des femmes au sein même de l’entreprise est une démarche majeure, impactante tant à l’échelle individuelle – pour toutes les femmes concernées – et à l’échelle globale. Cela participe à améliorer la parité au sein des entreprises et à améliorer les conditions des femmes au sein même de notre société. Le coaching, en permettant à ces femmes de s’écouter davantage, de prendre conscience de leurs capacités et valeurs, va être un levier crucial de développement et d’épanouissement, que ce soit au travers de leurs entreprises ou dans le cadre d’une démarche personnelle et individuelle, le coaching ne peut que soutenir les femmes du 21ième siècle et leur place – relativement nouvelle – dans notre société.

Conclusion

         Si cet article commence par une étude de la société actuelle c’est avant tout pour mettre l’emphase sur le fait que la place actuelle des femmes dans notre société et leurs mécanismes de pensées découlent naturellement des milliers d’années écoulées. Nous avançons dans le bon sens, mais pour intégralement mettre derrière nous les réflexes issus des années de patriarcat, le coaching s’avère être une aide précieuse.

Le coaching est une discipline qui permet de prendre conscience de soi, de prendre conscience de ses mécanismes de pensées, de son identité profonde et des éventuelles incohérences dues à nos croyances limitantes et biais. Ce travail permet donc aux femmes à la fois de prendre confiance en elles, mais aussi de déloger des croyances qui peuvent les desservir. Ce travail d’identification des croyances, biais et blocages est crucial pour l’épanouissement professionnel des femmes. Bien sûr, nombre de femmes parviennent à se hisser au sommet de la pyramide professionnelle et s’y sentent parfaitement épanouies sans être passées par la case coaching, mais cette discipline est une aide importante qui peut faire gagner un temps précieux. Plutôt que de passer les 5 prochaines années à apprendre plus ou moins violemment quels sont nos biais à dépasser, une démarche de coaching peut être un véritable accélérateur de carrière mais surtout accélérateur d’épanouissement, professionnel mais aussi personnel.

D’autre part, le coaching a ceci de différent qu’il produit des effets bien au delà de l’objectif poursuivi lors du processus de coaching. Ce point a été mis en avant par l’ensemble des clientes que j’ai pu accompagner jusque-là, toutes ont ressenti que l’objectif avait été un moyen d’évoluer de manière transverse.

Au delà des sujets liés à l’épanouissement des femmes dans le milieu professionnel, il me semble d’ailleurs que les enjeux auxquels se heurtent actuellement les entreprises peuvent être appréhendés au travers du coaching. En effet, nous l’avons vus plus tôt dans ce mémoire, il y a rarement eu autant de burn-outs, de démissions, ou de « quiet quiting[20] », femmes comme hommes ne se reconnaissent plus autant qu’avant dans le modèle professionnel actuel. En se questionnant sur soi-même, en étant capable de se rapprocher de ses valeurs, de son identité, de ses éventuels croyances et biais, le coaching peut être d’une aide précieuse sur ces problématiques de mal-être au travail.

En ce sens, les entreprises ont tout intérêt à s’intéresser de près à cette pratique et à la valoriser pour ce qu’elle est : un outil au service de l’épanouissement des personnes – femmes comme hommes.

Bibliographie

Livres

 – Brenée Brown (2015), Daring Greatly : How the courage to be vulnerable transforms the way we live, love, parent and lead, Avery

De 2 à 4 auteurs :

 – Lois P. Frankel (2014), Nice girls (still) don’t get the corner office, Business Plus

Plus de 4 auteurs :

 – Belkacem Ammiar (2019), La boîte à outils du coaching, Dunod

– Elisabeth Cadoche, Anne de Montarlot (2019), En finir avec la rivalité féminine, Les Arènes

  • Dr Susan Nolen-Hoeksema (2004), Women who think too much, Holt Paperbacks

Articles

  • Neïla Beyler (2021), « Pourquoi les femmes font plus de burn-out que les hommes » in LesEchos
  • Pierre-Julien Andrieux (2019), « Les femmes peu nombreuses aux postes à responsabilités », Insee
  • Florence Bray (2022), « Vent de féminisation sur le top management » in LSAgreen
  • Anne Bodescot (2022), « Seules les lois font avancer l’égalité hommes-femmes » in Le Figaro
  • Kathleen Finn (2012), « Le perfectionnisme et sa relation avec le contingentement universitaire et l’anxété de performance », Université du Québec à Montréal
  • Michael Gottlieb, Arlene Chung, Nicole Battaglioli, Stefanie S. Sebok-Syer, Annahieta Kalantari (2019), « Impostor syndrome among physicians and physicians in training : a scoping review »
  • Jennifer A. Villwock, Lindsay B. Sobin, Lindsey A. Koester and Tucked M.Harris (2016), « Impostor syndrome and burnout among American medican students : a pilot study », IJME
  • Sakulku J. (2011), « The Impostor Phenomenon » in The journal of behavioral science p. 75-97
  • Maud Navarre (2020), « D’où vient le syndrome de l’imposteur ? » dans Sciences Humaines 2020/11 (n°330) p.10
  • Edward R Watkins (2020), « Reflecting on rumination : consequences, causes, mechanisms and treatment of rumination » in Behaviour Research and Therapy vol 127 n°103573
  • Hui-Xia Zhou, Xiao Chen, Yang-Qian Shen (2019), « Rumination and the default mode network : meta-analysis of brain imaging studies and implications for depression » in NeuroImage vol 206
  • Daniel P. Johnson, Mark A Whisman (2013), « Gender differences in rumination : a meta-analysis » in PubMed Central
  • Benjamin Badia, Florence Brunet, Pauline Kertudo (2013) « Les freins et obstacles à l’entrepreneuriat féminin » dans Recherche sociale (n°208)
  • Neïla Beyler (2021), « Pourquoi les femmes font plus de burn-out que les hommes » in LesEchos, n° [vol, mois], Editeur

Sites web

 

[1] Statistiques source INSEE au 1er janvier 2019

[2] Statistiques publiée par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), fin 2019.

[3] Mouvement social encourageant la prise de parole des femmes concernant les cas de harcèlements et agressions sexuelles, ce mouvement a pris toute son ampleur en 2017 à la suite de l’affaire Weinstein.

[4] Sondage OpinionWay pour le cabinet Empreinte Humaine, Octobre 2021

[5] Etude McKinsey & Leanin.org basée sur 65.000 employés aux Etats-Unis

[6] Définition issue du site internet femmesenaffaireshec.com

[7] « Comment interpréter le genre », Linda Nicholson, publié dans « Nouvelles questions féministes » 2009/3 Vol.28, pages 62 à 88

[8] Sorotzkin, 1985

[9] « Daring Greatly », Brenée Brown, 2012

[10] Le terme « manageuse », au féminin, a été validé par la Commission générale de terminologie et de néologie en l’an 2000

[11] 2019, Gottlieb, Chung, Battaglioli, Sebok-Syer, Kalantari, Medical Education Vol 54, Issue 2, p 116-124

[12] « The surprising solution to the imposter syndrome », Lou Solomon, TEDxCharlotte – Disponible sur YouTube

[13] Impostor syndrome and burnout among American medical students : a pilot study », Int J Med Educ, 2016, Villwock, Sobin, Koester, Harris

[14] « Gender stereotpyes about intellectual ability emerge early and influence children’s interests », Science, 2017, p 389 – 391, Bian, Leslie, Cimpian

[15] « Validation of the Impostor Phenomenon among managers », Rohrmann, Bechtoldt, Leonhardt, Sec Personality and Social Psychology, 2016

[16] Nolen-Hoeksema, S., Wisco, B. E., & Lyubomirsky, S. (2008). Rethinking rumination. Perspectives on Psychological Science3, 400-424.

 

[17] Martin L.L, Tesser A et Wyer R.S (1996) « Ruminative thoughts, advances in social cognition. »

 

[18] « Gender differences in rumination : a meta-analysis », Johnson, Whisman, 2013

[19] « Women who think too much », Dr Susan Nolen-Hoeksema, 2004

[20] Fait de réduire ses heures de travail et son engagement global dans son travail sans pour autant démissionner.

Par Diego Torraca

#Philosophe #R&D #Autrui #Intersubjectivité

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